GOD OF WAR : RAGNARÖK
États-Unis – 2022
Support : Playstation 4, Playstation 5
Genre : Action, Aventure
Musique : Bear McCreary
Développeur : Santa Monica Studio
Durée : élevée
Langue : Français
Éditeur : Sony
Date de sortie : 9 novembre 2022
LE PITCH
Après avoir réalisé la dernière volonté de sa défunte épouse, Kratos se prépare à affronter le Fimbulvetr, l’hiver de trois ans, aux côtés de son fils Atreus. Mais une visite inattendue vient semer le trouble dans les convictions du jeune adolescent.
L’hiver approche
2018 marque un véritable tournant pour l’une des plus grosses licences de Sony : de pur jeu d’action et ode à la masculinité (toxique?), God Of War devient le conte d’un anti-héros repenti dont la plus grande préoccupation et d’être un bon père pour le fils qu’il élève désormais seul. Les choses se compliquent alors encore un peu lorsque ce dernier rentre dans l’âge ingrat.
A ce niveau, cet épisode Ragnarök est dans la continuité du volet sorti en 2018 : Kratos, qui n’a certainement pas rajeuni entre temps, est comme obsédé par la sécurité de son fils et toujours hanté par les actions qu’il a pu commettre, en tant que guerrier spartiate, champion des divinités de l’Olympe, puis dieu de la guerre. Parallèlement, Atreus, lui aussi, prend de l’âge et rentre dans l’adolescence, gagnant ainsi autant en assurance qu’en soif de liberté, ce qui va forcément générer quelques étincelles entre les deux personnages. God Of War Ragnarök raconte donc avant tout un conflit de générations, entre un père dont l’expérience est teintée de regrets et un fils plein d’ambition mais frustré par le manque de confiance qu’on lui accorde. Une histoire intimiste au sein d’une légende épique, puisque, rapidement, l’objectif du duo (et d’autres intervenants) est d’empêcher le Ragnarök, la fin du monde qu’ils connaissent. En jouant sur les deux tableaux, le jeu de Santa Monica Studio affiche alors des ambitions narratives dignes des plus gros blockbusters. Avec une réalisation au diapason pour envelopper le tout, on se retrouve face à une œuvre qui aurait toute sa place sur le grand écran d’une salle obscure.
En quête de maturité
Mission accomplie alors pour la filiale de Sony, qui a déjà conquis les cœurs, bien aidé par un épisode précédent déjà impressionnant. Pourtant, sans renier tout ce que Ragnarök fait de bien et toute la vitalité qu’il apporte à son média, le titre tombe parfois dans la caricature à trop vouloir faire du cinéma plus que du jeu vidéo. Si les scènes les plus spectaculaires lors des combats remplissent leur contrat et apporte un soupçon supplémentaire d’énergie, les autres cinématiques, plus posées, ne semblent être là que pour reproduire de manière stéréotypée ce que propose quotidiennement les productions d’Hollywood, avec des mimiques d’acteurs vues et revues, des dialogues interminables, des grandes phrases qui tombent à plat et quelques blagues téléphonées pour rassurer ceux qui auraient contourné le macaron PEGI 18. Comme si sa qualité de jeu vidéo ne suffisait pas pour être accepté. C’est un peu dommage pour un titre qui affiche autant d’ambitions par ailleurs. Heureusement, la plastique globale du jeu rend les choses convaincantes. C’était déjà le cas avec le premier épisode en 2018, mais Ragnarök jouit d’une réalisation somptueuse : les personnages comme les environnements paraissent plus vrais que nature et affichent un niveau de détail bluffant. Visiter les Neuf Royaume est ainsi un ravissement sans cesse renouvelé tant les décors sont variés, entre les plaines glacées, la jungle luxuriante, la forêt humide ou encore des marais inquiétants. Le clou du spectacle réside enfin du côté des boss gargantuesques qui font enfin leur retour après les rencontres un brin trop sages du volet précédent. A ce titre, la mouture PS4 s’en tire particulièrement bien, puisque le niveau de détail demeure extrêmement élevé. Il faut cependant faire l’impasse sur l’animation à 60 images par seconde. Mais le frame rate moins élevé, non seulement, s’avère constant, et renforce, de plus, l’aspect cinéma, pour le coup.
Un Thor et quelques travers
De la même manière que l’on peut trouver quelques écueils dans cet enrobage extrêmement soigné, la jouabilité, globalement solide, cache également quelques faiblesses au sein d’une formule finalement très formatée. L’angle de vue fixée dans le dos des protagonistes permet donc toujours des combats très immersifs mais à la lisibilité souvent mise à mal, les opposants n’hésitant jamais à attaquer hors du champ de vision : les différentes options de verrouillage de cibles n’empêchent certainement pas les nombreux taquets inévitables. Heureusement, les sensations demeurent agréables la plupart du temps. S’il n’est pas question de laisser libre cours son imagination lors de joutes finement chorégraphiées, le poids de chaque coup se ressent bel et bien au bout des doigts grâce à des animations et des effets sonores très réussis. Il est d’ailleurs possible d’alterner librement entre la Hache du Léviathan et les Lames du Chaos, disponibles ici dès le début de l’aventure ; même les coups de bouclier pour ouvrir la défense ennemie, en appuyant deux fois sur la touche de garde, s’avèrent jouissifs. Les exécutions typiques du Spartiate viennent naturellement couronner le tout en rappelant au bon souvenir des fans l’image de guerrier brutal qui lui collera toujours à la peau, quoiqu’un dise l’intéressé. Enfin, avec ses cartes interconnectées à explorer pour du loot et divers défis optionnels comme dans le précédent épisode, cette quête de maturité a le mérite de proposer une aventure toujours plus dense. Mais cela a aussi l’inconvénient de faire entrer la saga dans le moule des grosses productions actuelles, à l’image de ses phases d’escalade scriptées et ses longues parenthèses cinématographiques qui renvoient à Uncharted et compagnie. Mais si cela remet en question un éventuel statut de chef-d’œuvre absolu, à une époque où chaque prise de risque est attentivement mesurée, surtout chez les grands éditeurs, God Of War Ragnarök s’appuie sur des bases solides pour assurer le spectacle.