UNE ÉQUIPE HORS DU COMMUN
A League Of Their Own – Etats-Unis – 1992
Support : Bluray
Genre : Comédie dramatique
Réalisateur : Penny Marshall
Acteurs : Geena Davis, Tom Hanks, Madonna, Lori Petty, Jon Lovitz, David Strathairn…
Musique : Hans Zimmer, Madonna
Durée : 128 minutes
Image : 2.40:1, 16/9ème
Son : Anglais DTS-HD Master Audio 5.1, Français, Italien, Allemand Dolby Audio 2.0
S-T : Français
Editeur/Distrib. : Sony Pictures
Date de sortie : 1er mars 2023
LE PITCH
Durant la Seconde Guerre Mondiale, un riche industriel met sur pied la première ligue de base-ball entièrement féminine. Deux sœurs, Dottie et Kit, sont recrutés et intégrées à la même équipe. Mais leur rivalité pourrait bien venir gâcher cette belle aventure…
Girls with balls
Au sommet de sa popularité, la réalisatrice de Big et de L’Eveil convertit le base-ball et le film de sport, piliers de l’American Way Of Life, au féminisme. Trente après sa sortie, Une équipe hors du commun n’a rien perdu de son pouvoir de séduction et véhicule avec la même force, la même sensibilité et le même humour son message d’égalité, d’espoir et de persévérance. Incontournable.
Elle nous a quitté en 2018 mais son héritage perdure. Ayant gagné le cœur du public américain grâce au rôle de Laverne DiFazio dans la sitcom Laverne & Shirley, spin-off au long cours (8 saisons!) de la série culte Happy Days, Penny Marshall fait ses débuts derrière la caméra avec Jumping Jack Flash, tentative plutôt distrayante de transformer Whoopi Goldberg en Eddie Murphy au féminin. Big, son film suivant, créé la surprise en 1988 et Marshall devient la première cinéaste d’Hollywood a dépassé les 100 millions de dollars au box-office. Elle renouvelle l’exploit avec L’Eveil, un drame qui réunit Robin Williams et Robert De Niro et cumule trois nominations aux Oscars. C’est durant la préproduction de ce dernier, en visionnant un documentaire à la télévision, qu’elle découvre l’histoire vraie et oubliée de la All-American Girls Professional Baseball League (AAGPBL), première ligue professionnelle de base-ball féminin. Fascinée, Marshall obtient un accord de principe de la 20th Century Fox et commande aussitôt un scénario à ses vieux complices de Laverne & Shirley, le duo Lowell Ganz / Babaloo Mandel. Et la tâche n’est pas aisée.
Comment résumer en une fiction de deux heures les onze ans d’existence (1943-1954) de l’AAGPBL ? Ganz et Mandel font le choix assez logique de se concentrer sur la première année de la ligue et font graviter une multitude de sous-intrigues autour de la relation compliquée entre deux sœurs, Dottie Hinson et Kit Keller (créées de toutes pièces), des femmes du Midwest saisissant l’opportunité d’un bon salaire pour un sport qui les passionne. Le départ des stars du base-ball masculin au front demeure le point de départ de la création de la ligue mais le script réunit en seul personnage (fictif lui aussi) campé par Garry Marshall, le groupement d’industriels très fortunés à l’origine de ce coup d’éclat médiatique. Le personnage de l’entraîneur et manager Jimmy Dugan, symbolisant le changement de point de vue de la gent masculine sur le sport au féminin est quant à lui très librement inspiré d’Eddie Stumpf, un ancien joueur à la tête de l’équipe des Rockford Peaches, laquelle se révèle très importante dans le film mais qui, dans la réalité, fut reléguée au second plan jusqu’à son premier titre en 1945.
Jusqu’au bout du rêve
Avec un manuscrit en or massif de près de deux cent pages entre les mains, Penny Marshall doit encore convaincre la Fox (qui a déjà investi 7 millions de dollars) de lui laisser réaliser le film. Mais lorsque le studio tente de la lui faire à l’envers en choisissant le casting à sa place et en la remplaçant par un homme, la réalisatrice trouve refuge chez Sony qui lui laisse les pleins pouvoirs et un budget confortable de 40 millions de dollars. Grand bien en a pris aux nouveaux propriétaires de la vénérable Columbia.
Penny Marshall fait entrer le féminisme dans le film de sport sans tambours ni trompettes, sans gros sabots. Elle réinvestit tout simplement les clichés inhérents au genre. Les entraînements, le premier match où chacun (pardon, chacune) cherche le bon rythme et la bonne entente, la longue ascension vers la finale par le biais d’un montage enivrant de bouts de matchs et le suspense insoutenable du dernier point décisif. Au bout de quelques minutes, installé en terrain connu, le macho de base se retrouve ainsi à applaudir celles dont il se moquait quelques instants plus tôt et ceci sans même sans rendre compte. Et Marshall d’enrober le tout en Scope dans un superbe écrin à la Norman Rockwell (merci à la photo du tchèque Miroslav Ondricek, un fidèle de Milos Forman!) tout en s’inspirant des screwball comedies d’Howard Hawks et Preston Sturges des années 30 et 40. Même Hans Zimmer fait un bel effort pour l’occasion et muscle ses orchestrations pour donner de l’étoffe et une texture vintage à un score plaisant (mais aussi parfaitement oubliable, malheureusement).
Même si la réalisatrice songeait au départ à donner sa chance à de parfaites inconnues, elle ne résiste finalement pas bien longtemps à faire appel à un ensemble de stars triées sur le volet. Et elle en fait le plus bel usage qui soit. Surfant sur le succès de Thelma & Louise, Geena Davis domine la distribution et pas seulement en raison de sa taille et de son physique sportif, son charisme à la Katherine Hepburn faisant ici merveille. Actrice inégale, Madonna trouve là son meilleur rôle (et signe au passage la chanson du générique de fin). En osmose avec le personnage de Mae « All The Way » Mordabito et dans lequel la reine de la pop met beaucoup d’elle-même, elle forme un duo attachant avec l’hilarante Rosie O’Donnell. Sans forcément chercher à attirer l’attention, Tom Hanks n’aura jamais été aussi proche de son modèle James Stewart et se paie tout de même la meilleure réplique du film (« There’s no cryin’ in base-ball ! ») avec l’aide de la très séduisante et hilarante Bitty Schram. Et ne pas citer Lori Petty, Megan Cavanagh et David Strathairn, tous impeccables, serait presque criminel.
En dépit d’un montage un peu frustrant à force de tailler dans sa trop grande galerie de personnages et d’intrigues et d’un épilogue à deux doigts de s’engluer dans un sentimentalisme plus appuyé que nécessaire, Penny Marshall tient fermement la barre et réalise son plus beau film, le plus personnel aussi car elle y rend le plus vibrant des hommages au courage et à la résilience des femmes.
Image
Il aura donc fallu attendre cinq longues années pour que la copie haute-définition réalisée à l’occasion du 25ème anniversaire du film soit visible en France, même si il était quand même possible de se la procurer en import Benelux. Les scènes contemporaines en ouverture et en clôture déçoivent avec une définition sans relief et des couleurs masquées par un voile vidéo très artificiel. Le constat s’améliore nettement dès lors que l’histoire bascule dans les années 40 avec une colorimétrie qui se réchauffe nettement, des contours ciselés et un grain séduisant. Compression aux petits oignons et mastering de pro assurent le spectacle lors du climax.
Son
La version française est proposée dans une stéréo robuste et propre comme un sou neuf mais qui ne fait pas le poids en termes de profondeur, de découpage avec le DTS-HD de la version originale, puissante juste ce qu’il faut et riche d’ambiances réparties avec soin. Rien d’exceptionnel en soi mais les scènes de sport font leur petit effet avec foules en délire, effets multidirectionnels et fracas de battes de base-ball.
Interactivité
Carton rouge inévitable pour une foule de suppléments passionnants et intégralement sous-titrés en … anglais (ce qui est précisé sur la jaquette, d’ailleurs) ! Ou pas du tout comme dans le cas du commentaire audio soutenu et passionnant animé par Penny Marshall, Lori Petty, Traci Reiner et Megan Cavanagh. La grosse demi-heure de scènes coupées présentées par la réalisatrice, le making-of de près d’une heure et la featurette sur l’héritage laissé par le film et la fondation créée par Geena Davis sur la représentation des femmes à l’écran passeront également à la trappe pour ceux qui ne parlent la langue. En revanche, pas besoin de sous-titres pour apprécier le clip de la jolie chanson « This used to be my playground » par Madonna. L’éditeur aurait t-il cherché à faire des économies ou serait t-il persuadé que toutes et tous les cinéphiles sont forcément bilingues ? On vous laissera juger par vous-mêmes tout en ayant une petite idée de la réponse.
Liste des bonus
Commentaire audio de la réalisatrice Penny Marshall et des actrices Lori Petty, Tracy Reiner et Megan Cavanagh / 15 scènes coupées avec présentation par la réalisatrice / Making-of en neuf parties / Featurette / Bande-annonce