WHERE THE BUFFALO ROAM
Etats-Unis – 1980
Support : Bluray & DVD
Genre : Comédie dramatique
Réalisateur : Art Linson
Acteurs : Bill Murray, Peter Boyle, Bruno Kirby, René Auberjonois, R.G. Armstrong, Danny Goldman…
Musique : Neil Young
Image : 1.85 16/9
Son : Anglais DTS HD Master Audio 2.0
Sous-titres : Français
Durée : 104 minutes
Éditeur : Elephant Films
Date de sortie : 21 novembre 2023
LE PITCH
L’évocation de la relation entre Hunter Stockard Thompson, le roi du journalisme Gonzo et son avocat Oscar Zeta Acosta. Entre drogues, alcool et excès en tout genre, rien n’est hors limite pour le journaliste exubérant.
Moins de peur que de mal
Avec Las Vegas Parano, Terry Gilliam avait fait l’impensable : adapter les road trips hallucinés d’Hunter S. Thompson sur grand écran. Mais presque vingt ans plus tôt, ce n’est pas Johnny Depp qui incarnait le créateur du journalisme « gonzo » mais bien Bill Murray, porte cigarette vissée au bec, flingue et plume prêts à dégainer.
Ce qui était donc pour beaucoup une entreprise casse-gueule en 1998, l’était sans doute encore plus en 1980, où certes l’Amérique s’extrayait à peine des 70’s et du règne de la rébellion (adieux beaux-jours), mais où la folie hallucinogène de film de Terry Gilliam était tout simplement techniquement irréalisable. C’est pourtant à cette œuvre phare de la contre-culture qui décidé de s’attaquer Art Linson pour sa première réalisation. Pas un inconnu loin de là, mais un homme surtout réputé pour son flair et ses talents de producteurs, dont la carrière a déjà été marquée par le carton de Car Wash et qui se concrétisera par la suite avec des titres aussi mémorables que Les Incorruptibles, Outrages, Heat ou Fight Club. Une longue expérience dans les coulisses du cinéma américains qu’il contera d’ailleurs avec une franchise parfois assez violente dans son autobiographie A Pound of Flesh: Perilous Tales of How to Produce Movies in Hollywood. Même si tout sa carrière n’a pas été qu’une succession de succès, il a toujours su remarquer les grandes signatures du moment ou à venir (Jonathan Demme, Neil Jordan, Alfondo Cuaron…). Il se choisit pourtant lui-même pour mettre en image non pas un mais au moins trois textes fondateurs du bonhomme : The Banshee Screams for Buffalo Meat, Strange Rumblins in Aztlan et bien entendu l’incontournable Fear and Loathing in Las Vegas, tous tournant autour de sa relation ambiguë, complexe et totalement détraquée le liant à Oscar Zeta Acosta (ici interprété par l’excellent Peter Boyle).
Les pieds-nickelés se font l’Amérique
Un avocat des causes perdues, un grand militant pour la libéralisation des drogues et l’assouplissement des lois sur le sujet, parfois aussi un meneur révolutionnaire et un aventurier perché, sa vision du monde se marie à merveille avec les expériences limites de Thompson, dont la prise constante de stupéfiant et de substance, provoquait autant de vision délirante et parano, que de formidables articles aux airs d’élucubrations limites. Un camarade de route dont l’existence passera à la légende lorsqu’il disparaitra tout simplement alors qu’il embarquait sur un bateau rempli de poudre blanche en direction de l’Amérique du Sud. Le parti pris du film, est justement de faire de ce dernier une sorte d’âme damnées de Thompson, apparaissant et disparaissent dans le récit comme des bouffées délirantes, comme une conscience politique déviante, une personnification de sa colère. Idée intéressante qui traverse un film constitué comme une succession d’anecdotes et de scénettes qui traversent une poignée d’années, d’un procès contre des consommateurs de marijuana à l’élection présidentielle de 1972 en compagnie de (ce cher) Nixon et son avion de campagne en passant par un reportage exclusif sur le Super bowl qui s’achèvera dans une cabane paumée en compagnie de révolutionnaires mexicains et trafiquants d’armes.
L’enchainement de situations absurdes, de gags non-sens, de dialogues sans queue ni tête, rappellent clairement les grandes années du National Lampoon et de l’explosion de la génération Saturday Night Live dont Bill Murray est l’un des meilleurs représentants. Avec une ressemblance parfois troublante avec son sujet, lui volant sa diction peu articulée, son regard trouble et lointain et y accolant son habituel ton pince-sans-rire, l’acteur se montre particulièrement convaincant et permet surtout d’insuffler une véritable énergie à une comédie bien trop sage. La faute clairement à une réalisation qui n’arrive jamais à vraiment s’imprégner des déraillements de l’écriture de Thompson, à donner corps à ses visions et ses multiples égarements, abordant chaque segment presque comme un sketch télévisé, suivant les acteurs et l’action avec une triste docilité et unephotographie assez terne.
Where The Buffalo Roam, certes parsemé de grands numéros d’un Bill Murray toujours jouissif en agent tranquille du chaos, ne fait cependant qu’effleurer la vision cinétique de son sujet, se refusant à se laisser contaminer par l’hystérie de ses personnages. Pour en revenir à Terry Gilliam, lui n’aura aucun mal à sauter les deux pieds joints dedans.
Image
Petite copie pour, comme trop souvent, un fond de catalogue Universal dont la source reste très modeste. Les cadres sont tout de même assez propres, toujours stables avec un piqué franchement correct, mais les teintes sont tout au long du métrage relativement ternes et l’image franchement plate. Un master HD d’honnête facture mais qui manque cruellement d’intensité.
Son
Là encore l’âge relatif du film se laisse percevoir par un DTS HD Master Audio 2.0 un peu éteint, toujours un poil écrasé où les marmonnements de Thompson doivent parfois se deviner. Un rendu mono très frontal et centré qui ne fait pas d’étincelles.
Interactivité
Film très peu connu par chez nous, et pourtant Elephant lui offre une petite édition relativement complète en reprenant par exemple directement la longue interview du scénariste John Kaye enregistré pour les collègues américains de Shout Factory. Une rencontre passionnante ou ce dernier revient sur son travail d’adaptation aux cotés de l’auteur, leur amitié naissante et leurs soirées arrosées (et pas que), avant de passer au tournage, ses réserves quant aux capacités de réalisateur d’Art Linson et le caractère pas toujours évident de Bill Murray. Il revient aussi sur la très difficile sortie du film, les retours désastreux de la critique qui mettra fin à ses bonnes relations avec Thompson et en grande difficulté sa propre carrière.
A cela l’éditeur français à ajouté une nouvelle présentation enthousiaste de Mr Jean-Pierre Dionnet (plus les années passent plus il part dans tous les sens) et un grand portrait de l’acteur Bill Murray, avec en point central le film en présence, par le journaliste Yal Sadat auteur justement du livre Bill Murray : Commencez sans moi.
Liste des bonus
Le film par Jean-Pierre Dionnet (8’), Bill Murray par Yal Sadat (24’), Souvenirs de John Kaye, scénariste (42′), Bande-annonce d’époque.