UN ANGE POUR SATAN

Un angelo per Satana – Italie – 1966
Support : Bluray & DVD
Genre : Épouvante
Réalisateur : Camillo Mastrocinque
Acteurs : Barabra Steele, Anthony Steffen, Ursula Davis, Marina Berti, Vassili Karis, Betty Delon…
Musique : Francesco De Masi
Image : 1.85 16/9
Son : Italien et français LPCM 2.0
Sous-titres : Français
Durée : 92 minutes
Editeur : Artus Films
Date de sortie : 3 juin 2025
LE PITCH
Venue passer des vacances dans un village de montagne, la jeune Harriet se retrouve possédée par l’esprit d’une statue datant de plus de deux siècles dont le modèle lui ressemble étrangement. Harriet, habituellement si douce et bonne, va devenir une femme cruelle et dépravée. Bientôt l’horreur s’abat sur le village, frappé par une série de tragédies et de morts atroces…
La muse cruelle
Film rare et longtemps invisible, Un Ange pour Satan avec Barbara Steele et Anthony Steffen revient à nos mémoires grâce à une magnifique restauration. L’un des derniers sursauts du grand cinéma gothique italien.
Considéré par de nombreux spécialistes (dont Nicolas Stanzick sur le présent Bluray) comme l’une des (si ce n’est la) bornes finales du fameux âge d’or du cinéma gothique italien inauguré en 1960 par Les Vampires de Riccardo Freda (1957) et Le Masque du démon de Mario Bava (1960), Un Ange pour Satan ne connu cependant qu’une distribution erratique, en France. Croisé semble-t-il dans quelques salles de province et vite oublié si ce n’est par le biais de photogrammes publiés dans les revues spécialisées, il ne fut que redécouvert bien plus tard par le cheminement des cinémathèques. D’autant plus curieux que le métrage connu un succès tout à fait honorable en Italie et qu’il marque de la même manière la dernière vraie participation de Barbara Steele à un film fantastique avant de nombreuses années. L’icône du genre, à la beauté inquiétante et particulière, à la sensualité insaisissable, et qui se livrait ici une dernière fois à ce portrait d’une femme double : jeune aristocratique précieuse et romantique le jour, nymphomane cruelle et manipulatrice la nuit, elle se met littéralement à nue devant ses proies afin que ceux-ci s’abandonnent en toute soumission.
Une peau de marbre blanc
Une nouvelle histoire de possession et d’éclatement de la personnalité tiré d’une nouvelle de Luigi Emmanuele, mais surtout très inspiré par La Vénus d’Ille de Prosper Mérimé. Si la statue repêchée au fond du lac ne reprend pas véritablement vie, elle semble cependant s’incarner dans le corps d’Harriet Montebruno et l’inciter à totalement bouleverser la vie bien organisée d’une petite communauté rustique italienne. Elle ne se contente pas ainsi de séduire la beau sculpteur (Anthony Steffen, spécialiste du western buriné) venu s’occuper de la restauration, mais aussi le jardinier, le meunier, le gentil instituteur et même sa fiancée. A l’ombre des passions et des pulsions sexuelles enfouies, l’équilibre du village éclate et les drames s’amoncellent. Bien plus écrit que nombres de films gothiques italiens, Un Ange pour Satan marque quelques éloignements avec les codes du genres, se lançant dans une rixe à la taverne digne d’un western, construisant une trame vrillant vers le complot à la manière d’un Giallo ou prenant le temps d’étoffer solidement une belle série de personnages en dehors du palazzio (en remplacement de l’habituel château médiéval), mais préserve bien entendu cette combinaison sulfureuse éros / thanatos et l’indispensable travail sur l’atmosphère angoissante, presque onirique, portée par le vent et les vieilles légendes locales.
Réalisateur finalement assez peu réputé hors Italie, Camillo Mastrocinque aura connu une carrière particulièrement populaire là-bas comme spécialiste de la comédie, dont certaine avec la star Toto. Il ne se sera intéressé au cinéma d’épouvante que sur le tard, en 1964, avec le précédent La Crypte du vampire, exercice appliqué mais sympathique s’offrant qui plus est les services de l’illustre Christopher Lee. Deux ans plus tard, on le sent bien plus à l’aide dans Un Ange pour Satan et si sa mise en scène est encore trop mesurée, trop sage, elle capture à merveille les regards hantés des acteurs, la beauté des décors et profite pleinement d’un noir et blanc ciselé à tomber. Il célèbre surtout à chaque plan le charisme renversant de Barbara Steel vile tentatrice pour qui beaucoup accepteraient de se damner. Ne serait-ce que pour elle…
Image
Artus Films reprend ici la sublime restauration effectuée par Severin Films en 2021. Un travail admirable effectué à partir d’un scan 2K (on aurait dit du 4K) des négatifs originaux et constitué d’un nettoyage chimique et numérique, d’efforts considérables de stabilisation et surtout d’une belle volonté de retrouver l’intensité filmique de l’objet. Si quelques petits passages sont marqués par des cadres un peu troubles et nuageux, l’essentiel du métrage affirme une sacrée santé avec des plans intenses, finement détaillés et sculptés. Le tout est accompagné de noirs puissants, d’un grain délicat et vibrant et d’argentiques gracieux. Superbe.
Son
Comme souvent la version italienne originale (mais postsynchronisée naturellement) résonne de manière beaucoup plus naturelle et équilibrée. Les voix sont claires, la musique bien posée et quelques ambiances apportent un peu de dynamisme frontal à la piste 2.0 du mono.
Le doublage français, de plutôt bonne qualité, offre une sonorité plus écrasée et quelques petits vrombissements en arrière-plan, mais est tout à fait agréable.
Interactivité
Edité en même temps que La Sorcière sanglante, Un Ange pour Satan rejoint fièrement le catalogue déjà bien fournie d’Artus Films en classiques du gothique italien, et reprend d’ailleurs très logiquement le même habillage digipack pour les disques Bluray et DVD, le tout serti dans un fourreaux cartonné. Un bel objet accompagné en supplément vidéo d’une nouvelle présentation étendue et complète signée Nicolas Stanzick : nouveau tour d’horizon du gothique italien, parenthèse sur la longue carrière de Camillo Mastrocinque et regard formel et légèrement analytique sur le film en question. A cela s’ajoute une rencontre inédite avec l’acteur Vassili Karis, qui joue le jeune instituteur ici, et qui étrangement passe tout l’entretien à avouer ne pas trop se souvenir du tournage du film et à évoquer son rejet du cinéma d’horreur et en particulier un tournage évité de justesse avec Bruno Mattei. Amusant mais un peu contreproductif.
Liste des bonus
« La Vénus du Diable » : Présentation du film par Nicolas Stanzick (2025, 38’), « La Statue du Diable » : Entretien avec Vassili Karis (18’), Générique français (2’), Diaporama d’affiches et photos (1’), Bande-annonce originale (2’).