XENOBLADE CHRONICLES 3
Japon – 2022
Support : Nintendo Switch
Genre : RPG
Développeur : Monolithsoft
Éditeur : Nintendo
Musique : Collectif
Durée de jeu : Longue
Langue : Japonais et Anglais (voix), Français (textes)
Date de sortie : 29 juillet 2022
LE PITCH
Le vaste et sublime monde d’Aionios est le théâtre d’un conflit sans fin entre les nations de Keves et d’Agnus. Le temps est une ressource extrêmement précieuse pour leurs habitants, qui doivent combattre sans relâche afin d’espérer vivre assez longtemps pour arriver au bout de leurs dix années de service. Noah, Mio et leurs compagnons ont décidé de lutter pour briser le cycle de violence dans lequel leur monde est piégé.
La mort à boire, comme du petit lait
Le remaster du premier épisode mis de côté, Xenoblade Chronicles 3 signe le grand retour de la série après près de 4 ans d’absence. Digne héritier de ses prédécesseurs, le dernier épisode reprend à son compte une formule solide et qui a fait ses preuves. Ainsi, entre autres éléments caractéristiques de la série, on retrouve ce système de combat où les coups sont à la fois rythmés dans le temps et l’espaces, des environnements monumentaux qui ne cachent pas leurs polygones et un scénario élaboré présenté dans une mise en scène travaillée. Fidèle à la série, XC3 n’en n’est pas moins unique.
Comment se démarquer de ses prédécesseurs quand on reprend tout ce qui a fait leur succès ? À cette question, Xenoblade Chronicle 3 répond tout d’abord en proposant un game design généreux, voire surchargé. En effet, le jeu fourmille d’une myriade de petites règles qui s’appliquent à des activités diverses et variées. Cuisine, combat, linge, classe, chasse, exploration, quêtes annexes… il y en a partout. Pour autant, ces règles existent sans forcément noyer le joueur. Pour la grosse majorité, elles restent passives et s’appliquent en arrière-plan, presque inconsciemment.
En fait, XC3 transforme ce qui aurait pu être un défaut en force. Car cette surabondance de possibilités de jeu fait de XS3 un titre habillement permissif dans lequel chaque joueur peut évoluer à sa manière, qu’il soit néophyte ou expert en JRPG. Les professionnels des statistiques pourront se plonger dans les méandres des attributs de classes et leurs complémentarités pour optimiser l’efficacité de leur équipe, là où les adeptes de la collectionnite pourront vaquer à leurs cueillettes pour enrichir leurs liens sociaux et les randonneurs explorer les divers panoramas que lui donnera à voir le monde d’Aionios. N’importe laquelle de ces activités est une source de points d’expériences qui permet d’avancer dans l’histoire sans avoir à trop forcer. Pour résumer, ce game design est une sorte terrain d’entente conciliant les joueurs du dimanche et ceux de la salle.
Abondance et simplicité
Plusieurs des règles rythmant Xenoblade Chronicle 3 sont en fait des versions simplifiées de mécaniques issues des épisodes précédents. Ces simplifications permettent de gérer la multitude de gameplay proposés dans le titre tout en évitant l’écueil qui avait plombé le deuxième épisode, à savoir : l’irruption bien trop fréquente des cartons d’explications. Dans XC3, non seulement ces cartons sont moins nombreux mais en plus ils sont bien plus concis. On reste encore loin du »zéro déchet » mais c’est une amélioration qu’on ne boudera pas.
La décision a été prise de simplifier le jeu pour en faciliter l’accès. La bonne nouvelle, c’est que plus de monde peut explorer XC3. La mauvaise, c’est que cela rime avec une baisse de contrainte qui tend à étouffer plusieurs mécaniques de jeu. Par exemple, le système de combat propose une idée de fusion des personnages plutôt intéressante sur le papier. Mais comme cette fusion est très facile d’accès, elle ne peut pas apporter d’avantage particulier, au risque de déséquilibrer les combats. Aussi ces fusions n’ont-elles finalement que peu d’intérêts. Pourtant, les entités issues de ces fusions sont des personnages à part entière qui possèdent leur propre arbre de compétences. Cet aspect du jeu est resté inutile lors de notre partie.
De la même manière, la gestion des gemmes pour optimiser nos pouvoirs ne nous a pas interpellé plus que ça. Il faudra certainement pousser les quêtes annexes et les chasses jusqu’aux monstres les plus puissants pour commencer à ressentir le besoin d’exploiter ces mécaniques mais en l’état, sur une partie centrée sur la quête principale, nous avons pu gérer notre aventure sans chercher à comprendre les secrets du système. Il en découle un sentiment d’inachevé dans notre prise en main qui, s’il ne ruine pas l’expérience de jeu, reste un peu dommage de notre point de vue.
Social Justice Warriors
Xenoblade Chronicle 3 se démarque également par son univers, bien plus sombre que ce qui avait pu être proposé précédemment. On le voit dans les thématiques explorées : La guerre, l’exploitation des faibles par les puissants, le libre arbitre, la désinformation… Ces sujets sont abordés au fur et à mesure que le joueur avance dans l’histoire mais cette teinte est annoncée dès le début du jeu. Nos héros débutent leur périple sur un champ de bataille où les vivants ont bien du mal à marcher sans piétiner les morts. Là où XC1 et XC2 évoquaient des thèmes touchant à l’individu, XC3 présente des sujets sociétaux bien contemporains qui trouveront autant d’écho chez le joueur. Tant et si bien que, même si la force de l’amitié y trouve toujours sa voie, le monde d’Aionios ressemble étrangement au notre dans les problèmes qu’il affronte.
Logiquement, cette noirceur se retrouve dans la direction artistique globale du jeu. Les personnages présentent des proportions plus réalistes là où les précédents héros étaient affublés d’attributs complètement farfelus (on pensera aux poitrines des héroïnes du deuxième opus de la saga). Les vêtements sont également plus austères. Mais surtout, les environnements explorés sont moins féeriques que ce à quoi nous avaient habitué la série. Même dans les endroits les plus fantaisistes, l’ombre de la guerre se fait sentir. Le message est clair et le pad en main, il se ressent bien.
KO Technique
Cette direction artistique s’appuie sur une technologie particulièrement pointue. Bien évidemment, on n’oubliera pas qu’il s’agit d’un jeu développé pour la Nintendo Switch, qui vient avec tout son lot de limites liées à son concept de machine hybride réellement portable. Mais tout de même, il faut reconnaître l’incroyable travail d’optimisation qui a été produit par Monolith et ses sous-traitants pour afficher un tel résultat graphique. Le jeu est beau, fluide et dynamique. Les combats peuvent être intenses, parfois brouillons tant les effets fusent de partout et pourtant, l’information sur ce qui se passe à l’écran reste toujours claires et accessibles. Au niveau technique, il n’y a pas à dire : chaque pixel affiché a été finement optimisé et le résultat final est vraiment impressionnant compte tenu du support. De la finesse de certaines textures au traitement de certains effets en passant par les modélisations ou l’ergonomie, peu de domaines n’ont pas été l’objet d’un travail pointu.
Il reste bien quelques détails à relever ceci dit. Par exemple, on aurait aimé avoir une proposition plus poussée sur l’éclairage des environnements en intérieur. En effet, on reste sur des aplats souvent bien fades, qui dénotent avec ce qui s’est fait en extérieur, avec des effets de lumières volumétriques, des variations météorologiques en temps réel, le changement de la luminosité en fonction de l’heure… Mais, pour être parfaitement clair, il faut insister sur le fait que notre avis sur les éclairages en intérieur n’est qu’un regret perdu au milieu d’une centaine de prouesses qui mériteraient bien une conférence à la Game Developper Conference.
Xenoblade Chronicle 3 nous a enchanté par son histoire, son esthétique et sa technique, Il n’est pas exempt de défaut et nous a même fait souffler par moment mais on y est toujours revenu avec l’envie d’aller plus loin. Si la dernière phase de jeu (5 heures, environ) nous a un peu perdu, la fin nous a touché. Sa diversité nous a également permis de profiter de l’aventure à notre rythme et sans pression. De quoi lui pardonner sa permissivité dédiée au grand publique. Enfin, on ressort de notre aventure avec la tête pleine des musiques en tout genre. Bref, en un mot comme en cent : bravo ! On s’est promis qu’on se retrouverait. Ce sera certainement aux prochains DLC.