Apparu en France dans la première vague d'animés japonais fournis par l'éditeur Manga Vidéo (disparu depuis semble-t-il), Roujin Z revient chez un nouvel éditeur, en HD s'il vous plaît, pour démontrer à nouveau que la présence de Kastuhiro Otomo au générique d'un projet n'a rien d'anodin.
L'auteur d'Akira est bel et bien à l'origine de ce long-métrage d'animation (en tant que scénariste et producteur), mais il va en confier les rênes à certains de ses petits protégés. Coutumier du travail en équipe (Neo Tokyo, Robot Carnival, Metropolis... toutes des œuvres collectives), Otomo offre ainsi au regretté Satoshi Kon (Perfect Blue, Paranoïa Agent) son premier travail en tant qu'animateur et designer des décors, et surtout la réalisation au méritant, mais ici pas toujours assez énergique Hiroyuki Kitakubo, qui s'illustrera de nouveau par la suite avec l'excellent Blood The Last Vampire. Un joli casting (on passe sur l'équipe technique issue d'Akira et que l'on retrouvera par la suite sur Memories), qui permet à ce projet prévu pour le marché de la vidéo de dépasser largement les attentes en termes techniques. Si l'animation n'a certes pas la fluidité et le naturel du chef-d'œuvre d'Otomo, elle en affiche tout de même la même générosité, autant pour accompagner les gestuelles des personnages, que pour illustrer des délires mêlant éléments mécaniques et réorganisations organiques. Car loin d'être la petite œuvre mineure a laquelle on fait parfois allusion, Roujin Z est bel et bien un film qui porte aux nues les réflexions obsédantes et futuristes d'Otomo.
Entre le ministère d'état (ici la santé) détourné par une entreprise pseudo-militaire qui profite d'un projet national pour expérimenter sa dernière trouvaille, un groupe de jeunes qui se rebelle contre l'ordre établi et surtout un lit ultra-informatisé qui se retourne contre ses créateurs et finit par absorber toutes les machines qu'il croise, on pourrait presque dire que seule la victime centrale diffère de celle d'Akira : un pauvre petit papy totalement grabataire. Et toute la différence est là, justement, puisque l'animé fait état du lien qu'entretiennent les sociétés vieillissantes avec leur 3ème âge, abandonné dans des maisons de retraite ou des hôpitaux à l'écart de tout. Une critique claire et nette de la séparation entre les générations, de la surmédicalisation (pour ne pas dire sur-mécanisation), et des soins douteux apportés à cette catégorie d'âge. Un sujet sensible, forcément toujours d'actualité aujourd'hui, mais qui est abordé ici avec un humour et une fraîcheur étonnants. Plutôt que de s'engoncer dans des dialogues complexes ou des leçons de morale trop appuyées, Roujin Z tourne à la farce espiègle, jouant autant sur l'état de légume du pauvre papy que sur les rocambolesques évolutions de sa machine d'assistance... qui se prend désormais pour sa femme décédée. Leur petite escapade sur la plage de leurs souvenirs tourne forcément à la catastrophe, voire à l'apocalypse annoncée, comme si Otomo jouait lui-même avec ses propres tics d'écriture. Courses poursuites débridées, personnages loufoques, succession d'improbabilités, le film cultive une science-fiction à part, de celle qui réussit à poser les bonnes questions, mais sans jamais se prendre au sérieux.




