Toujours pas remise d'une édition 2014 savoureuse (voir notre compte rendu ici), la team Paris Ciné Fantastique / Mad Movies persiste et signe pour une nouvelle édition 2015 du Paris International Fantastic Film Festival. Du 17 au 22 novembre, les pelloches les plus WTF de la planète fantastique ont donc envahi, une semaine durant, la mythique salle du Grand Rex ! Des avant-premières jonglant avec les cervelles, des métrages dérangeants, la très attendue Nuit Japanimation ou notre chouchou (copinage oblige puisque Frenetic Arts le produit), le second documentaire de l'équipe Penso-Poncet : Le Complexe de Frankenstein... Impossible de faire la fine bouche, tout cela semble en effet sacrément prometteur. Au-delà donc d'une sélection officielle éclectique et alléchante, cette édition 2015 se révéla, malgré quelques déceptions, largement à la hauteur des attentes. On vous explique tout juste en dessous.
On entame donc les réjouissances le 17 novembre, à 20h, avec la projection du bien nommé Scream Girls ! Ne pouvant envisager de manquer la soirée d'ouverture, nous nous rendîmes pour cette première soirée à la rencontre de l'OFNI de Todd Strauss-Schulson. Croisement barge entre Last Action Hero et le slasher, surfant sur la thématique à la mode du «méta-cinéma», le film donne, il est vrai, franchement la bave aux lèvres. Lisez plutôt: Une jeune femme faisant le deuil de sa mère, une célèbre actrice des années 80, se retrouve projetée dans l'un de ses films. Les deux femmes désormais réunies vont tenter de combattre le meurtrier qui s'y trouve. Voila un pitch bien barré pour une première française salutaire... Profitant du succès de la série de Ryan Murphy (American Horror Story): la bien nommée Scream Queens, Scream Girls (en vo The Final Girls, plus à propos puisqu'il indique les survivantes des slashers et non les pétasses à gros lolos) enjoua une salle comblée et hilare. Bourré de clins d'œil, de gimmicks propres au genre et de rebondissements, le film est un vrai régal. On notera donc la parfaite partition de Taissa Farmiga et surtout d'Adam Devine, hilarant en gros bourrin bodybuildé et obsédé. Au-delà toutefois de trouvailles enivrantes (les crédits de fin, le bêtisier, enjamber le titre ou les pièges), on regrettera pour faire la fine bouche un boogeyman pour le coup vraiment naze, une répétition de flash-back plombant l'ambiance et un final fantastique confus. Ceci étant, le film transpire l'humilité et l'amour du genre et devrait ravir nombre de soirées potes-pizzas-bières-série B. Bravo au PIFFF pour cette entame bien fun.
Le lendemain sera l'occasion de découvrir en compétition et première française: Curtain dans lequel une jeune femme emménage dans un appartement dont la salle de bain recèle un monstrueux secret : un rideau de douche qui ouvre sur une dimension parallèle! Financé via la participation d'Internautes et filmé en mode guérilla dans les rues de New York, Curtain est le premier long-métrage de Jaron Henrie-McCrea. Plaisir non dissimulé ensuite que de découvrir en salles le Darkman de Sam Raimi, film torturé annonciateur des films de «super-héros» sombres et vertigineux.
On enchaîne avec la première française en compétition de Blind Sun de Joyce A. Nashawati. Récompensée à Gérardmer en 2010 par le Prix du Meilleur Court-métrage pour son film La Morsure, la réalisatrice signe un film aride mais bancal. Alors que la canicule frappe la Grèce, l'eau se fait rare (décidément, pas de bol). La tension du pays est totale et lorsqu'un immigré taciturne doit veiller sur la luxueuse villa d'une famille française qui l'a embauché (une vraie famille de cons grotesques), le gardiennage tourne au cauchemar. Script convenu rappelant des bouzes comme American Nightmare mais aussi des bijoux comme The Strangers, Blind Sun joue sur une ambiance post-apo (le manque d'eau) qui n'a de valeur que son nom. Attention, malgré toute l'affection des cinéphiles pour le genre, on est au bord de l'overdose... Et c'est bien le cas ici malheureusement, malgré tout le charme de sa réalisatrice. Plastiquement efficace et suffisamment inventif, le film se perd toutefois par un manque flagrant d'écriture (quid de ces découvertes archéologiques, de l'ombre, du policier, du chat, du chien, des papiers...). Nous pourrions continuer comme cela ad vitam aeternam. Jouant sur une ambiance feutrée et mystérieuse, le film manque de personnalité, de rebondissements et de propos. On peine à rester éveillé face à une intrigue inexistente tout simplement car le film ne souffre aucun enjeu. Tous les personnages sont des têtes à claques exagérées et l'on attend qu'une chose, leurs galères. Rappelant le plus intéressant Mirages de Talal Selhami, le métrage achève un spectateur (dans le mauvais sens du terme) le cul entre trois chaises, ne sachant jamais où se diriger entre le huis-clos oppressant, la schizophrénie naissante ou le thriller tendu. Dommage car visiblement la jeune fille a du talent. Nous ne parlerons enfin pas du métrage suivant: le documentaire Le Complexe de Frankenstein. Renseignez vous partout ailleurs, on est persuadé que l'envie naîtra.
Le jeudi fut malheureusement (planning oblige), une journée off. Dommage car les films de Sono Sion (Virgin Psychics) et de Lucile Hadzihalilovic (Évolution), paraissaient parmi les plus jouissifs. On leur souhaite de parcourir les festivals avec le même succès.
On retiendra du vendredi suivant la possibilité de voir en salles le mythique, parfait, terrifiant et inégalé The Thing de Big John. Un chef d'œuvre toujours aussi puissant trente ans plus tard. S'en suivi le très attendu The Survivalist de Stephen Fingleton. Dans un monde post-apocalyptique (ah-tiens), un homme s'est établi dans une cabane en pleine forêt. Mais l'arrivée de deux femmes en quête de nourriture va bousculer sa discipline de vie. En attendant avec avidité The Revenant d'Inarritu l'année prochaine, le film fit plus ou moins l'affaire en matière de hors-d'œuvre. Citant avec parcimonie le Traqué de Friedkin ou Delivrance, le film fut l'un des événements de la semaine. Pour autant et malgré une partition convaincante des différents acteurs et un environnement mis en valeur, impossible d'être totalement convaincu par le film. Vendu comme un survival, le film est en réalité un songe en huis clos, une méditation plus proche de Vinyan que de Rambo. Malgré quelques instants de tension en fin de métrage, le film pêche par l'absence d'éléments déclencheurs, d'émotion ou de climax. Impossible donc de nier que le quotidien d'un homme isolé qui cultive son potager n'a en soi, rien de transcendant. Un témoignage réaliste et jusqu'au-boutiste certes, on lui préférera toutefois le roman de Cormac Mc Carthy, La Route ou le bijou éponyme de John Hillcoat.
Le samedi sera lui le jour le plus généreux avec des tonnes de courts-métrages français et internationaux en compétition (et interdits aux moins de 16 ans), l'occasion d'une rencontre avec le créateur de la géniale BD Mutafukaz, RUN et le programmateur du PIFFF / Rédacteur en chef du magazine Mad Movies, Fausto Fasulo. Les deux interviews seront bientôt lisibles sur votre site.
Inconcevable enfin de ne pas citer la nuit Japanimation avec Le Garçon et la bête d'Hosoda, l'œuvre collective Short Peace (dont un segment du maître Otomo), le complètement barré Mindgame ou le sombre et sans concession Jin Roh. Animation toujours et enfin pour le dernier jour et la diffusion du premier volet de la trilogie d'Ankama: Dofus: Livre 1 - Julith. Une salle bourrée de têtes blondes au PIFFF, cela n'a pas de prix! Des raretés à l'image de la présence de Philip Ridley (3 films en vingt ans) pour la présentation de son premier long L'Enfant miroir ou le frontal et sans concessions Green Room de Jeremy Saulnier (Blue Ruin).
Vous l'aurez compris, Le PIFFF c'est fini et comme chaque année, on a qu'une hâte, se donner rendez-vous en 2016. Tout le monde a eu conscience, alors, de partager un moment spécial, entre émotion, célébration du septième art, cliquetis des chopines et le bonheur d'être en vie. Merci aux spectateurs et vive Paris.
Ultimate merci à Blanche Aurore Duault, Nathalie Lund, Fausto Fasulo, Cyril Despontin, Run et surtout tous les bénévoles qui nous ont permis de passer une semaine enchanteresse. A l'année prochaine!
PS: Pour faire la nique à tous ces destructeurs de bonheur, Frenetic Arts s'associe à la douleur des familles ayant souffert, à quelques degrés que ce soient, des attentats du 13 novembre et bien entendu, aux victimes. Ce compte rendu qui célèbre la vie et la culture leur est humblement dédié. Notre salut lui, aucunement emprunté.











