Produits par Johnny Mak (Long Arm of the Law) dans le sillon du succès imposant du Syndicat du crime de John Woo, Rich and Famous et Tragic Hero lui empruntent sa nouvelle star, Chow Yun-Fat et lui adjoint un casting de rêve pour une mini-saga inégale, mais aux accents heroic bloodshed mémorables, dont un final réputé et dantesque.
Le cinéma HK n'a jamais eu peur d'afficher sans vergogne sa véritable nature commercialle. Et parmi les copies plus ou moins visibles et assumées du phénoménal A Better Tomorrow qui modernisa à lui tout seul les anciens codes de la chevalerie virile par des lunettes noirs, des révolvers et des impairs tournoyants, le projet conçu par le producteur Johnny Mack fut certainement l'un des plus célèbres et les plus symptomatiques d'un système poussé à l'extrême. Car en voulant multiplier les stars à l'affiche, dont le Chow Yun-Fat directement emprunté à l'univers de John Woo, mais aussi Andy Lau, Alex Man, Alan Tam et même Danny Lee dans un second rôle récurant, la production se lança dans une entreprise au planning des plus compliqué, obligeant plusieurs réalisateurs à oeuvrer de concert (pourtant seul Taylor Wong est crédité), parfois sur une même séquence, avec de respecter les délais de tout ce beau monde. Imaginé au départ comme un grand spectacle d'une durée ample, le film dû finalement être coupé en deux afin d'en distribuer une section à temps pour l'incontournable nouvel an chinois, mettant en avant une deuxième époque mieux tenue et plus tendue. La première partie elle, trop courte et plus lente, en sera quitte pour l'ajout d'un personnage et de poignées de scènes pour revenir à une durée conséquente. Ce fut donc bel et bien Tragic Hero qui sortit en premier sur les écrans et qui grâce à un box office généreux permit ensuite à la sortie de Rich and Famous, première partie ou prequelle selon le point de vue.
Une gestation compliquée qui aboutit forcément à deux objets déséquilibrés avec certainement un Rich and Famous bien bancal. Pourtant il faut désormais revoir les deux films dans l'ordre chronologique pour bien percevoir l'ambition dramatique du récit, moins proche finalement des fantasmes virtuoses de John Woo, que de la chroniques mafieuse de Francis Ford Coppola. Un vrai double film de mafia où l'arrivée de deux jeunes frères, Andy Lau plein de bonnes volontés et Alex Man avide et ambitieux, dans le clan dirigé par le charismatique Chow Yun-Fat, va transformer l'équilibre du milieu, et remplacer une fratrie de sang, par une fratrie d'honneur. Rich and Famous n'est alors que pour préparer aux évènements plus dramatiques encore qui se répercuteront dix ans plus tard dans Tragic Hero avec, pour le coup, une tension nettement plus palpable, une violence omniprésente et une noirceur implacable. Plus proche certainement de l'imagerie heroic bloodshed, le second film met tout de même une nouvelle fois les gunfight attendus en sourdine pour mieux délivrer un final apocalyptique, venant libérer dans un déluge de balles, d'explosions, de corps et de sang, toutes les haines emmagasinées jusque-là. Préfigurant de manière ironique celle du Syndicat du crime 2, cette conclusion cathartique montrant l'assaut vengeur, et au lance-grenade, d'Andy Lau et Chow Yun-Fat sur la villa armée d'un Alex Man transfiguré en dément bestial digne d'Al Pacino dans Scarface, reste l'un des gunfight les plus délirants et généreux des années 80. Peu importe si le destin de ces personnages se sera un peu perdu en route et que la réalisation n'est pas toujours à la hauteur des enjeux, l'ultime bobine, barbare et déchirante, tire aisément l'ensemble vers le haut.




