TROIS POUR UN MASSACRE
Tepepa – Italie, Espagne – 1969
Support : Bluray & DVD
Genre : Western
Réalisateur : Giulio Petroni
Acteurs : Tomas Milian, Orson Welles, John Steiner, José Torres, Luciano Casamonica
Musique : Ennio Morricone
Durée : 131 minutes
Image : 2.35 16/9
Son : Italien et français LPCM 2.0 mono
Sous-titres : Français
Éditeur : Artus Films
Date de sortie : 07 juin 2022
LE PITCH
En plein conflit mexicain, le révolutionnaire Jesus Maria Moran, alias Tepepa, est sur le point d’être exécuté par les hommes du colonel Cascorro. Il est sauvé in extremis par le docteur Henry Price. Fuyant les soldats à leurs trousses, Tepepa va découvrir qu’il n’a pas été sauvé par altruisme mais pour être tué par le docteur lui-même.
Al Messico che vorrei
Jusque-là visible par chez nous uniquement dans une version internationale violemment tronquée, Trois pour un massacre, alias Tepepa, rejaillit enfin dans sa version intégrale beaucoup plus ample et profonde chez Artus Films. Hurra !
Si le commun du western spaghetti est effectivement une réappropriation totale d’un genre profondément américain, le western Zapata où les velléités de la révolution mexicaine se font l’écho des aspirations et questionnements politiques de la nouvelle génération, est pour le coup une création profondément italienne. En particulier lorsqu’elle place le pauvre péon, rustique, mal éduqué, mais vaillant et porté par une foi inébranlable en un monde meilleur, en véritable moteur du spectacle. Une orientation que l’on doit d’ailleurs beaucoup à Franco Solinas, scénariste ou coscénaristes des classiques que sont Colorado (Sergio Sollima), El Chucho (Damiano Damiani) et El Mercenario (Sergio Corbucci) qui ont justement rapidement imposé à la fois ce cadre plus historique et cette rencontre / opposition, entre la figure moderne de l’anglo-saxon et l’homme du peuple. Mais là où ces cinéastes, de par leur personnalité bien marquée et leurs regards tranchants apportaient un discours nuancé, une réflexion complexe et souvent ironique, Giulio Petroni (La Mort était au rendez-vous, Un Tueur nommé Luke), plus artisan qu’auteur, reste extrêmement fidèle au message de Solinas, donnant souvent à Tepepa les contours d’une œuvre plus naïve ou en tout cas plus enthousiaste et croyant volontiers à des lendemains qui chantent et à la portée de la révolution populaire.
Une cause juste
Brillamment écrit, même si parfois à la lisière du discours didactique, le film étonne par son sérieux constant, sa fermeté, d’autant plus étonnante que l’icône du cinéma populaire italien, la figure même du rebelle railleur, truculent, Tomas Milian est à nouveau tête d’affiche. Étonnamment plus sobre qu’à l’accoutumé, plus intériorisé dans son jeu, il impose un héros plus charismatique que jamais, revêtu d’un poncho et d’un sombrero noir, de cartouchières en bandoulière et d’un cigarillo au coin de la bouche, devenant au cours du film, malgré ses fêlures, une figure messianique, alter-ego du véritable Zapata dans son combat (historique) contre le président Francisco Ignacio Madero, jugé par ce dernier comme traître à la révolution. L’interprétation est d’ailleurs l’une des grandes qualités du film, la star étant épaulé par un solide John Steiner (Caligula, Manaja) en médecin dandy aux motivations vengeresses et surtout un fabuleux Orson Welles, certes sans doute encore là pour cachetonner, mais impressionnant dans la posture du général tyran, pragmatique, symbolisant à lui seul la froideur de l’oppression. Si on ajoute à cela une superbe bande originale d’Ennio Morricone emporté par les sonorités mexicaines et les chants partisans, Tepepa à tous les atours pour emporter les suffrages.
Mais encore une fois Giulio Petroni n’est pas forcément de la même trempe que Sollima, Corbbuci ou Damiano Damiani et aborde l’objet avec un certain classicisme, délivrant un spectacle soigné, le plus souvent efficace, mais pouvant aussi se perdre dans une trame secondaire peu utile (toute la relation tendue entre Tepepa et le Docteur Henry Price qui est loin d’égaler cette du Dernier face à face), dans une contemplation un poil pataude et une symbolique un peu lourde (le final). Manque alors un surplus de souffle épique, de jubilation cinématographique pour faire de Tepepa, œuvre tout à fait appréciable au demeurant, un autre chef d’œuvre du western zapata.
Image
Plutôt jolie, la copie de Tepepa n’atteint pas forcément la perfection d’autres remasterisations récentes de classiques du western italien. On y trouve encore quelques beaux restes de coupures verticales biens visibles, d’étranges halos rouges sur le côté droit lors d’une séquence de bataille voir même un peu de bruit sur certains plans sombres. Quelques défauts qui ne gâchent pas forcément l’expérience surtout qu’à coté le master profite d’une belle lumière, chaude et vice, d’un piqué très soigné et même d’un léger grain de pellicule bien tenu.
Son
L’éditeur nous propose ici les versions doublées italienne et française. Cette dernière, pas toujours à la hauteur du casting original, est marquée forcément par quelques passages en VOST pour combler les trous de la première exploitation internationale. Disposé dans une même stéréo classique, la version originale assure une clarté très agréable avec un bel équilibre entre les dialogues et les musiques de Morricone sans réels accros perceptibles.
Interactivité
Nouveau titre de la collection Western Européen d’Artus, Tepepa embrasse à son tour le format digipack présenté dans un fourreau cartonné avec DVD et Bluray bien rangés. Sur les disques on trouve une nouvelle présentation, enthousiaste, de Jean-François Giré, venant rappeler les origines du Western Zapata, ses reflets des questions politiques de l’Italie contemporaine et insistant sur les qualités enfin visibles de ce montage intégral. Déjà présent sur l’édition allemande de Koch Media, le segment « Vive la révolution » donne la parole au réalisateur, entrecoupé d’interventions uniquement sonores de Tomas Milian. Cela permet tout de même de revenir sur la filmographie de Petroni et de découvrir quelques informations sur les coulisses de la production avec des propos d’ailleurs pas toujours au diapason entre les deux intervenants, en particulier dans leur appréciation de la participation d’Orson Welles.
Liste des bonus
« Viva Tepepa » : présentation par Jean-François Giré (37’), « Vive la révolution » : entretien avec Giulio Petroni et Tomas Milian (30’), Intro alternative (4’), Diaporama d’affiches et photos (3’), Bande-annonce originale.