Bon, aussi explicites que soient ces fameux passages, ils se révèlent en définitive plutôt perdus dans la masse (6 pages pour 600 pages du volume, le calcul est facile) et surtout, malgré l’assouvissement attendu de pulsions présentes depuis le premier chapitre, pas forcément l’ingrédient le mieux négocié. Trop rentre dedans justement, pas assez sensuel, et surtout relativement plaqué, comme des segments un peu forcés. Heureusement, même si certains médias ne parlent que de ça, Fourth Wing vaut en effet beaucoup mieux. Même sa romance, car l’appellation romantasy n’est pas usurpé, réussit à dépasser son point de départ terriblement prévisible (l’opposition entre le gentil et le mauvais garçon) pour entrainer le lecteur dans une explorations des sentiments, un passage à l’âge adulte et à l’acceptation de ses désirs, qui repose énormément sur ses personnages, attachants et toujours dotés de quelques surprises, et en particulier de l’héroïne Violet Sorrengail. Une fille et une sœur de grandes héroïnes de la nation qui se vouait à la vie paisible de scribe, mais qui se retrouve finalement à devoir suivre le cursus hautement mortel de dragonnière… Elle qui en plus souffre d’une constitution fragile depuis sa petite enfance. Bien entendu cette dernière va réussir à franchir un à un tous les obstacles qui se dressent sur son chemin, utilisant le plus souvent l’astuce, l’intelligence et l’amitié, mais aussi parfois la force et même des pouvoirs qui finiront par éclore lorsqu’elle se liera finalement non pas à un dragon (et l’un des plus terrifiants) mais à deux !

Forgée dans les flammes

Un destin hors du commun pour un petit bout de femme qui dépasse sa condition, repousse constamment ses limites et apprend à se détacher de son trop lourd héritage, à questionner le monde qui l’entoure et à accepter aussi bien son corps que son cœur. Oui, tout ça ! L’autrice Rebecca Yarros est loin d’être débutante, mais ses précédents ouvrages versent effectivement plutôt du coté des love-story contemporaines (Toutes nos histoires infinies, Hors limites…) et ont fait nettement moins de bruit à leurs sorties. Son style plutôt direct, qui privilégie nettement l’efficacité du récit au lyrisme, n’a pas vraiment changé, mais en se tournant vers la fantasy, elle a ainsi pu démontrer ses qualités de créatrice d’univers. Si on ne peut s’empêcher de reconnaitre des ingrédients de quelques créations aussi populaires que Harry Potter, Games of Throne ou Hunger Games, Fourth Wing se dote de nombreuses qualités propres et déploie un monde médiéval constamment sur le pied de guerre, au passé déjà lourd et où derrière la propagande affleure  quelques failles béantes. Pesant, parfois plutôt noir et violent lorsque les jeunes apprentis tombent comme des mouches à l’entrainement, se faisant incinérer sur place par un dragon joueur ou trop susceptible, voir assassiner dans leur sommeil par un concurrent vicelard, le décorum de Fourth Wing est toujours allégé par le point de vue de Violet, bourrée d’humour, d’irrévérence, d’ironie, et indéniablement moderne.

Un feuilleton parfaitement rodé, prenant et terriblement efficace qui certes ne tranche pas vraiment avec les grandes lignes du roman Young Adult ou d’autres titres de Fantasy contemporains, mais sait parfaitement mixer ses ingrédients sans jamais reprendre son souffle. Ou alors vraiment pas longtemps. Et la saga ne va certainement pas s’arrêter là. Le second tome, Iron Flame est déjà annoncé pour le mois de juin par chez nous et le troisième en janvier 2025 aux USA. Et puis Michael B Jordan (Creed) et Amazon prépareraient déjà l’adaptation télévisée…