CRUEL JAWS

Etats-Unis – 2020
Genre : Horreur
Auteur : Brad Carter
Nombre de pages : 260 pages
Éditeur : Faute de frappe
Date de sortie : 28 mai 2025
LE PITCH
Quelque chose de sinistre s’est abattu sur la ville côtière de Hampton Bay. Quelque chose d’horrible et de colossal qui ne s’arrêtera pas de tuer avant que les plages de sable blanc ne soient rouges de sang… Aujourd’hui, un expert en requins renégat et un homme de loi malchanceux sont les seuls à se tenir entre une machine à tuer génétiquement modifiée et des milliers de touristes inconscients. C’est une course contre la montre pour empêcher un requin meurtrier de transformer un weekend de vacances en cauchemar.
Un dentier bien lustré
Déjà bien installée dans sa seconde saison, la collection [Compact] de Faute de frappe s’était jusque-là consacrée à offrir des novélisations ou variations autours de grands classiques du cinéma d’horreur moderne. De La Nuit des morts-vivants à Maniac en passant par Amityville… et pourtant voici Cruel Jaws, version romancée d’un nanar post Les Dents de la mer signée par l’inénarrable Bruno Mattei ! Et pourtant, voilà l’un des bouquins les plus réussi de la série.
En 1995, toujours occupé à jouer la carte d’un cinéma d’exploitation plus opportuniste tu meurs, Bruno Mattei s’inscrivait dans la queue de comète des films de requins et d’attaques animales avec un certain Cruel Jaws. Une production bien fauchée qui passa directement par la case DTV, mais qui ne manquait certainement pas d’ambition puisque le bougre essaya un temps de lui faire garder le titre de Jaws 5, alias Les Dents de la mer 5. La réglementation américaine se montra d’ailleurs beaucoup plus soupe au lait sur la question du titre, que sur l’utilisation abusive de stock-shot piqués à quelques documentaires animaliers, à La Mort au Large, au déjà pas terrible Deep Blood de Joe D’Amato et même au Dents de la mer1, 2 et 3. Logique puisque le scénario pioche lui aussi allègrement dans les scènes culte de la trilogie initiale. Le reste, soit ce qui a été filmé par Mattei en personne, reste dans les larges frontières du navet craignos avec un défilé de personnages aussi crétins que leurs dialogues, de situations débiles, de scènes d’attaques mal torchées… et d’un thème principal à peine décalqué sur celui de La Guerre des étoiles !! Un résultat d’une médiocrité assez hallucinante qui n’avait effectivement pas grand-chose pour lui.
Ne réveillez pas l’eau qui dort
2020, contre toute attente le spécialiste de l’édition vidéo bis Severin Films ouvre sa branche littéraire avec… Cruel Jaws !!! On imaginait mal alors comment quiconque pourrait se dépêtrer du bouzin. Pourtant en revenant directement au scénario de Mattei & co. Brad Carter (Night of the Demon, Saturday Night of the Living Dead…) fait preuve d’une grande fidélité au matériau d’origine. On y retrouve l’intégralité de la trame largement pompée sur les productions Spielberg, les dialogues bien bisseux et les comportements idiots assez généralisés, mais heureusement l’auteur s’efforce de considérablement développer les personnages, creuser plus sérieusement leurs motivations et leurs psychologies sommaires, donnant alors à ce Cruel Jaws un aspect choral nettement mieux négocié et habile. De la même façon, cette novelisation plonge généreusement dans des profondeurs où le film ne pouvait se rendre faute de moyen (ou de talents), multipliant les scènes de sexe sans pudeur et surtout les descriptions bien appuyées des nombreuses mises à mort de nos victimes humaines : coupés en deux, en trois ou façon puzzle, à peine digéré ou sévèrement décapités… Le gore est aussi généreux en restes humains que du côté de l’illustration d’une machine de mort mutante qui va subir diverses explosions, mises en pièces, pour finir presque sous la forme d’un requin zombie. Brad Carter embrasse le Bis et le Z, mais le fait avec style, ardeur, amour et humour sublimant littéralement le long métrage, le transformant en page-turner aussi imparable qu’haletant.
Joli coup donc, et le romancier ne semble pas vouloir s’arrêter en si bon chemin puisqu’il vient de publier aux USA Virus : Hell of the Living Dead, soit sa propre vision du sidérant Virus Cannibale. Manquerait plus qu’il nous en face une fresque apocalyptique épique !