SILENT HILL 2 REMAKE
Pologne / Japon – 2001 / 2004
Support : Playstation 5, PC
Genre : Survival Horror
Développeur : Bloober Team
Éditeur : Konami Digital Entertainment
Musique : Akira Yamaoka
Durée de jeu : longue
Langue : Texte français disponible
Date de sortie : 08 octobre 2024
LE PITCH
Dans la peau de James Sunderland, aventurez-vous dans la ville presque déserte de Silent Hill à travers le remake du célèbre classique de 2001. Venu sur place après avoir reçu une lettre de sa femme, pourtant décédée trois ans plus tôt, James fouille la ville énigmatique pour tenter de la retrouver.
Le Doom Slayer en PLS
Konami avait choisi de quitter les devants de la scène vidéoludique. Depuis quelques temps maintenant, il cherche à se rappeler à nos bons souvenirs. Après avoir proposé des compiles inoffensive et des refontes humbles de jeux issus de son vieux catalogue, l’éditeur a décidé de sortir l’artillerie lourde en éditant le remake de l’un des plus gros succès critique de l’Histoire du JV : Silent Hill 2. Avec un tel titre, on en est au stade de chercher à couper le fil rouge ou bleu pour pas que ça nous pète à la figure… tout en cherchant à tout péter quand même. Spoiler alert : ça a bien pété !
Si Silent Hill 2 a profondément marqué l’histoire du jeu vidéo, ses divers retours se sont souvent soldés par une déception. Que ce soit pour la version PC, les compiles anniversaires ou encore les remasters HD, rien n’y faisait : la version originale sur Playstation 2 restait la seule version pleinement satisfaisante sur le plan technique. Aussi, entre le statut de jeu culte intouchable et un historique de rééditions souvent malheureuses, l’annonce d’un remake promettant monts et merveilles avait quoi faire peur. Peur que Konami répète les erreurs du passé. Peur que Bloober Team ne soit pas à la hauteur. Peur de voir un tel chef d’œuvre céder aux sirènes du 4k tout lisse et bien fade. Et tout cela à plus forte raison quand des trailers jouaient la carte hollywoodienne en mettant l’accent sur l’action. Un sentiment très largement partagé par les fans. Pourtant, bien que leur jugement fut embrumé par des angoisses légitimes, ces fans distinguaient tout de même une petite lueur d’espoir à l’horizon. Car Bloober Team a une expérience certaine dans le domaine de l’horreur. Il a pu se faire un nom avec The Observer, notamment. Et The Medium, que nous avions apprécié ici même, était très clairement une lettre d’amour destinée à Silent Hill 2. Et si cette fois, c’était la bonne ?
L’hommage avant l’horreur
On pourrait prendre tout le temps du monde pour expliquer ce qu’est Silent Hill 2, sa lecture contemporaine du mythe d’Eurydice, sa sensualité morbide, sa tristesse… à la fin, on arriverait toujours à la même conclusion : il faut vraiment l’avoir fait pour le comprendre. Et il est clair que chez Bloober Team on l’a très bien compris ! Car l’atmosphère du remake est une réussite totale. Le développeur a su prendre les distances nécessaires pour exploiter au mieux le potentiel horrifique des technologies de 2024 tout en préservant le fond du jeu original. On ne suit pas forcément le même parcours qu’en 2001 mais on reconnaît chaque coin de rue, chaque ennemi, chaque scène comme si on était sur du copié / collé. Et le jeu joue sur les différences entre les deux versions en donnant des points de repère particuliers et des lignes de dialogues évocatrices qui donnent au monde du titre original une persistance fantomatique collant parfaitement à l’univers de la licence. En fait, entre l’original et le remake, tout se passe comme s’il s’agissait d’univers parallèles dont les personnages ont une étrange conscience, ce qui accentue toujours plus cette aura de mystère qui avait tellement plu dans le jeu original. Une aura différente, certes, mais bel et bien présente dans le remake.
Le mieux est l’ennemi du bien ?
L’une des grandes stars du jeu original était la brume. Sa présence imposante masquait les dangers alentours mais nous rendait aussi moins visible. Elle était autant menaçante que protectrice. Dans le remake, cet étrange phénomène météo a subi une belle retouche qui peut décevoir aux premiers abords. En effet, s’il faut bien reconnaître qu’elle a plus de gueule, on a aussi le sentiment que le réalisme a amoindri son ressort mystique. Toutefois, au bout d’un certain temps de jeu, on arrive finalement par lui trouver un certain équilibre et quand le haut parleur de la manette émet son grésillement radio bien stressant, signe d’un danger proche, alors qu’on ne voit rien à l’écran, on est pris par la même angoisse qu’à l’époque. Bref, si la brume a peut être perdu de sa superbe, elle joue toujours bien son rôle. Dans le même temps, le réalisme technique a sublimé l’angoisse liée à la lampe torche. Les ombres projetées sont particulièrement bien faites et le manque de visibilité dans les endroits sombres semble encore plus oppressant qu’en 2001. Dès que l’on quitte le monde extérieur pour explorer un bâtiment, l’angoisse monte d’un cran et on avance avec la boule au ventre, attentif à la moindre silhouette suspecte, dans des environnements qui n’ont rien à voir avec les anciens.
Lugubre et spacieux, avec vue
Les bâtiments explorés sont bien moins linéaires que leurs modèles de 2001. Les décors sont fouillés, remplis d’une infinité d’éléments désordonnés, rouillés et sales et l’agencement architectural a souvent été pensé pour faciliter la fuite, l’embuscade ou l’infiltration. Le système de combat est d’ailleurs bien plus travaillé qu’à l’origine. Si la visée suit un modèle TPS classique, le combat rapproché propose une esquive assez efficace. L’origine d’une attaque joue également sur l’issue d’un combat. Attaquer un ennemi dans le dos permet une élimination plus rapide de l’adversaire mais impose d’être lent dans son approche. Cependant, le jeu ne propose pas de ciblage automatique, ce qui rend les combats bien effrayants dans la mesure où le joueur peut perdre de vu son opposant après un coup manqué. La réactivité peut tout de même laisser à désirer, cela dit. Enfin, pour en finir avec les améliorations notables, nous saluerons les animations et le jeu des acteurs, qui relèguent définitivement ce qui avait été fait au rang d’antiquité kitsch. En fait, sur ce remake, tous les curseurs ont été poussés au maximum et le résultat est bien plus efficace que dans nos cauchemars les plus fous : malaisant, effrayant, sale, moche… on se demande pourquoi Silent Hill 2 est si séduisant.
Nous ne nous attendions pas à replonger aussi profondément dans Silent Hill 2 Remake. C’était un titre qui devait rester un beau souvenir de jeunesse, évoqué de temps à autres dans les rares soirées où le JV est un sujet noble. Mais certainement pas un titre d’actualité aussi prenant. Or voilà : la proposition de Bloober Team est réellement trop efficace pour être ignorée. Le remake est un jeu puissant et fidèle, qui nous a obsédé et demandé beaucoup d’attention, au point d’être parfois fatigant. Bien entendu, il y a bien quelques petits défauts à relever ici ou là mais à la fin, on en ressort secoué comme on l’a été à l’époque. Et ça, ce n’est pas un petit exploit. Chapeau bas !