STAR OCEAN : THE DIVINE FORCE
Japon – 2022
Support : Playstation 5, Xbox Series X & S, PC
Genre : RPG, Space Opera
Développeur : tri-Ace
Éditeur : Square-Enix
Musique : Motoi Sakuraba
Durée de jeu : Longue
Langues : Anglais et Japonais (voix), Français (textes)
Date de sortie : 27 octobre 2022
LE PITCH
Lors d’une mission de transport de routine, le vaisseau de Raymond Lawrence est attaqué par la Fédération Pangalactique et s’écrase sur une planète technologiquement sous-développée. Il y rencontre la Princesse Laeticia, qui se bat pour protéger son peuple d’un empire ennemi. Ils se lancent ensemble dans une aventure qui rebattra les cartes de l’univers tout entier.
Un peu plus près des étoiles
Après un cinquième opus largement rejeté par les joueurs, la série des Star Ocean avait clairement perdu de sa superbe chez les fans de J-RPG. Pour regagner les faveurs de ce public exigeant, tri-Ace et Square Enix devaient impérativement présenter une copie revue et corrigée. Mais il n’est pas aisé de mettre les bouchées doubles quand on s’attend à des ventes freinées par la réputation du précédent opus. C’est toute la noblesse de la mission de Star Ocean : The Divine Force : Regagner le cœur des joueurs avant de briller dans les charts. Autant viser la lune ?
Pour créer ce sixième opus, sous titré The Divine Force, on a l’impression que les développeurs de tri-Ace ont fait preuve de pragmatisme en apportant une solution à chaque élément qui a fait défaut à Star Océan 5, aussi appelé Integrity and Faithlessness.
Les lacunes de Integrity and Faithlessness étaient légions. Elles touchaient l’ergonomie, l’interface, la mise en scène… Son principal défaut résidait certainement dans la dynamique de ses combats, au rythme souvent cassé, largement illisibles et accompagnés par une IA pas toujours raccord avec nos priorités de joueur. Il en résultait une grande frustration assez mémorable.
Face à cet écueil, le tout nouveau The Divine Force apporte une réponse claire et valable. Pour commencer, il y a moins d’alliés sur le terrain, ce qui allège la masse d’informations à gérer par le joueur. De plus, même s’il y a encore à redire (toujours), l’IA est largement plus futée qui ce qui avait été proposé précédemment. Enfin, et c’est certainement le plus gros ajout, un nouveau système de ciblage permet de fluidifier les mouvements de son héros, qui peut accéder à n’importe quel point du terrain de combat en un clin d’œil. On reste encore critique sur la lenteur de l’animation pour utiliser ses items en pleine action mais au delà de ce détail, les joutes sont bien plus confortables.
L’œil de la D.U.M.A.
En fait, le système que nous évoquons est bien plus qu’un simple outil de ciblage car il permet tout autant d’attaquer que d’explorer son environnement. Ces attaques sont particulièrement véloces et puissantes, ce qui ajoute encore plus de panache aux combats. Quant à la fonction d’exploration, elle mise à profit via le level design des zones ouvertes. Bien plus vastes qu’à l’accoutumée, elles ont bénéficié d’une certaine application dans leur architecture et proposent des énigmes qui ne peuvent être résolues que par le système de ciblage Pour tout dire, nous utilisons le terme »système » comme s’il s’agissait d’une simple fonctionnalité du jeu mais en réalité, il s’agit d’un élément intra diégétique, c’est à dire intégré à l’histoire, qui répond au doux nom de D.U.M.A. Pour faire simple, c’est une version cybernétique sous stéroïde de Navy, la fée du légendaire Ocarina Of Time.
La force de D.U.M.A, c’est qu’il permet tout à la fois de dynamiser les combats en maintenant un rythme constant et en apportant une option d’attaque en plus, et de remplir les zones d’exploration avec des mécaniques de plateformes et des énigmes toujours gratifiants à accomplir. Une solution simple pour répondre à plusieurs questions, c’est la base d’une bonne idée. Et ici, elle est bien mise en œuvre.
On ne nous dit pas tout
The Divine Force propose d’incarner deux personnages, chacun issu d’un monde différent. Un peu à la manière de Nier Automata, l’histoire se développe globalement mais ne se lit qu’à travers le point de vue de votre personnage. Ainsi, quand vos deux personnages principaux sont séparés, chacun aura une expérience unique. Vous n’avez accès qu’à celle que vous jouez mais vous pourrez découvrir l’autre durant une nouvelle partie. Cette manière de raconter est intéressante car elle enrichit l’histoire en posant plusieurs sous intrigues, toujours intéressantes à creuser. Par exemple, vous pouvez comprendre le sens d’une allusion qui vous échappait dans une partie en rejouant avec l’autre personnage.
Ce genre de narration s’accorde très bien avec les systèmes de private action si chère à la série. Il s’agit de mini cinématiques ou dialogues qui ne s’activent que sous certaines conditions et pour une durée limitée. Par exemple, une private action peut se lancer en se rendant à un pont la nuit et rencontrer un allié à qui vous pourrez parler. Comme elles sont éphémères, les private action distillent des informations particulières et ont une influence sur les affinités entre les personnages et même les fins.
Cette manière de raconter l’histoire en fonction de ce que peut voir votre personnage est d’autant plus intéressante qu’elle ajoute un peu de durée de vie et d’intérêt pour notre curiosité, Elle nous donne l’impression que l’univers de The Divine Force est bien plus dense que ce qui avait été proposé auparavant. Dans l’ensemble, l’histoire est accrocheuse. Après un démarrage en trombe plus que motivant, une baisse de régime s’installe durant le deuxième tiers du jeu mais les événements reprennent de vives couleurs une fois cette phase terminée.
Coupe Mulet
Si on s’y retrouve sur tout ce qui touche à la jouabilité et à l’histoire, on reste encore circonspect face à l’aspect graphique du titre. Depuis son passage en 3D, la série s’est toujours orientée vers une esthétique »figurine en résine » mise en lumière par une forme d’éclairage studio qui reste toujours aussi difficile à jauger. Le travail est là et la qualité est indéniable mais l’ensemble reste finalement assez plat, à la manière d’un éclairage soap opéra. Les animations faciales se cantonnent au strict minimum et donnent un aspect très rigide aux personnages, ce qui dénotent complètement avec leurs mouvements en motion capture, qui est au passage tout ce qu’il y a de plus propre.
Le character design suit la même tendance, avec une certaine recherche dans l’harmonie des formes et des couleurs mais au résultat finalement on ne peut plus classique. La seule prise de risque semble se trouver dans le design du héros qui présente une coupe de fan de Hulk Hogan coincé dans les années 80. Ce risque pourra être pris comme une faute de goût. Mais comme nous le disions plus haut, on ne pouvait pas s’attendre à ce que The Divine Force bénéficie d’un budget assez large pour ce genre de finition. De plus, en étant multi support, le titre doit s’assurer de pouvoir tourner sur l’ancienne génération, ce qui limite aussi les possibilités techniques. On reste tout de même sur sa faim sur le plan strictement visuel. En considérant ses orientations esthétiques, nous pensons que la série Star Ocean ferait bien de s’intéresser à ce qui a été proposé dans Tales of Arise, qui joue globalement sur le même tableau. Après tout, c’est avec l’expérience accumulée sur Tales of Phantasia (1995) que le premier Star Ocean (1996) est né. À mis chemin entre Xenoblade 3 et Tale of Arise, Star Ocean : The Divine Force avait fort à faire pour briller. Et le voilà qui arrive avec des combats dynamiques, une exploration entraînante et une histoire qui titille notre curiosité. C’est un gros travail de remise en forme de la série qui est proposé.
Dans le même temps, les fondamentaux des Star Ocean sont préservés. On retrouve même l’indétrônable Motoi Sakuraba pour la bande son. On regrettera seulement l’aspect graphique, qui manque un peu de vie. Le rattrapage ne pouvait pas être total, mais la mission est largement accomplie : les fans la série peuvent renouer avec l’objet de leur passion. C’est toujours beau, une réconciliation.