THE WICKER MAN
Royaume-Uni – 1973
Support : UHD 4K & Bluray
Genre : Fantastique
Réalisateur : Robin Hardy
Acteurs : Edward Woodward, Christopher Lee, Britt Ekland, Ingrid Pitt, Diane Cilento
Musique : Paul Giovanni
Image : 1.85 16/9
Son : DTS HD Master Audio 2.0 mono Anglais, Français et Allemand
Sous-titres : Français, Allemand.
Durée : 94 minutes
Éditeur : Studio Canal
Date de sortie : 27 septembre 2023
LE PITCH
Le sergent Howie de la police de Western Highland arrive à Summerisle, une petite île privée de la côte ouest de l’Ecosse, pour enquêter sur la disparition présumée d’une jeune fille. Ce qui commence comme une enquête de routine devient une confrontation entre le policier dévot et les étranges coutumes et rituels ayant cours à Summerisle.
L’île nue
Considéré aujourd’hui comme l’un des plus importants films d’horreur anglais, vénéré comme une véritable œuvre culte, The Wicker Man reste un film scarifié, longtemps ignoré, mais qui se révèle plus imposant que jamais ces dernières désormais grâce à un élégant Final Cut et désormais une restauration 4K miraculeuse.
Un troisième montage pour un film qui connut certes une belle réception critique lors de sa sortie en 73, mais qui fut largement boudé par les spectateurs et surtout par son distributeur. Malgré les colères noires de l’immense Christopher Lee (qui le considère toujours aujourd’hui comme son meilleur film et qui est en tout cas l’un de ses rôles les plus forts), EMI n’hésite ainsi par à en couper toute une partie (entre censure et raccourcissement de durée) afin de le mettre en double programme avec un autre film inexploitable : Ne vous retournez pas de Nicholas Roeg. No comment. The Wicker Man est donc au départ uniquement visible sous la forme d’un film elliptique, étrange, unique, mais forcément bancale : la sexualité y est moins affirmée que nécessaire certes, mais surtout la caractérisation du personnage central incarné par Edward Woodward (future star de The Equalizer) présentée en introduction passe à la trappe, ainsi que l’intégralité de la première nuit à l’hôtel, pourtant extrêmement chargée en symbolique et permettant l’entrée poétique du Lord Summerisle. En partie reconstitué au début des années 2000, mais dans des conditions techniques assez terribles, le Director’s cut laisse désormais sa place à un Final Cut, adoubé par le réalisateur, permettant un mix équilibré entre une vision complète du film et une version « visionnable ».
Feu purificateur
En l’état, The Wicker Man retrouve toute son implacable logique, permettant au scénario machiavélique d’Antony Shaffer (Le Limier, Frenzy) de s’aborder à nouveau comme un jeu de piste fatal, inquiétant, mais étrangement ludique. Ballotté d’un bout à l’autre de l’île à la recherche d’une petite fille enlevée qui n’aurait peut-être jamais existée, le Sergent Howie est comme une souris enfermée dans un labyrinthe, victime souvent de l’humour très particulier des habitants de Summerisle, de leur conspiration silencieuse, mais aussi et surtout un personnage trop rigide, trop réactionnaire pour accepter le mode de vie locale. Le chrétien affirmé (il est même vierge) face à une ile absolument païenne, célébrant les forces de la nature et pratiquant une sexualité affirmée, franche et libre, The Wicker Man est autant un thriller extrêmement habile, qu’une leçon de théologie comparée. Par ses nombreux parallèles éclairés entre le culte chrétien et les festivités de ce culte de la fertilité, il s’amuse de la dévotion aveugle du policier, de son combat entre sa foi et ses pulsions naturelles, mais il marque aussi le coup en évoquant le pragmatisme des religions, leur but galvanisant et coutumier plus que profond. Un film qui cultive admirablement les niveaux de lectures, toujours entre le film d’angoisse manipulateur et l’œuvre « d’auteur » stylisé (superbe usage des gros plans fixe et d’un montage décalé) et qui se déguste chaleureusement, galvanisé par un rapprochement saugrenu avec la comédie musicale (vive les chansons païennes et les percussions déhanchées) et une légèreté presque enfantine. Traversé d’images fortes, terriblement sensuelles et ensorcelée, The Wicker Man n’est pas un film d’horreur à proprement parlé, mais le devient quand après avoir offert sur un plateau une vision forcément sympathique de la petite communauté, s’échappe vers un final absolument fou et violent renvoyant à nouveau dos à dos les adorateurs du christ et les adorateurs de la chair, le tout sur un air joyeux et déchirant.
Une œuvre absolument unique, parsemé de séquences miraculeuses comme la fameuse danse nue de la gironde Willow et de plans presque magiques à l’instar de l’image finale : la tête de l’homme d’osier qui s’effondre laissant place à un soleil couchant rougeoyant. Inoubliable.
Image
Les techniciens anglais de Studio Canal auront longtemps cherché pour enfin mettre la main sur une copie en qualité correcte (ce qui n’était pas le cas du Director’s cut) afin de le réintégrer définitivement aux séquences préservées. Et c’est grâce à une copie 35mm retrouvée dans les coursives du Harvard Film Archives il y a un peu plus de dix ans que cela fut possible. Les fameuses séquences (Sergent Howie à l’office religieux dans l’ouverture, Lord Summerisle envoyant son fils pratiquer la jolie Britt pour la première fois…) apparaissent tout de même encore bien fatiguées, baignées dans un grain très marqués avec des fluctuations de teintes radialisées, mais la restauration est tout de même appréciable dans le rendu des couleurs, le réétalonnage, sans avoir usé du réducteur de bruit ou autres déformations pas très heureuses. Ces bandes retrouvées sont donc visibles dans l’ensemble du Final Cut, mais s’y intègrent assez bien, même si à coté le reste du film est absolument superbe : grain impeccable, très beau relief, netteté maitrisée, colorimétrie éclatante, argentiques gracieux…
Son
Si le montage n’est pas proposé dans un DTS HD Master Audio avec une redynamisation de la spatialisation (ouf), il n’en offre pas moins une mono d’origine parfaitement restaurée, ne laissant entendre aucune faiblesse et une clarté harmonieuse. Un très joli travail, discret.
Interactivité
Studiocanal France rattrape enfin son impair de l’édition extrêmement partielle de The Wicker Man en Bluray dans la collection Make My Day ! Ici le contenu est en tout point identique à celle proposée en Angleterre (même si là-bas il existe un coffret plus collector encore avec goodies et CD de la bande originale). L’éditeur avait déjà proposé un contenu plus que solide en 2013 pour le 40ème anniversaire, mais a encore produit de nouveaux suppléments pour ce 50ème anniversaire. Un petit parcours vers quelques anciens lieux de tournage du film, une rencontre avec des critiques anglais pour évoquer les raisons de la longévité du film, une rencontre avec Britt Ekland donnant enfin sa propre version de quelques anecdotes de tournage et enfin une lecture discutée de la première version écrite de la fin du film (très explicative).
Tout cela s’ajoute donc à un contenu préexistant assez exhaustif composé d’un premier making of, Wicker Man Aenigma, associé à un second plus long et plus récent, Burnt Offering. Celui-ci retrace les origines du projet, l’implication de Christopher Lee, les difficultés de tournages (filmer en plein novembre glaciale le printemps glorieux de mai…), la mauvaise distribution et le charcutage éhonté jusqu’à sa résurrection tardive. Tout, ou presque, y est évoqué avec forcément un détour sur la séquence de danse lascive, Britt Ekland regrettant toujours que sa doublure postérieure soit plus rebondie qu’elle. Autour gravitent une longue interview de Christopher Lee et Robin Hardy enregistrée en 1979 pour l’émission Tv Critic’s Choice, une rencontre supplémentaire du réalisateur Robin Hardy qui réaffirme autant l’approche antireligieuse, que la prépondérance d’un angle ludique, une featurette sur la bande originale signée Paul Giovanni, avec même un détour sur sa chaotique distribution en disque, et enfin Worshiping The Wicker Man qui permet à quelques personnalités (Ben Wheatley, James Watkins ou Eli Roth) de réaffirmer l’importance du film.
Bien entendu la qualité primordiale de l’édition (outre son superbe Steelbook), est de disposer en versions restaurées aussi bien le Final Cut que les versions cinéma et Director’s Cut, aussi bien sur disque UHD que sur Bluray. A noter que pour ce dernier montage, le passionnant commentaire audio réunissant Robin Hardy, Christopher Lee et Edward Woodward répond présent.
Liste des bonus
Film en version Director’s Cut (99’) et version cinéma (88’), Retour sur les lieux du tournage (12’), Le 50ème anniversaire de The Wicker Man (11’), Le script original de Robin Hardy – La fin perdue (11), Entretien avec Britt Ekland (10’), « The Wicker Man Enigma » (35’), « Burnt Offering » (48’), « Le culte de The Wicker Man » (22’), La musique de « The Wicker Man » (15’), Entretien avec Robin Hardy (16’), Entretien avec Christopher Lee et Robin Hardy (1979, 25’), Commentaire audio de Robin Hardy, Christopher Lee et Edward Woodward (Director’s cut), Making of du commentaire audio, Nouvelle bande-annonce.