HELLSING PERFECT EDITION T.1

ヘルシング – Japon – 1998
Genre : Action, Fantastique
Dessinateur : Kohta Hirano
Scénariste : Kohta Hirano
Nombre de pages : 400 pages
Éditeur : Delcourt – Tonkam
Date de sortie : 9 avril 2025
LE PITCH
En Angleterre, l’organisation secrète Hellsing agit pour protéger le pays des forces du mal, dont les vampires. Force de frappe de l’Église protestante, ce groupe dispose d’une arme secrète des plus inattendues : Alucard, vampire surpuissant et apparemment invulnérable. Bientôt, un ennemi terriblement dangereux resurgit du passé, relique du IIIe Reich. Il projette de propager la guerre et la désolation à travers le monde…
Bain de sang
Manga culte des années 2000 mais aux volumes épuisés depuis des lustres et revendus à prix d’or, Hellsing est enfin de retour en édition française. Et qui plus est en Perfect Edition avec couverture rigide délicieusement gothique et pagination doublée avec désormais cinq volumes au lieu de dix. Forcément, ça donne les crocs.
Ancien illustrateur de publications hentai mais terriblement malheureux d’être réduit à ce versant peu reluisant du manga, Kohta Hirano trouve enfin sa carte de sortie en 1996 grâce au cours one-shot Hellsing, The Legends of Vampire Hunter publié dans le magazine Young King Ours. Si l’essai est encore marqué par quelques touches marquées d’érotisme, il installe les premières bribes prometteuses de son univers à venir et un style qui se veut beaucoup plus violent, percutant et macabre. Devant le succès de la publication, l’éditeur commande alors une vraie série dans laquelle Hirano va pouvoir définitivement réorienter ses ambitions. Grand amoureux des jeux vidéo et du cinéma d’action (hongkongais en particulier), il axe ainsi tout l’ADN de Hellsing sur une énergie redoutable, souvent difficilement galvanisée il faut bien le dire, où le récit avance certainement plus par le biais de ses délirantes et sanglantes scènes de castagne que par les quelques dialogues ou phases d’exposition. De toute façon, le scénario en lui-même, presque secondaire, repose essentiellement sur l’opposition en trois camps : Hellsing, organisation défendant une Angleterre fortement protestante, Le Vatican défendant l’ordre catholique et enfin Millenium, dirigé par Le Major, ancien SS, s’efforçant de reconquérir le monde comme l’avait ordonnée leur cher Führer quelques cinquante ans plus tôt. Une guerre des religions, et des églises surtout. Une guerre idéologique face à une armée nazi grandissante. Et tout cela se règle à coups de vampires sadiques, de goules avides et commandées, de prêtres-combattants rendus immortels par des expériences douteuses, d’homme de mains et de militaires chair à cannon, le tout dans une Angleterre contemporaine mais uchroniques toujours habitée par ses vieilles traditions gothiques.
L’ordre du mal
Un monde qui tient plus du fantasme de fanboy (l’auteur a toujours affirmé ses penchant otaku et truffe son manga de clins d’œil) où il peut donc enfin laisser éclater son talent pour orchestrer les bastons les plus brutales et délirantes possibles, les combats à armes tranchantes, les gunfights à la John Woo et les massacres généreux. Fun, délirant et décoiffant, Hellsing se déguste comme une série B décomplexée, assez bordélique, mais toujours électrisante en particulier grâce aux styles à la fois violent, cruel et toujours dynamique de l’auteur dévissant du trait réalisme apparent vers des déformations des membres, la crispation de sourires sadiques et les effets gores pour une meilleure efficacité. Et pour de grands combats, il faut de grands combattants, et Hellsing sait parfaitement imposer des personnages ultra-stylés et charismatiques. L’antagoniste premier, le Père Alexander Anderson, s’avère aussi fondamentaliste et jusqu’au-boutiste que chevaleresque, les deux figures féminines, Integra Hellsing et la nouvellement vampirisée Seras Victoria, ne manquent pas de présence et évoluent de manière convaincante, mais c’est bien entendu le central Alucard qui bouffe tout sur son passage. Un maitre vampire surpuissant défendant le monde contre les hordes de jeunes vampires, hésitant entre protection de la stabilité et férocité, honneur et sadisme, et explorant de chapitre en chapitre des origines tragiques et complexes qui concrétisent l’anti-manichéisme de la série.
Un petit classique du manga qui débourre, habité par une belle âme funèbre et des accents « tarantinesques » affirmés. Certes l’histoire aurait pu être plus développée et l’univers cultiver une plus grande originalité, mais Kohta Hirano semble tellement prendre plaisir à tous ces débordements et ses délires caricaturaux, que ça en devient communicatif.