MICKEY 7

Etats-Unis – 2022
Genre : Science-Fiction
Auteur : Edward Ashton
Nombre de pages : 360 pages
Éditeur : Bragelonne
Date de sortie : 26 février 2025
LE PITCH
Mickey7 est un Consommable : un employé jetable d’une expédition humaine envoyée sur Niflheim, un monde de glace, pour le coloniser. Dès qu’une mission paraît trop dangereuse – voire suicidaire –, l’équipage se tourne vers lui. À la mort d’une version, un nouveau corps est régénéré, sa mémoire pratiquement intacte. Et puis, au cours d’une mission de routine, Mickey7 est porté disparu et présumé mort. Le temps qu’il regagne la base de la colonie, étonnamment aidé par une forme de vie locale, il est trop tard : un nouveau clone, Mickey8, occupe déjà son poste.
Who wants to live forever ?
A l’origine du nouveau long métrage signé Bong Joon Ho Mickey 17, le plus gros succès littéraire d’Edward Ashton ressort en édition poche chez Bragelonne avec en prime une petite conversation entre l’auteur et le réalisateur. La question pour les nouveaux lecteurs étant bien entendu d’y découvrir ce qui a pu inspirer le second dans l’œuvre du premier…
Dans un futur très lointain, l’humanité s’est considérablement éloignée de la Terre-mère, plus ou moins dévastée par les stupidités habituelles, et s’efforce de continuer à trouver de nouvelles planètes à coloniser. Des missions souvent sans retour, souvent sans beaucoup d’espoir, mais qui peuvent aboutir au départ d’une nouvelle civilisation et d’un nouveau bond en avant pour l’humanité. Et chacune de ces arches contiennent son lot de scientifiques éclairés, de manutentionnaires, de spécialistes de l’agro-alimentaire, de militaires… et un Consommable. Des hommes et des femmes qui grâce à une nouvelle technologie de captation mémorielle et de clonage express (mais couteuse en ressource) peuvent se permettre de mourir dans leur fonction pour revenir à la vie quelques heures plus tard. Mais un tel double est-il vraiment soi ? Mickey, qui en est à sa septième incarnation, ne s’était pas vraiment posé la question, jusqu’à ce qu’à cause d’une erreur d’un collègue pilote un peu lâche, il soit laissé pour mort à la surface de Niflheim, ne rentrant que difficilement à la base pour rencontrer son incarnation suivante : Mickey 8. Enseignant en physique quantique et chercheur tout ce qu’il y a de plus sérieux, Edward Ashton ne traite cependant pas son sujet avec un ton sentencieux et grave.
Multiplicity
Cette proximité entre deux Mickey, chose considéré comme une abomination par quelques « naturalistes », est surtout dans les grandes lignes l’occasion de jouer sur les habituels petit désidérata du vaudeville, diverses dissimulations et la difficile annonce à la petite amie (qui va TRÈS bien s’y faire), quelque peu accentué il est vrai par les limites du rationnement alimentaire et la menace constance de se faire exécuter. Mais au milieu de la farce et des monologues intérieurs décalés de Mickey 7, un peu looser, un peu historien et un peu philosophe, décrivant avec forts détails ses différentes mises à morts avec de charmants détails, le récit peut aussi se poser avec décontraction de très bonnes questions. Comme celle de la nature de l’identité, de l’importance de la transmission et de la mémoire, faisant échos à celles que la SF avait déjà imaginés autours de la téléportation par exemple. Mais Mickey 7 se montre surtout des plus pertinents lorsqu’il remet en perspective cette opération de terraformation avec les épisodes passés de colonisations catastrophiques, où la confrontation avec des monde différents et des êtres vivants étrangers, n’est pas toujours des plus réfléchies et pacifiques. Ici l’opposant prend l’apparence de gigantesques vers des neiges, monstres présentés comme insaisissables et voraces, mais que le récit va amener peu à peu à découvrir sous un nouveau versant et remettre en cause le bien fondé de certaine décision… Avec Mickey 7 se plaçant bien entendu en sauveur chanceux de la situation.
Véritable comédie futuriste, Mickey 7 n’est jamais totalement éloigné de la parodie et malgré un univers plutôt bien campé et fortement détaillé, on a un peu la sensation que légèreté d’écriture entame un peu le fort potentiel du concept initial. Comme ce final, en forme d’anti-climax, amusant dans l’idée mais qui laisse le lecteur un peu sur sa faim. Un bon petit bouquin de SF qui se lit très rapidement et avec un certain plaisir mais qui aurait certainement pu se montrer un poil plus noir et cruel finalement.