LA NUIT DES MORTS VIVANTS
The Night of the Living Dead – Etats-Unis – 1974
Genre : Horreur
Auteur : John A. Russo
Nombre de pages : 260 pages
Éditeur : Editions Faute de frappe
Date de sortie : 18 janvier 2024
LE PITCH
Tom et Judy ne sentirent pas les créatures arracher leurs membres un à un. Ils n’entendirent pas leurs os craquer, leurs cartilages se rompre, leurs articulations se déchirer, leur chair croustiller sous les dents de leurs assaillants. Ils ne hurlèrent pas de terreur lorsque leur cœur, leurs poumons, leurs reins, leurs intestins servirent de festin à une meute de zombies dénués de toute conscience.
A Night to Remember
Pour entamer sa toute nouvelle collection Compact annonçant déjà quelques larges inspirations et adaptations du coté du cinéma de genre (Wishmaster, Slugs, Amityville…), l’éditeur Faute de Frappe a choisi un classique parmi les classiques : La Nuit des Morts vivants. Une novélisation servie directement par le co-scénariste du chef d’œuvre de George A. Romero : John A. Russo.
On ne présente plus le film séminal qui a inventé à lui tout seul le cinéma de zombie, et accessoirement participé à la révolution du cinéma d’horreur en cette fin des 60’s. Un classique, moderne, intense, politique et effrayant, imaginé par un petit groupe de passionnés qui ont sué sang et eau pour donner corps à leurs rêves. Mais ce qui aurait dû être une success story s’est rapidement mue en déconfiture alors que les recettes du film disparaissaient avec le distributeur et que les droits du métrage se dispersaient aux quatre vents. Six ans plus tard, la belle entente entre Romero et John A. Russo, à l’origine du pitch et qui avait écrit le film avec lui, n’est plus vraiment au beau fixe. D’où sans doute cette volonté pour se dernier de se réapproprier plus ou moins le titre tout en espérant récolter enfin quelques recettes dans l’opération (Romero lui optera pour un remake en 90), avec une novélisation tout ce qu’il y a de plus officielle. Déjà publié en France comme premier titre de la mythique collection Gore de Fleuve Noire, puis en 2008 chez Milady, le roman revient ici pour une édition limitée à 1000 exemplaires, avec une nouvelle traduction intégrale et même une préface inédite de l’auteur. Occasion pour les amateurs de sensations fortes, et les cinéphiles cela va de soi, de revivre le récit par le biais de la prose uniquement.
Et ça marche toujours…
Pas de grands changements à noter dans l’histoire proprement dites, Russo reste effectivement très proche du scénario initial et des images qui en ont découlé, reproduisant même avec un certain talent les variations de rythme bien connues du film, avec ce cœur en huis-clos plus lent et oppressant, encadré par des évènements plus nerveux et dramatiques. Il profite cependant du passage littéraire pour ouvrir les évènements légèrement plus tôt, juste avant que la fameuse voiture de Barbara et son frère n’apparaissent dans la ruelle du cimetière, disséminer quelques rares indices supplémentaires sur le passé des personnages et leurs motivations intérieures ou faire intervenir plus régulièrement la milice qui se rapprochement lentement de la demeure. L’écriture est sobre et directe, mettant constamment en avant les actions des personnages, les enchainements de situations mais aussi se permettant régulièrement de venir appuyer avec un sens du détail décomplexés les effets gores que l’on ne pouvait que deviner sur grand écran. Tout est donc tourné vers l’efficacité, avec une pagination ramassée correspondant à l’aspect série B du film, et vers une tension constante et palpable qui tient le lecteur jusqu’à la dernière page. Efficace soit, mais cette Nuit des morts-vivants ne perd jamais de vue non plus les amorces de réflexions sociétales du métrage et son regard acéré sur une humanité toujours prête à se déchirer là où les morts avancent comme une entité collective quasiment indestructible.
La Nuit des morts vivants n’a pas la prétention d’être un grand livre, mais reste une lecture plutôt prenante, complément attachant du film culte. A noter que John A. Russo ne s’est pas arrêté en si bon chemin, puisqu’il a signé les années deux suites à son propre roman / scénario : Le réveil des morts-vivants et Le retour des morts vivants qui deviendra le film délirant que l’on connait sous la caméra de Dan O’Bannon. Espérons que Faute de frappe nous les propose dans un avenir proche.