On le croyait perdu pour toujours, M. Night Shyamalan revient pourtant avec un film d'horreur (trop) dans l'air du temps mais qui lui permet de renouer avec le style qui avait fait sa gloire. Si on est encore loin de ses plus beaux films (Incassable, Le Village), le cinéaste reprend ici du poil de la bête.
Ancien nouveau maître du cinéma fantastique, délivrant des contes modernes avec une incroyable maturité du Sixième sens à Signes en passant par Le Village ou Incassable (son chef d'œuvre ?), M. Night Shyamalan connait depuis dix ans de bien plus grandes difficultés à s'imposer. Autoproclamé successeurs de Steven Spielberg et Alfred Hitchcock (il faut oser tout de même), si le réjouissant La Jeune fille de l'eau ou le sympathique Le Dernier maitre de l'air lui donnait un visage plus enchanteur et naïf qu'autrefois, les terriblements stupides Phénomènes et After Earth aurait eu tôt fait de l'enterrer s'il n'avait pas croisé quelques temps après le désormais incontournable Jason Blum. Le propriétaire de Blumhouse (Paranormal Activity), quasiment responsable de 80% des films d'horreurs américains distribués sur grand écran. Et comme on ne change pas une équipe qui gagne, ces derniers accouchent d'un énième film de flippe en found footage. Un habillage dont on a clairement soupé aujourd'hui, noyé sous la masse de péloches foireuses et opportunistes où le procédé même du docu-menteur n'est plus qu'un argument fallacieux. Inutile d'imaginer que The Visit n'a pas été pensé pour entrer immédiatement dans le moule, pour répondre aux attentes de spectateurs ados rodés à l'exercice. D'ailleurs, le film de Shyamalan ne s'en cache (presque) pas, reprenant sobrement la structure prévisible, la lente montée en puissance jusqu'aux ultimes révélations et bien entendu les personnages centraux teenage, ici tout de même plus près de la préadolescence.
Encore une œuvre de commande ? Pas uniquement, puisque bel et bien responsable du scénario, le cinéaste y retrouve aussi sa propre personnalité, son regard décalé sur la famille américaine, tout autant que son démarquage du conte. Il y a ici et là quelques références amusées (la scène du four), mais c'est surtout dans sa structure finalement que The Visit ressemble à une modernisation d'Hansel et Gretel où la sorcière serait double, un Papy et une Mamy rencontrés pour la première fois et dont l'étrangeté transformerait la petite semaine de vacances en cauchemar initiatique. Un excellent jeu autour de la confrontation de la jeunesse à la simple déchéance de l'âge, au retour des notions de dégénérescence physique et mentale, à la proximité de la mort, qui ne peut finalement devenir supportable que lorsqu'elle est mise en scène. Usant toujours d'une certaine forme de mimétisme, Shyamalan fait de ses deux héros de vrais cinéastes en herbe (et pas deux crétins qui filment tous ce qui bouge) tentant de structurer leurs plans, de prévoir le montage de leur futur documentaire et surtout mettant eux même en scène la plupart des évènements. C'est là que The Visit peut faire frissonner, lorsque sous le contrôle mesuré, la structure se fissure, s'étiole et que l'atroce vérité prend corps. Peu importe que comme souvent le twist soit largement prévisible (ce qui est finalement le cas sur presque tous ses films), l'entreprise est plutôt efficace, les acteurs offrent d'excellentes performances et surtout la mise en scène installe une frontière plus que trouble entre le réel et l'irréel. Pas si mal, The Visit pâtit tout de même de la lassitude certaine que l'on peut ressentir à chaque nouvelles prouesses en Found Footage, même lorsqu'on atteint le haut du panier.





