UNE NUIT MOUVEMENTÉE
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Quante volte… quella notte – Italie, Etats-Unis, Allemagne – 1971
Support : Bluray
Genre : Comédie, Érotique
Réalisateur : Mario Bava
Acteurs : Daniela Giordano, Brett Halsey, Dick Randall, Valeria Sabel, Rainer Basedow, Brigitte Skay…
Musique : Coriolano Gori
Image : 1.85 16/9
Son : Italien DTS HD Master Audio 2.0 mono
Sous-titres : Français
Durée : 83minutes
Editeur : Le Chat qui fume
Date de sortie : Décembre 2024
LE PITCH
Dragueur invétéré, Gianni Prada sillonne les rues de Rome, à la recherche de quelque jolie fille. Il finit par repérer, puis aborder dans un parc une jeune femme attrayante, Tina. Le soir même, il passe la chercher chez sa mère qui, malgré quelques réticences, les laisse sortir en discothèque. Après quoi, Gianni prend l’initiative de la ramener chez lui, prétextant un coup de fil important. Le couple passe la nuit ensemble dans l’appartement du jeune homme. Au matin, Tina retourne chez sa mère, la robe déchirée. Elle affirme que Gianni a tenté de la violer.
Sans preuve par 4
De l’immense cinéaste du gothique et du pop, Mario Bava, on célèbre essentiellement les grands films d’épouvantes et d’aventures fumetti. Mais quelques essais détonnent comme Une nuit mouvementée, comédie délurée et sexy typique de ce début des 70’s en Italie. D’autant plus étonnant qu’il s’inspire ouvertement de Rashomon.
Comme dans le chef d’œuvre d’Akira Kurosawa, il s’agit de prime abord du récit d’une agression sexuelle subie par une jeune femme qui avait simplement acceptée une invitation de la part d’un séducteur notoire. Mais ce drame et ce crime sera revisité par quatre points de vue différents : celui de la pauvre victime Tina, celui du bellâtre, celui du concierge (obsédé sexuel) et enfin celui d’un narrateur plus omniscient. Un thème plutôt sérieux en amorce, mais qui, il faut bien l’avouer, va rapidement être tourné en dérision, parodié et presque ridiculisé dans un scénario qui s’engouffre joyeusement dans les petits clichés d’une libération sexuelle pas toujours bien comprise en Italie. De belle effarouchée à la morale inflexible, Tina est alors décrite comme une nymphomane insatiable, puis comme frustrée heurtée par les expérimentations de ses compagnons de soirée, pour finir comme une simple demoiselle qui réécrit, presque inconsciemment, une nuit qui ne s’est pas totalement déroulée comme elle le souhaitait. En bottant en touche dans la dernière bobine et en traitant avec trop de décontraction un sujet grave, Mario Bava manque le coche de ce qui aurait pu justement devenir un regard ironique, voir acide, sur une certaine vision de la femme, de l’homosexualité et de la sexualité en général dans une Italie toujours ambivalente dans leur représentation.
Une même nuit
Au double discours et à la réflexion ambiguë, Une Nuit mouvementée préfère la gaudriole, les gags kitchs, les petits quiproquos qui amènent à sauter dans le lit, les incartades vers quelques demoiselles dénudées et un retour bienvenu à la « normalité ». Un petit film en somme, que le cinéaste accepta, tout comme le western Roy Colt et Winchester Jack, durant une pause forcée de la production difficile d’Une Hache pour la lune de miel. Une commande, un petit exercice dans un genre bien populaire, qui certes n’affiche pas le même génie que des films comme Le Corps et le fouet, Danger : Diabolik ! ou La Baie sanglante, mais qui montre tout de même un grand soin dans sa mise en scène, baignant l’ensemble dans une atmosphère assez psychédélique jouant comme toujours d’une palette de couleurs bien vives, pop et maniérées et réinventant quelques décors très contemporains, comme la salle de bain aux lignes épurées où la boite de nuit aux airs de salon bourgeois déstructuré, à la manière d’une BD. Les images ne sont pas forcément frappantes, mais toujours belles, travaillées et intensément esthétiques, mettant constamment en valeur la superbe Daniela Giordano et ses jambes interminables, Miss Italie 1966 que l’on recroisera, entre autres, dans les giallo Les Rendez-vous de Satan et Ton Vice est une chambre close dont moi seul ait la clé.
Un atout charme indéniable pour une comédie pas bien méchante, gentiment érotique (on se demande encore pourquoi la censure en repoussa la sortie), à la BO yéyé et au rythme cosy. Si ce n’est clairement pas un grand Mario Bava, c’est tout de même son sens de l’image et sa mise en scène qui le sauvent de sa vacuité.
Image
Pas franchement le film le plus distribué de Bava, Une Nuit mouvementée pu être croisé sous la forme de copies épuisées, martelées de taches et de tremblements, ne rendant pas forcément le visionnage très confortable. La nouvelle copie HD, déjà croisée aux USA chez Kino Lorber, est donc un grand pas en avant, assurant un champ de visibilité nettement accru, une définition assez marquée et des couleurs, certes oscillantes dans certains plans, mais plutôt vives et contrastées, telles que les avaient imaginées Mario Bava. Le grain n’est pas des plus stables et les cadres sont encore et toujours parsemés de diverses taches et griffures, certes atténuées, mais présentes. Pas parfaite loin de là, mais méritante, cette copie permet au moins de redécouvrir le film dans des conditions inédites.
Son
Seule la piste mono italienne est présente ici. Proposée en DTS HD Master Audio 2.0 elle doit elle aussi composer avec une source très abimée. Si les dialogues sont assez clairs et les musiques bien posées, on entend régulièrement quelques petites dissonances régulières et une scène est même marquée en arrière-plan par un petit son mate récurrent.
Interactivité
Belle édition classique avec un fourreau cartonné reprennant la plus jolie affiche du film, qui protège un boitier scanavo et son bluray bien rangé à l’intérieur. On retrouve sur celui-ci une rencontre inédite avec Lamberto Bava, fils de, et assistant réalisateur sur le tournage d’Une Nuit mouvementée. Il revient avec plaisir sur quelques souvenirs de tournage, raconte la relation très particulière entre son père et le producteur Alfredo Leone (La Maison de l’exorcisme) et ne cache pas l’identité assez anecdotique d’un film qui ne convenait pas vraiment à son père, relativement peu à l’aise avec l’érotisme en général.
Par contre, on aurait bien aimé pouvoir jeter un œil sur les deux scènes coupées (censurées) proposées sur l’édition américaine.
Liste des bonus
« Les quatre versions » avec Lamberto Bava (28’).