En pleines années de gloire Bruce Willis produit son divertissement le plus personnel, conçu et imaginé avec son pote de blues Robert Kraft, un mélange d'actionner et de comédie absurde qui sera aussi longtemps son plus retentissant échec. Rattrapé par sa propre folie, Hudson Hawk se hisse cependant d'année en année de plus en plus près du fameux statut d'œuvre culte.
S'étant connu durant les années de vaches maigre, le pianiste et compositeur Robert Kraft et le chanteur / acteur Bruce Willis, en garde une amitié soudée et de nombreux souvenirs de soirées blues et arrosées.... Et aussi un curieux personnage, que l'on imagine née autour d'un verre de whisky, Hudson Hawk, héros décontracté, grand amateur de cappuccinos, de jolies filles et de cambrioles. Celui-ci va peu à peu mûrir et devenir en ce début des années 90, l'un venant de devenir une star planétaire grâce aux deux premiers Die Hard, le second un producteur musical plus que prisé après le succès de La Petite sirène, un véritable projet cinématographique. Un fantasme de potes en somme, sur lequel va se greffer le producteur mythique Joel Silver, le réalisateur Michael Lehmann (dont on retient surtout le teen-movie très noir Fatal Games avec Winona Rider et Christian Slater), le scénariste Daniel Waters (Les Aventures de Ford Fairlaine et bientôt Batman Le défi et Demolition Man) et l'inénarrable Steven de Souza, auteur des Die Hard, de 48 heures et sa suite mais aussi de l'actionner ultime Commando. Comme pour ce dernier le but assumé est de pousser au maximum les codes et les clichés du divertissement US à la mode, et d'aboutir à un objet extrême, hors norme et absolument déconnant.
A ce titre Hudson Hawk semble compiler à peu près tout ce qui a pu traverser par la tête de Willis, Kraft et leurs potes, passant du récit élégant d'un roi de la cambriole sortie de prison et menacé par la mafia à un incroyable complot croisant d'anciens tueurs de la CIA (aux noms de codes hérités de barres chocolatées), les services secrets du Vatican et un couple de milliardaires voulant conquérir le monde, sur fond de Dolce Vita et de secret alchimique caché dans les artefacts d'un certain Léonard de Vinci. N'importe quoi certainement, mais parfaitement assumé par un rythme frénétique, et une tonalité générale entre la parodie, la comédie absurde et les gags façon Three Stooges. Un spectacle assez sidérant, s'échappant par tous les côtés où les catch phrases décontractées, les courses poursuites sur une civière, les baffes cartoons et les ellipses géographiques bataillent avec l'élégance surprenante de cambriolages effectués aux rythmes de standards américains entonné par Bruce Willis et son pote Danny Aiello en mode crooner. Une idée brillante, assez poétique et admirablement montée, superbe trouvaille d'un film qui bouillonne d'imagination, d'humour, d'interprétations génialement survoltées où l'on s'étonne peut-être de voir Andie MacDowell et James Coburn s'amuser autant, David Caruso jouer les assassins mime, beaucoup moins d'assister à un show jubilatoire servi par le couple de bad guy pervers et délirant Richard E. Grant et Sandra Bernard.
Prodigieusement loufoque et joyeusement inclassable, Hudson Hawk n'a rien perdu de sa bonne humeur communicative, grand plaisir et dégommage amoureux du divertissement US servi par certains de ses plus grands instigateurs. Pas étonnant que le film se soit fait déboulonner à sa sortie en 91. Pas étonnant non plus qu'aujourd'hui certains lui vouent un vrai culte et connaissent ses dialogues hilarants, en anglais comme en français, par cœur.




