HENRY : PORTRAIT D’UN SERIAL KILLER
Henry: Portrait of a Serial Killer – Etats-Unis – 1986
Support : Bluray
Genre : Drame, Horreur
Réalisateur : John McNaughton
Acteurs : Michael Rooker, Tom Towles, Tracy Arnold, David Katz, Anne Bartoletti…
Musique : Robert McNaughton, Ken Hale, Steven A. jones
Durée : 82 minutes
Image : 1.33 16/9
Son : Anglais DTS HD Master Audio 5.1 et 2.0, Français DTS HD Master Audio 1.0
Sous-titres : Français
Éditeur : Carlotta Films
Date de sortie : 22 septembre 2021
LE PITCH
Hanté par une enfance martyre, Henry Lee Lucas tue. La seule manière pour lui de se libérer de ses démons. Avec la complicité de Otis Toole, il écume les routes des Etats-Unis, choisissant ses victimes au hasard. Une équipée sauvage et sanglante restée unique dans les annales du crime.
Carnage
Banni des écrans quatre ans durant pour sa cruauté sans fard, Henry Portait d’un Serial Killer est effectivement un film malaisant. Le portrait froid, sans distance, sans sensationnalisme, d’un tueur en série « ordinaire », servi par un terrifiant Michael Rooker, futur Mary Poppins des Gardiens de la galaxie.
Tourné pour une poignée de dollars sur les cendres d’un documentaire avorté sur le catch, Henry Portrait of a Serial Killer devait sur le papier s’apparenter à un film d’horreur à petit budget, généreux en effets sanglants et en sexe. Mais John McNaughton (Mad Dog And Glory, Sexcrimes) et son coscénariste Richard Fire, qui s’étaient déjà exercés sur quelques reportages criminels, détournent largement la commande et en retire la moindre once de spectaculaire, de frissons attendus. Inquiétant, mais trompeur, le générique d’ouverture constitué de tableaux figés et élaborés de victimes scandés de sons synthétiques et de cris lointains, insinue une proximité macabre avec le classique d’exploitation des débuts de la décennies Maniac de William Lustig. Une image cradingue, froide, grisâtre et triste qui n’est pas sans rappeler non plus le Schizophrenia de Gerald Kargl… Mais si ces deux exemples s’efforçaient de pénétrer dans l’esprit distordu et malade d’un tueur en série, d’en approcher la névrose et les obsessions, le film de McNaughton les prends à contre-pieds en préservant constamment une distance avec son personnage. Avec son esthétique « authentique » le film joue constamment avec une proximité documentaire, voir snuff, et suit en pointillée, sans mise en place de suspens, sans tension dramatique, voir même sans récit, quelques jours, quelques semaines, dans la vie de son sujet. Mais une vie assez misérable qu’il traverse, presque désincarné, annihilant même le soupçon d’humanité qu’il pouvait avoir envers la sœur de son « ami », lors d’un épilogue à l’ironie violente.
Un ami qui vous veut du bien
Si ce dernier se livre lors d’une glaçante discussion autour des sévices vécus enfants et l’assassinat de sa mère, le déplacement de certains éléments (l’arme du crime change en cours de route), décrédibilise la sincérité du personnage en faisant une figure insaisissable, inaccessible. Basé sur l’authentique Henry Lee Lucas et ses « acolytes » Ottis Toole et Becky Powell, le film n’en préserve que quelques bribes, quelques détails, refusant là aussi au spectateur le loisir d’un biopic sensationnel. Les meurtres sont pour la plupart hors-champs ou secs et expéditifs, la moindre once de sexualité apparente est pervertie, inconfortable et malsaine, Henry refuse en définitive tout ce qui peut faire le charme pour certaines personnes d’un film de serial killer, renvoyant ces derniers à leur propre fascination pour la mort, le sang et l’animalité. Séquence emblématique du film, le long massacre d’une famille filmée en vidéo granuleuse par le duo Henry / Otis, se transforme en miroir acide d’un simple pivotement de la caméra montrant les deux tueurs se visionner en boucle leurs méfaits à grand renforts de ralentis sordides. Ce mal irrationnel, dénué de toute amorce d’analyse sociologique ou psychologique répond finalement à cette attirance toute aussi primaire pour les monstres à visages humains et leurs hauts faits. Des prédateurs qui par la mise en scène glauque de MacNaughton et la prestation imposante du débutant Michael Rooker, retrouvent ici leur triste et basse abjection.
Image
Première sortie Bluray pour Henry en France et passage direct, ô bonheur, à une remasteriation 4K. Un nouveau scan à la source avec un rendu de très haute volée qui évacue à la fois 90% des petits défauts connus jusque-là, mais aussi les multiples bidouillages d’anciens éditeurs ayant tenté de lui donner plus de couleurs qu’il n’en avait. L’image est donc froide et brute comme jamais, avec un grain 16mm on ne peut plus présent, mais admirablement géré, et des noirs impeccables. Une redécouverte puis loin du rendu neigeux d’autrefois, le film révèle une photographie beaucoup plus sophistiquée et creusée qu’on pouvait l’espérer et une définition des plus pointues. Superbe, enfin si on peut dire.
Son
On note aussi un très joli travail sur les bandes sonores. Les sources monos d’origines, doublage français (peu convaincant) et version originale, offrent des mix DTS Master Audio simple, mais clairs et propres. On est beaucoup plus étonné par le rendu du nouveau DTS HD Master Audio 5.1 qui sans dénaturer la nature frontale du film, lui apporte une dynamique très naturelle, assez fine et une limpidité imposante sur les surrounds.
Interactivité
Même si certains se sont étonnés (comme toujours) du design particulier choisit pour revêtir le steelbook, reste que ce dernier est franchement réussi, proposant une vision presque mystique au monstre qu’un Henry. Une illustration confectionnée par l’artiste Joe Coleman, présent dans son propre petit item, passionné par le thème des Serial Killer et fans inconditionnel du film. Le reste des suppléments se consacre bien entendu plus volontiers au film avec une impressionnante masse de bonus inédits ou récupérés sur d’anciennes éditions DVD. On ne s’étonnera pas de la disparition des vidéos produites par Stéphane Bourgoin et autrefois disponibles sur les DVDs collector français, mais la longue interview du réalisateur à heureusement subsisté. Un retour aux sources du projet, la collaboration avec les acteurs, la tonalité du film et sa réception sont présentées sans far par un John McNaughton toujours passionnant. On retrouve aussi ici l’imposant making of de presque une heure, regroupant toute l’équipe du film et cultivant une même franchise, voir même une certaine bonne humeur, mais lorsqu’ils se remémorent certaines scènes particulièrement éprouvantes à tourner. Reste encore une section réservée aux scènes coupées, commentées, où l’on découvre quelques moments plus poussifs (l’étreinte entre Henry et Otis) mais loin d’être inintéressantes, ainsi qu’une autre interview, inédite, du réalisateur. Complémentaire, cette dernière brasse plus largement la carrière du cinéaste, de ses débuts à Sex Crimes, en passant par Mad Dog and Glory, avec en point central son traitement particulier de l’humour dans ses films.
Liste des bonus
Entretien avec John McNaughton (31’), « Portrait » : le making of de Henry (53’), « Tour d’horizon » : entretien avec John McNaughton (28’), « C’est toi… ou eux » : entretien avec Joe Coleman, créateur du visuel de Henry (9’), Scènes coupées et chutes commentées par le John McNaughton et le documentariste David Gregory (21’), Bande-annonce.