VOYEZ COMME ILS DANSENT
Canada, France, Suisse – 2011
Support : Bluray
Genre : Drame
Réalisateur : Claude Miller
Acteurs : Marina Hands, James Thierrée, Maya Sansa, Yves Jacques, Anne-Marie Cadieux…
Musique : Vincent Ségal
Image : 2.35 16/9
Son : Français DTS HD Master Audio 5.1
Sous-titres : Aucun
Durée : 99 minutes
Éditeur : Éditions Montparnasse
Date de sortie : 25 avril 2024
LE PITCH
Une vidéaste française traverse le Canada à bord d’un train d’est en ouest sous la neige. Ce voyage l’amène à rencontrer la dernière compagne de son ex-mari, show man internationalement connu, aujourd’hui disparu. Chacune des deux femmes va essayer de comprendre comment « l’homme de leur vie » a aimé et vécu avec l’autre.
Elles et lui
Longtemps repoussé puis sortis timidement au cœur de l’été 2011, l’avant dernier film de Claude Miller n’aura malheureusement pas fait bouger les foules, accueilli assez fraichement par la critique. Oublié depuis, ou presque, il sort enfin en vidéo et même s’il n’est pas la plus éclatante de ses créations, la proposition reste bien évidement des plus intéressantes.
Comme très souvent chez Claude Miller, Voyez comme ils dansent est habité par une note inconnue, un secret, une ombre, que ses personnages tentent désespérément de déchiffrer et d’atteindre. Dans cette adaptation de la nouvelle « La petite fille de Menno » de Roy Pervin, c’est le grand artiste Victor Clément, danseur et performeur incarné avec fièvre et magnétisme par James Thierrée (petit fils de Chaplin dont il retrouve une grâce évidente). Un homme passionné, habité par son art, mais définitivement torturé, névrosé, et au caractère changeant. Il est porté pour mort depuis quelques temps déjà, mais son ex-femme continue d’espérer en déceler la clef en se rendant, sous un prétexte de documentaire sur un voyage en train à travers le pays, au Canada pour y rencontrer sa maitresse. Comme une enquête, un puzzle, où les pièces ne semblent jamais s’imbriquer l’une dans l’autre tant les deux femmes semblent diamétralement opposées et tant la personnalité de Vic, mais qui là-bas se faisait appeler Clément, semble celle d’un homme totalement différent. On ne connait jamais vraiment les personnes qui nous entourent, même celles qu’on aime, semble nous dire Claude Miller, qui en profitait autant pour exorciser ses années de dépressions que pour préparer ses adieux, lui qui se savait déjà atteint d’un cancer sans peu d’espoir de rémission.
Elles et lui
Un joli film de personnages, éclairé par les personnalités touchantes des deux actrices Marina Hands et Maya Sansa (magnifique), un regard lucide sur l’humain, ses petits travers, ses soucis de communication et son, toujours, difficile rapport aux autres, qu’il inscrit superbement dans les paysages sauvages du nord Canada. Un film intime en cinémascope où la beauté de la nature, la blancheur éclatante des montagnes et forêts recouvertes de neige, l’écoulement immuable des fleuves ou le calme serein du lac, semblent constamment se moquer de l’inconstance et de l’éphémère des personnages. Un drame ambigu et sensiblement cruel comme les aime Claude Miller qui ne gomme jamais la complexité des choses, mais qui cependant semble moins maitrisé que d’autres de ses réalisations. La rencontre entre les deux femmes tarde beaucoup trop – même si le long voyage à bord du Canadien permet de profiter d’une performance lunaire et poétique d’Yves Jacques en chef de train aux airs de maitre d’hôtel -, et leur confrontation logique, que l’on aurait aimé plus acide, plus passionnée, s’étouffe rapidement sous l’accumulation de flashbacks et les digressions inutiles (les conditions de vie des natifs, intéressant, mais ici sans portée véritable) qui amenuisent le rythme et les sentiments. Quelques faiblesses que Claude Miller rattrapera avec le suivant Thérèse Desqueyroux, nouveau grand portrait de femme en guise de film testament.
Image
Resté inédit en vidéo, Voyez comme ils dansent est enfin disponible en Bluray grâce aux Éditions Montparnasse et via une copie de très bonne qualité. Hérité directement de la source numérique, le transfert est tout à fait précis, sobre et appliqué, mais toujours très ferme dans la restitution des matières, des lumières et surtout de l’amplitude des décors et paysages. Là encore la photographie se veut plutôt naturelle, et ne fait donc pas forcément d’éclat en HD, mais les cadres sont toujours pointus.
Son
La seule piste française (avec un peu d’anglais et de québécois dedans) est proposée dans un DTS HD Master Audio 5.1 effectivement plutôt discret. A l’image du film, elle distille ses atmosphères délicatement, venant simplement appuyer les vrombissements du train, les vents qui filent, la respiration d’une salle de théâtre ou les échos de la nature canadienne. Les dialogues sont clairs et naturellement dynamiques.
Interactivité
Les Editions Montparnasse proposent une édition Bluray plutôt fournie et regroupant de nouvelles interviews inédites. Celle de la productrice et épouse Annie Glenn Miller qui, même si elle a moins suivi ce projet que d’autres, garde un regard très particulier sur celui-ci et le compare à son désavantage au Sourire. Celle de l’assistant réalisateur Hérvé Ruet, qui garde une vraie chaleur pour le cinéaste et sans doute un peu moins pour le producteur du film. Celles de la monteuse et du compositeur uniquement en audio, avec d’ailleurs des morceaux et des versions inédites de la bande originale. On y trouve aussi les interventions du journaliste Yves Alion (aussi responsable des interviews) qui livre une présentation assez enthousiaste, et l’auteur du livre « Claude Miller. Une vie de films » qui se montre plus analytique, replaçant le film dans son contexte, soulignant les liens avec le style, la filmo et la personnalité de Miller.
Liste des bonus
Présentation du film par Yves Alion, rédacteur en chef de l’Avant-Scène Cinéma (8’), Entretien avec Annie Glenn Miller, productrice (14’), Hervé Ruet, premier assistant (16’), Olivier Curchod, auteur de « Claude Miller. Une vie de films » éditions Les Impressions nouvelles (19’), Témoignage audio de Véronique Lange, monteuse (19’), « Vincent Ségal, musicien » (9’), Extraits d’une maquette musicale en vue de la bande originale.