Inspiré d'une histoire vraie, L'Eveil réunit à l'écran Robin Williams dans le rôle d'un gentil docteur forcément un peu farfelu et timide, et Robert De Niro dans celui d'un homme atteint d'une encéphalite léthargique. Ce que les mauvaises langues appelleraient un véhicule à Oscars. Ils n'auraient pas tout à fait tort.
A l'origine de L'Eveil il y a le roman du même nom signé Oliver Sacks, romancier et neurologue, qui y retraçait sa propre expérience à l'hôpital Beth Abraham, médecin consultant chargé d'un groupe de survivants à une épidémie d'encéphalite léthargique qui frappa de nombreuses personnes dans les années 20 et les enferma graduellement dans une catatonie plus ou moins prononcée. Des personnes laissés à l'abandon, oubliés, mais qu'Oliver Sacks réussit à extirper de leur état grâce à un traitement expérimental et beaucoup de patience. L'été 1966 fut alors comme une parenthèse enchantée durant laquelle certain réussir même à retrouver, un temps, une vie normale avant que la maladie les rattrape. Un épisode médical spectaculaire qui ouvrit la voie vers de nouvelles recherches et d'autres progrès dans le traitement de la maladie qui semble effectivement un sujet en or pour la machine hollywoodienne. Surtout quand deux des plus grands stars du cinéma américain d'alors, Robin Williams et Robert De Niro, deviennent partie prenante. L'adaptation signée Steven Zailian (La Liste de Schindler, Gangs of New York, Millénium) se recentre alors sur leurs personnages. Celui du charmant et attachant docteur, un peu illuminé et définitivement passionné par ses patients, et Leonard Lowe, premier à expérimenter le nouveau traitement et celui dont la guérison sera aussi fulgurante que sa terrible rechute.
Même si les questions du rapport compliqués avec la direction de l'établissement, le dédain des collègues, les soucis de financement de la recherche et la réaction des familles sont brièvement abordés, L'Eveil au-delà du miracle médical qu'il évoque, est avant tout l'histoire d'une rencontre entre deux hommes, de leur amitié, qui bien entendu vont se sauver l'un l'autre, remettre la nature de leur vie en question et être liés pour toujours. Là où l'éveil aurait pu être le récit d'une bataille, d'un vrai combat contre la machine administrative, les limites du système médical américain et même des injustices de la vie et de l'épreuve de la maladie, il reste souvent bien installé dans la norme confortable et efficace du mélodrame américain, plutôt sage et porté vers l'émotion. Réalisatrice de petits divertissements comme Jump' Jack Flash, Une équipe hors du commun, Opération Shakespeare et surtout Big avec Tom Hanks, Penny Marshall n'apporte pas vraiment d'ambition de mise en scène au récit ou d'intensité, se contentant de plaquer sur chaque scène difficile une composition larmoyante de Randy Newman pour tirer quelques larmes supplémentaires. Pas toujours au point donc pour mettre sobrement en valeur les prestations remarquables de Williams et De Niro.
Ce dernier réussit d'ailleurs la prouesse de reproduire les déformations et crispations très spectaculaires du corps et du visage sans jamais tomber dans la caricature et le ridicule, insufflant constamment une grande amplitude d'affectation dans les regards. Le film tient effectivement presque uniquement sur leurs épaules, sur l'humanité qu'ils sont capables d'apporter à leurs personnages, eux et le restes des seconds rôles tous formidables.


