Licence ayant fait les grandes heures de plusieurs générations de gamins avides aux travers de jouets on ne peut plus célèbres, mais aussi de comics et de séries d'animation, les « Real American Hero » reviennent sur grand écran dans un opus qui a définitivement oublié son âme d'enfant.
Le monde actuel est ainsi fait, que dans les coulisses du cinéma américain, une société de jouets ayant largement fait son beurre dans les années 80/90, commande désormais quelques blockbusters décérébrés entièrement dédiés à sa cause. Et attention, chez Hasbro c'est du lourd : la saga Transformers (beaucoup de remontées acides tout de même), Battleship et le premier G.I Joe, intitulé pour prévoir les futures suites, Le Réveil du cobra. A la rigueur, le très décomplexé essai de Stephen Sommers (La Momie, Van Helsing) fonctionnait partiellement dans sa démesure science-fictionnelle assumée et sa cohorte de séquences spectaculaires improbables en images de synthèse. Un film de gosse, chaotique, primaire, mais ne se prenant jamais au sérieux et réussissant même à donner à voir quelques personnages (figurines ?) habilement mis en valeur. Difficile malheureusement de retrouver une trace de cet esprit, voir même de cette décontraction dans le nouveau Conspiration, pourtant suite directe mais entièrement conçu par une équipe différente (exit les acteurs, le réal, les scénaristes...) donnant l'occasion de changer définitivement de chambre à jouer. Plus question d'avoir l'impression ici d'essayer la nouvelle collection de figurines avec leurs gadgets, Paramount fait machine arrière et fait atrocement de l'œil à la génération Call of Duty et autres jeux vidéo guerriers en mettant plein la gueule, mais idéologiquement douteux.
Nos chers GI Joe sont donc désormais isolés, abandonnés de tous, obligés de retrouver l'utilité des poings dans la tronche, de la castagne bas du front et des formations paramilitaires. Dans un contexte apocalyptique (menace nucléaire globale traité avec une bêtise crasse), le film se prend qui plus est constamment au sérieux, tentant de faire vibrer la fibre patriotique à grand coup de fierté de bidasses et d'amitiés viriles absolument ridicules. Scénaristes de l'amusant Bienvenue à Zombieland, Rhett Reese et Paul Wernick glissent tout de même quelques blagounettes, au détour de quelques dialogues bien longuets, mais rien n'y fait, G.I. Joe Conspiration est un film d'action qui sent horriblement (volontairement ou involontairement) la publicité géante pour l'armée US, se rapprochant constamment d'un certain Top Gun et ses sourires émailles diamants. Triste. Tout autant d'ailleurs que les effroyables participations de deux icones du cinéma d'action en parfaite roue libre. D'un coté Dwayne Johnson star attachante mais dont finalement la trajectoire artistique se sera rapidement effondrée dans les bisseries bodybuildées, et Bruce Willis faisant office de vétéran en vacances, totalement à la masse, appuyant sa définitive descente aux enfers de la beauferie (entre ses taglines nazes dans Expendables 2 et le cauchemardesque Die Hard 5), les têtes d'affiches de G.I. Joe Conspiration semblent à l'étroit dans leurs pauses de sauveurs de les Etats-Unis d'Amérique.
Au milieu de ce fatra déjà has-been, des castagnes armes aux poings singeant mollement John Woo, ou la charge héroïque finale quasiment illisible, le réalisateur spécialisé dans les dance-flick Jon M. Chu (Sexy Dance 2, Justin Bieber Never Say Never...) réussit tout de même à sauver une séquence. Une. Construit autour de trois trames scénaristiques extrêmement (trop ?) distinctes, le métrage change étrangement de ton dès lors qu'il s'intéresse aux ninjas Snakes Eyes (Ray Park, ex-Darth Maul), Storm Shadow (charismatique Byung-hun Lee) et Jinx (charmante Elodie Yung) virevoltant du coté des Bioman d'antan, voir des caricaturaux American Ninja (la prestation hasardeuse de RZA), mais avec une fraicheur pétillante. De cette vision totalement immature du cinéma d'art martiaux asiatique, naissent ainsi une dizaine de minutes enfin excitantes : au sommet de l'Himalaya, une armée de ninjas en rouge se jettent dans le vide sur les traces du couple de héros en pleine tyrolienne géante. Tous sortent leurs lames et s'organisent comme un balai aérien aussi factice (vive les fonts verts et la synthèse), mais finalement fluide, élégant, amusant et respectant temporairement l'esprit des vrais G.I. Joe : des jouets ultra articulés à qui les petits garçons font vivre des aventures ridicules mais réjouissantes.






