VIVA EROTICA
色情男女 – Hong Kong – 1996
Support : Bluray & DVD
Genre : Comédie dramatique
Réalisateurs : Derek Yee, Law Chi-Leung
Acteurs : Leslie Cheung, Karen Mok, Shu Qi, Lau Ching Wan, Paul Chun
Musique : Chiu Jun Fun, Clarence Hui, Lau Cho-Tak
Durée : 99 minutes
Image : 1.85 16/9
Son : Cantonnais DTS-HD Master Audio 2.0
Sous-titres : Français
Éditeur : Spectrum Films
Date de sortie : 28 juin 2022
LE PITCH
Un réalisateur dont les deux derniers films ont été des flops se voit proposer un film érotique pour relancer sa carrière. Il devra choisir entre son intégrité artistique et l’argent.
Le cinéma au corps
OVNI dans le cinéma HK et même dans sa branche la plus dégénérée, le Catégorie III, Viva Erotica s’engouffre dans le cinéma d’exploitation ouvertement érotique pour mieux y décrire les affres d’un cinéaste obligé de réaliser un film érotique. Une mise en abime réjouissante, toujours joyeuse même si le propos est loin d’être naïf sur l’industrie du cinéma hongkongais d’alors.
Vendu en 1996 comme le film le plus culotté de l’histoire du cinéma hongkongais, Viva Erotica est, comme son titre l’indique, un véritable film érotique ne cachant pas la plastique de ses acteurs et actrices, quettant même les scènes dénudées et les détails charnels avec appétence pour le plus grand bonheur des spectateurs. Du cinéma d’exploitation dans le cadre et dans les moyens, même si la présence de la star Leslie Cheung (Le Syndicat du crime, Histoires de fantômes chinois, Adieu ma concubine) dans le rôle principal met forcément la puce à l’oreille sur la véritable ambition de l’objet. Mis en avant car réalisateur déjà bien installé avec des titres comme People’s Hero, C’est la vie, mon chéri ou Full Throttle, Derek Yee est surtout ici producteur à distance, prête-nom, laissant les commandes du film à son scénariste Law Chi-Leung, futur réalisateur de Koma ou The Bullet Vanishes, lui bien plus marqué par quelques collaborations douloureuses avec, entre autres, les productions Wong Jing. De ces expériences d’homme à tout faire, de créativité contrariée et de constante remise en cause d’exigences créatrives par rapport à la réalité et les travers de l’industrie, il tire donc une comédie délurée qui opère comme une constante mise en abime de son propre parcours, nourrie d’anecdotes de ses collègues et de quelques vérités par toujours glorieuses comme cette omniprésence des triades dans les financements des projets.
Le plus simple appareil
Le charismatique Leslie Cheung est bien entendu en grande part Law Chi-Leung, comme l’inénarrable Anthony Wong (Ebola Syndrome) joue les cameo sous les traits du très commercial Wong Jing, Lau Chin-Wan (Full Alert) apparait sous le nom d’un certain Derek Lee (tiens ?) qui va se suicider après une projection publique calamiteuse (sa mort transformera son film en carton au boxoffice) et les spécialistes du cinéma érotique Tsui Kam-Kong et Shu Qui (avant son arrivée dans le cinéma mainstream) semblent presque interpréter leur propres rôles, bien décidés à dépasser les clichés et les fausses rumeurs à leur sujet. De la même façon, la plupart des techniciens tournant le film dans le film, intitulé Viva Erotica lui aussi, sont d’authentiques, et parfois renommés, techniciens du cinéma chinois. Tout se mélange, mais sans jamais une once de lourdeur, l’humour se montrant le plus souvent plutôt sobre et ironique, et même la critique d’un système entièrement tourné vers l’agent au détriment de l’exploration artistique, sait rester en retrait par rapport à des personnages bien présents, touchants, fragiles et drolatiques. Virée sincère et tendre dans les coulisses d’un cinéma alors souvent infamant pour ceux qui ont été obligé d’y participer, Viva Erotica retrouve même des accents du bijou The Chinese Feast sorti un na plus tôt (et avec au moins deux acteurs en commun) lorsqu’il frise la rêverie et le fantastique, ou s’empare de références reconnaissables (la caméra épaule et illisible façon Wong Kar Wai, la suavité des Roman Porno japonais.), pour en faire un acte résistant et fédérateur au-delà du chaos ambiant. La séquence finale, souvent critiquée, reste pourtant la meilleure façon de finir le film : une mise à nue sans artifices et sans chichi de toute l’équipe du film bien affairée à tourner quoi qu’il en coûte. L’amour du cinéma passe aussi par les films de fesses.
Image
Copie typique d’un film hongkongais des années 90 avec une source vidéo pas forcément restaurée à la source, mais remaniée numériquement avec beaucoup de soin. Les cadres sont dont propres et stables mais sont marqués par un fréquent mélange de grain et de léger bruit vidéo, sensation accentuée par une photographie régulièrement vaporeuse. Reste que malgré ces menus défauts l’ensemble se regarde avec plaisir, affichant une définition et une gestion des couleurs largement au-dessus des anciens DVD.
Son
Pas de doublage français ici mais une piste originale cantonnais proposée à la fois dans sa stéréo d’origine en DTS HD Master Audio assurant une plus grande clarté, et un mix plus « moderne » DTS HD Master Audio 5.1, qui finalement ne propose que quelques effets d’ambiances supplémentaires et pas toujours avec beaucoup de naturel.
Interactivité
Proposé sur support Bluray et DVD dans un boitier Amaray avec jaquette réversible et fourreau cartonné Viva Erotica s’ouvre tout naturellement sur la présentation traditionnelle, et désormais indispensable, d’Arnaud Lanuque qui après un petit rappel sur la nature des Catégorie III et les cadres de la censure, revient surtout sur les éléments inspirés du véritable vécu de certains membres de l’équipe, sur les nombreuses références à de vrais réalisateurs et films HK, avant de revenir sur la place charnière du film dans la carrière de Shu Qi. Le menu se poursuit par une rencontre passionnante avec le réalisateur Law Chi-Leung qui réaffirme sa place de véritable auteur du film et se remémore autant cette époque particulière du cinéma HK que les conditions particulières d’un tournage de film érotique, avec aussi un petit détour par la place de Leslie Cheung (alors que Stephen Chow fut un temps envisagé) et les nombreux guest-stars, dont certains qu’il a totalement oublié depuis. On finit le tout avec un podcast de l’équipe du PIFFF entièrement dédié au petit monde du Catégorie III avec définition, petit historique et surtout incontournables du genre vivement évoqué.
Liste des bonus
Présentation de Arnaud Lanuque (17’), Interviews de Law Chi-Leung (30’), PIFFFcast spécial Catégorie III.