La guerre des plates-formes tactiles de Noël 2010 aura tourné court : depuis la sortie du Playstation Move et de Kinect, rien ou presque n'est parvenu à titiller la curiosité du hardcore gamer. Quant aux joueurs occasionnels, ils sont restés fidèles à leur plat à raclette préféré, la Wii de Nintendo sachant les contenter en accueillant chaque mois de nouvelles simulations de gymnastique totalement improbables. C'est dans ce paysage morose qu'Ubisoft lance Child of Eden, et c'est peu dire que l'approche ludique de l'objet a de quoi redonner espoir aux vrais amateurs de jeux vidéo.
L'introduction de Child of Eden pourrait en effrayer plus d'un : l'esthétique très publicitaire de la cinématique en question, avec un top model retouché sous photoshop se baladant dans des champs fleuris à perte de vue, annonce plus une escroquerie wii-esque qu'une (r)évolution ludique proprement dite. Un texte explicatif avance un argument de science-fiction à forte tendance hyppie, suscitant encore davantage la méfiance... du moins jusqu'à ce que l'on en arrive enfin au gameplay proprement dit. Stupéfaction : Child of Eden est un shoot'em up sur rail, proposant à son utilisateur de pilonner des vagues successives d'ennemis stylisés, alternant à-plats de couleurs, formes cubiques, contours arrondis, faces pleines et 3D filaire. Comment gérer les attaques sans manette aux poings ? Avec les bras pardi : visez avec le gauche, et vous aspergerez l'écran de tirs de laser, brandissez le droit, et vous ciblerez vos adversaires en vue d'une pluie de missiles, à envoyer via une brusque avancée du poignée. Simple comme bonjour... Et pour une fois incroyablement précis, donc jouissif.
Cassant la monotonie du rail-shooter en permettant au joueur de se déplacer sur un espace équivalent à quatre écrans (il suffit pour cela de se tourner légèrement sur la gauche ou la droite, ou de se pencher vers le haut ou le bas), Child of Eden vise les accros de l'arcade, ceux qui ont passé des heures devant R-Type, Last Resort, Mars Matrix ou Geometry Wars. Le challenge n'est d'ailleurs pas à la portée de tous, en dépit de l'ergonomie enfantine, puisqu'il faut perpétuellement adapter son attaque au type d'opposé auquel on est confronté (toute proportion gardée, le système de couleurs rappelle celui de Ikaruga), tout en anéantissant les tirs ennemis avant qu'ils arrivent à bon port. Visuellement délirant, et multipliant les interactions ahurissantes entre le joueur et les éléments du « décor », Child of Eden ne trahit donc en aucun cas la ligne éditoriale de Q? Entertainment, déjà responsable d'OVNIS vidéoludiques tels que Rez sur Dreamcast ou Lumines sur PSP et Xbox Live Arcade. La gestion de la bande sonore, convertissant perpétuellement les tirs et explosions en notes de musique, est d'ailleurs tout aussi excitante que dans le dernier titre cité, contribuant à faire de Child of Eden une expérience sensorielle à part, à peine handicapée par une Replay Value relativement limitée.