Chouchoute de l'Amérique rurale et légende vivante de la country Loretta Lynn et son ascension digne du grand rêve américain aura eu les honneurs d'un grand biopic inspiré de sa propre biographie. Et qui de mieux pour l'adapter à l'écran... qu'un anglais !
You Ain't Woman Enough (To Take My Man), Don't Come Home A-Drinkin (With Lovin' on Your Mind), One's on the Way, Fist City et Coal Miner's Daughter font partie des grands tubes de Loretta Lynn, authentique icone de la country music qui naturellement n'a pas forcément eu de grands échos en dehors des Etats-Unis. Pourtant à l'écoute, on y reconnait aisément quelques mélodies déjà entendues à la radio ou dans d'autres films américains. Une superbe voix, des mélodies accrocheuses, un accent du Kentucky à couper au couteau et des récits qui content ses racines, sa vie de couple (parfois houleuse), sa famille et sa culture. Le titre de sa biographie reprise pour celui du film, Coal Miner's Daughter, affirme ainsi ses origines modestes de fille d'ouvrier. C'est d'ailleurs toute la force du long métrage qui prend son temps pour approcher le moment où la vie de la dame va basculer, s'attardant longuement sur sa rencontre à 13 ans avec son futur mari, leurs premières années difficiles à élever quatre enfants (bientôt six) à joindre tout simplement les deux bouts. Sans misérabilisme mais sans naïveté non plus, Nashville Lady n'hésite pas à décrire l'amour protecteur mais étouffant de parents déjà bien en dessous du niveau de pauvreté, une lune de miel bien triste et le machisme bêta du brave Doolittle, surnommé Doo.
C'est lui d'ailleurs qui va percevoir le potentiel de sa femme, lui offrant une guitare pour son anniversaire avant d'investir tout son temps et son argent pour lui produire un disque et la faire connaitre. Des gens simples, sans être péjoratif, à la gloire fulgurante mais pas toujours aisée à gérer en particulier lorsque Lynn commence à s'affirmer et prendre son indépendance. Sans doute plus que l'écho de sa musique, presque laissé en arrière plan en dehors de quelques prestations troublantes où Sissy Spacek reprend le répertoire avec sa propre voix, c'est le réalisme social du film qui lui donne son identité. Pas de paillettes ou de grande envolées sur le stardom, le film insistant même sur l'épuisement dangereux de la chanteuse à cause du rythme des tournées, pour un biopic qui s'avère surtout un très joli portrait de femme, passionnée et courageuse, mère de famille et artiste accomplie, qui valut à l'excellente Sissy Spacek, toujours fluette et fragile, un Oscar de la meilleur actrice, précédé d'un Golden Globe et suivi d'un BAFTA. Sans doute alors qu'il fallait effectivement se tourner vers un réalisateur étranger pour servir au mieux le propos du film et éviter tout glissement élégiaque ou caricatural. Cinéaste anglais qui s'était fait connaitre pour Stardust et Agatha, Michael Apted (Gorky Park, Gorilles dans la brume, Blink...) signait là son premier film américain. Son regard extérieur, presque documentaire évite presque tous les clichés et surtout la bête apologie ou les accentuations dramatique gratuites. Un petit film tout en nuances.


