THE CELL
Etats-Unis – 2000
Support : Bluray
Genre : Fantastique
Réalisateur : Tarsem Singh
Acteurs : Jennifer Lopez, Vince Vaughn, Vincent D’Onofrio, Marianne Jean-Baptiste, Jake Weber…
Musique : Howard Shore
Durée : 107 minutes
Image : 2.39 16/9
Son : Français & Anglais DTS-HD Master Audio 5.1
Sous-titres : Français
Éditeur : Metropolitan Films & Video
Date de sortie : 19 août 2021
LE PITCH
Une psychothérapeute expérimentant un procédé révolutionnaire est engagée par le FBI pour pénétrer dans l’esprit d’un tueur en série et recueillir des indices qui pourrait aider à trouver sa dernière victime, encore vivante et enfermée dans une cellule …
Dreamscape
C’est une belle surprise à laquelle on ne s’attendait pas forcément. Vingt ans après sa sortie en DVD, le premier long-métrage de Tarsem Singh refait surface en haute-définition, sans raison promotionnelle particulière, dans une édition au packaging élégant mais au contenu un tantinet décevant. Rien de neuf sur le front des suppléments (présents sur l’antique galette standard, recyclée pour l’occasion) et une copie pas tout à fait irréprochable du montage cinéma, expurgé d’une poignée de minutes bien déviantes. Reste donc le film, succession grandiloquente de tableaux oniriques à l’ampleur inédite et qui n’ont pas pris une ride.
Le succès conjugué, au milieu des années 90, du Se7en de David Fincher et de la série X-Files de Chris Carter entraîne dans son sillage l’intérêt des studios pour les films mettant en scène des serial-killers de plus en plus flingués du bulbe et que pourchassent des représentants de la loi de plus en plus fatiguée. Du Collectionneur de Gary Fleder au Bone Collector de Philip Noyce et jusqu’au Resurrection de Russell Mulcahy avec notre Christophe Lambert national et même Les Rivières Pourpres de Mathieu Kassovitz, on retrouve donc les codes esthétiques et narratifs de la croisade meurtrière de John Doe et des crimes les plus poisseux croisant la route de Fox Mulder et Dana Scully. Soit une forte dose de lampes torches qui fendent la pénombre pour éclairer les mises en scènes sanglantes de tueurs de plus en plus imaginatifs, des monologues de policiers ou d’agents du FBI teintés de pessimisme, de nihilisme et de cynisme, et, pour couronner le tout, un twist percutant qui transforme le troisième acte en une course contre la montre. Soit, en réalité, un retour vers les grandes heures du giallo transalpin via le prisme industriel du blockbuster hollywoodien, plus poseur que vraiment intello et très au fait des modes du moment.
En apparence, le script de The Cell, signé Mark Protosevich, semble se couler dans ce moule. Mais il place l’arrestation de son psychopathe en fin de première bobine et y injecte un argument de science-fiction directement inspiré du Brainstorm de Douglas Trumbull et de Dreamscape de Joseph Ruben. Avec une victime qui manque à l’appel et dont les heures sont comptées, il est alors du devoir d’une pédopsychiatre (Jennifer Lopez) et d’un agent du FBI (Vince Vaughn) de plonger dans le subconscient du monstre en quête d’indices ou d’une confession. Horreur graphique, course contre la montre, désespoir … The Cell coche toutes les cases et navigue entre le rêve et la réalité à une époque où Matrix cartonne en salles. Carton plein.
L’architecte du cauchemar
Prodige du clip musical (le plus connu étant « Losing My Religion » pour REM) et de la publicité, Tarsem Singh accepte sans se faire prier la proposition de New Line Cinema de réaliser The Cell. Avec sa structure classique et binaire héritée de la franchise Freddy Krueger, ses protagonistes fades histoire de ne pas faire d’ombre à un méchant superstar et ses rebondissements on ne plus téléphonés, le scénario de Protosevich n’est que prétexte à une série de morceaux de bravoures visuels. Toutefois l’extravagance de Tarsem l’éloigne des ambiances pluvieuses, sombres et enfumées chères à de nombreux chefs opérateurs de l’époque tels que Darius Khondji ou Dariusz Wolski. Le cinéaste aime les couleurs vives, l’artisanat, le kitsch et ses influences de cinéma sont à chercher du côté d’Andreï Tarkovski, de Ken Russell, des frères Quays et d’Alejandro Jodorowski. Tout l’intérêt et toute la force de frappe du film réside donc dans son esthétique unique, inhabituelle, profondément malsaine dans son exubérance assumée. Tarsem pousse le film de serial-killers dans ses ultimes retranchements et ose des scènes à la frontière du ridicule comme la branlette suspendue (!) de Vincent D’Onofrio, nu et retenu au plafond par des chaînes accrochées à même la chair de son dos (!!), juste histoire de prendre son pied au-dessus du cadavre javelisé d’une demoiselle transformée en poupée de hentaï (!!!). De quoi filer une crise à cardiaque à Clive Barker en personne.
Parfaitement assisté dans les coulisses par son directeur photo Paul Laufer, la costumière Eiko Ishioka, la direction artistique de Tom Foden, le compositeur Howard Shore et l’implication totale de Jennifer Lopez et de Vincent D’Onofrio, Tarsem Singh signe avec The Cell une fresque horrifique gorgée de visions dantesques, une sorte d’opéra tribal et rococo où une déesse (dans tous les sens du terme) affronte la Bête dans une cathédrale mentale en mutation constante.
On pourra toujours regretter – et avec raison, vu la pauvreté du scénario – que le futur réalisateur des merveilleux The Fall et Immortals ne raconte ici pas grand-chose. Mais au moins le fait-il avec un panache et une audace rarement égalée à ce jour.
Image
Exception faite de deux plans traversés de rayures bleueus inexplicables et disgracieuses qui trahissent l’absence d’une vraie restauration du négatif original, ce blu-ray enterre le DVD de 2001 sans sommation. La définition est d’une précision chirurgicale et le grain argentique ressuscite l’expérience du visionnage en salles. Chose rare pour un film du début des années 2000, les images de synthèse ne souffrent aucunement du passage du temps. Dommage qu’il ne s’agisse que du montage censuré.
Son
Jouant sur un crescendo allant jusqu’à une cacophonie très étudiée, l’ouverture du film donne le la d’un mixage robuste et joliment découpé, à l’agressivité ponctuelle. Les ambiances ont souvent tendance à prendre le pas sur les dialogues, mixés un ton plus bas (en VO comme en VF) sans que l’on y perde quoi que ce soit sur la durée.
Interactivité
Reprenant le visuel du dvd américain, le packaging en forme de digipack offre au film de Tarsem un prestige tardif mais bienvenu. Rédigé par un anonyme (mais qui n’a pas à avoir honte de sa plume), un livret complète l’édition. Il faut donc se tourner vers le DVD pour profiter de suppléments désormais bien connus. Avec son débit mitraillette et une sincérité indiscutable, Tarsem fait de son commentaire audio un ajout inestimable, entre analyse, anecdotes, regrets et leçons d’intégrité artistique. Bonne pioche également pour les scènes coupées et – surtout – la musique isolée d’Howard Shore, sans doute l’un des scores les plus barrés du compositeur. Combinées à des comparatifs en multi-angle, les featurettes font le taf et laissent filtrer suffisamment d’informations dans un contexte très promo.
Liste des bonus
Le commentaire audio du réalisateur, La musique isolée, 8 scènes coupées avec commentaire audio optionnel du réalisateur, Documentaire en multi-angle sur les effets spéciaux, Documentaire sur le style du réalisateur.