JUDGE DREDD : CONTRÔLE
Royaume-Uni – 2012/2019
Genre : Science-Fiction
Scénariste : Rob Williams
Illustrateur : Chris Weston
Editeur : Delirium
Pages : 144 pages
Date de Sortie : 04 mars 2022
LE PITCH
Judge Dredd est confronté à Judge Pin, chef de la SJS (équivalent de la Police des Polices qui surveille les Juges de Mega-City One). Mais celle-ci mène une véritable – et meurtrière – croisade personnelle. Dans ce recueil, Dredd devra également protéger le tendre Klegg sensible, spécimen mutant improbable au grand cœur d’une espèce employée comme pourvoyeuse de mercenaires anthropophages intergalactiques, ou sera encore confronté à des singes terroristes, à Grudzilla, avatar du célèbre kaiju, star d’un blockbuster tourné à Mega-City One ou à un canon-satellite qui a tendance à perdre son sang-froid…
Who’s the law ?
En parallèle des indispensables volumes Les Affaires classés (soit la réédition intégrale des chapitres historiques), Delirium propose aussi régulièrement quelques albums plus modernes, montrant que le terrible Judge Dredd règne toujours aussi fièrement sur les pages de la revue british 2000AD.
Loin d’avoir été piochés aux hasards, les épisodes réunis ici sont tous à mettre au crédit du duo format par Rob Williams et Chris Weston, deux piliers actuels de la fameuse revue anglaise, qui s’efforcent justement de perpétuer l’intransigeante satire des grandes années du titre. Et cette filiation en passe en premier lieu par le travail visuel impeccable de Chris Weston (The Filth, The Invisibles, The Twelve). L’impressionnant soin apporté aux détails, qu’ils soient sur le visage renfrogné de Dredd, sur la tenue réglementaire des juges, les écailles d’un mutant ou plus largement sur les architectures massives de Mega City One, revient presque à l’hyper réalisme de Dave Gibbons, aux couvertures de Glenn Fabry, tout en gardant les formes légèrement caricaturalles et truculentes de Steve Dillon. Avec un soupçon du pointillisme de Moebius et un esprit plus Heavy Metal que jamais, ses planches retranscrivent à merveille la réalité brutale et l’atmosphère décadente de ce futur baroque et chaotique.
Entre de bonnes mains
Et il y a toujours à boire et à manger dans les pages de Judge Dredd puisque Rob Williams, auteur d’un excellent run sur Doctor Who : Le Onzième docteur, nous réserve quelques moments improbables comme le retour d’un kaiju-eiga qui tourne, forcément, à la catastrophe urbaine et artistique, ou de nouvelles tristes péripéties pour le trop sensible mutos crocodile Klegg, amoureux des fleurs et de la grande littérature, qui devient la cible d’une chasse à l’homme collective. Mais comme pour Classwar, l’auteur est bien plus à l’aise et marquant lorsqu’il glisse vers le pamphlet politique, imaginant un ascenseur emmenant les supers riches au-dessus de la plèbe avant de se faire attaquer par des chimpanzés en costumes de cosmonaute, ou l’esprit de Noël perturbé, aux goûts de Dredd, par une paix achetée avec l’argent public. Savoureux, mais le volume sait aussi se faire plus sérieux avec la trame plus étendue qui relient les six premiers chapitres de l’album et qui plonge plus avant dans la mythologie même des Judges. En l’occurrence la confrontation entre le meilleur homme de loi de la ville et une agent du Special Judicial Squad, sorte de police des polices, qui examine et élimine les agents qu’elle considère comme inaptes à accomplir leur missions. Préservant les casques de ses victimes dans les égouts d’une zone irradiée de la ville, cette serial killer sadique mais possédée par une fois aveugle en un corps légal infaillible, vient encore et toujours questionner, la nature même du système des Judges, dans une ambiance de thriller parano et un poil glauque, toujours aussi efficace. Du lourd, du solide, du bourrin et du couillu… du bon Judge Dredd.