Spécialiste du cinéma Bis, et souvent trash, depuis plus de vingts ans, Uncut Movie passe enfin au format HD avec Il Gatto Dagli Occhi Di Giada. Un giallo totalement inédit en France pourtant signé par le méritant Antonio Bido, futur réalisateur du petit classique Terreur sur la lagune.
Le giallo est déjà en voie d'essoufflement lorsque quelques producteurs italiens bien informés décidèrent de transformer le scénario du polar appelé Commissione omicidio, en giallo aux accents très Argento. Pas forcément aux goûts du jeune réalisateur Antonio Bido, qui signe là son premier long métrage, mais à force de recherches et de découvertes des œuvres de ses prédécesseurs (Argento essentiellement mais aussi La Maison aux fenêtres qui rient de Pupi Avati) il semble tout de même y trouver son compte. Pas forcément dans les excès érotiques et ultra-sanglants de ses contemporains, mais plutôt dans la construction plus rigoureuse et policière des premiers films du genre et surtout dans la restitution d'une atmosphère scabreuse, décadente et inquiétante. Un travail qui passe déjà par la collaboration avec le groupe musical Trans Europa Express crée uniquement pour l'occasion et plus particulièrement pour singer les prouesses électro-rock de Goblin, et qui là encore loin du simple décalque réussit à trouver une brillante note plus lugubre et opératique. Renommé pour faire plus giallesque Il Gatto Dagli Occhi Di Giada (littéralement Le Chat aux yeux de jade), le film se donne alors des airs de retour aux sources, de thriller plutôt élégant où la force des meurtres eux-même repose la plupart du temps sur leur mise en place, sur la montée en tension, plus que sur des exécutions laissées hors-champs.
Le meurtre le plus mémorable ne sera d'ailleurs pas celui de la pauvre ménagère enfournée à point, mais plutôt celui d'un homme âgé, étranglé dans son bain au son du glorieux Dies Irae de Verdi. Antonio Bido préserve ses ambitions de film d'enquête et nourri constamment les limites du Giallo par une véritable trame de fond et un mystère opaque dont les révélations ne seront, pour une fois, pas tirées par les cheveux. Pas de trauma d'enfance pseudo-freudien, pas de nymphomane ou d'impuissant à voix d'enfant au programme, mais un mal dont les racines plongent directement dans les ténèbres de l'Histoire du pays et qui dote l'oeuvre d'une logique et d'une émotion particulièrement rare dans le giallo. Une transition admirablement amenée par un passage de la Rome moderne aux décors vénitiens (déjà) et anciens de Padoue où la lumière devient plus glauque, la population vieillissante et figée dans le temps et les demeures explorées totalement décharnées et hantées. Peu importe que le couple de héros, Corrado Pani (Rocco et ses frères, Le Parfum du Diable) et Paola Tedsco (L'Accusé) manquent sérieusement de charisme et de sérieux dans leur enquête, c'est la sensation de mort constante, l'omniprésence d'un drame oublié, l'identité du tueur qui donne tout son corps à Il Gatto Dagli Occhi Di Giada.
D'une commande bousculée par les décisions marketing, Antonio Bido accouche de l'un des meilleurs Giallo de cette fin de période, et confirmera sa maîtrise du genre dès l'année suivante avec le tout aussi réussi Salamente Nero. Tellement dommage que sa vraie carrière en soit restée là.




