THE HOUSE
Skinamarink – États-Unis – 2022
Support : Bluray & DVD
Genre : Horreur
Réalisateur : Kyle Edward Ball
Acteurs : Lucas Paul, Dali Rose Tetreault, Ross Paul, Jaime Hill
Musique : Aucune
Image : 2.35 16/9
Son : Anglais et français DTS HD Master Audio 5.1
Sous-titres : Français
Durée : 99 minutes
Éditeur : ESC Editions
Date de sortie : 04 octobre 2023
LE PITCH
Deux enfants se réveillent au milieu de la nuit pour découvrir que leur père a disparu et que toutes les fenêtres et les portes de leur maison ont disparu. Cette nuit-là, une étrange présence se fait ressentir.
Home Alone
Précédé d’une réputation de film d’horreur novateur, voir même de révolution dans le genre comme avait pu l’être en son temps Le Projet Blair Witch, The House réinvente la maison fantômes en détournant constamment le regard et en laissant les ténèbres faire le travail. Intéressant mais aussi un peu restreint.
Plutôt qu’un film d’horreur malin ayant construit son aura sur un buzz véhiculé par des réseaux avides de nouveautés (et ici d’une copie volée et jetée en pâture sur Youtube ou et Tiktok), The House est surtout au départ le prolongement des recherches visuelles de Kyle Edward Ball. Créateur du site Bitesized Nightmares, il y proposait aux internautes d’y raconter leurs pires cauchemars, leurs terreurs nocturnes à grands renforts d’images et d’impressions, pour qu’il puisse leur donner corps dans une succession d’essais vidéo souvent très réussis, et effectivement particulièrement inquiétants. En ce sens Skinamarink (titre original qui ne renvoit, volontairement, à rien) pourrait en être l’aboutissement puisqu’il ne compile pas les courts métrages déjà produits ou ne résulte pas d’une réflexion collective mais renvoie bien pour le coup plus volontiers à des sensations plus personnelles, liées certainement à des souvenirs d’enfance du réalisateur. Ici donc deux enfants, de six et quatre ans, se réveillent en pleine nuit dans une maison qu’ils peinent à reconnaitre. Leurs parents semblent avoir disparu et peu à peu des bruits, d’étranges mouvements et des objets qui semblent se déplacer tous seuls (draps, jouets… toilettes ?!) viennent distiller une menace qui se fait de plus en plus oppressante.
Nocturnal Activity
On n’en saura jamais vraiment beaucoup plus sur ce qui se passe dans cette maison. Tout au mieux le spectateur pourra-t-il décoder une hésitation entre un récit classique d’invasion par une entité sadique (un ogre d’antan ?) ou une évocation métaphorique d’un drame familial dont la violence aurait malmenée la psychée des gamins. Comme les fameuses taches du test de Rorschach, le principe est justement de permettre de projeter au spectateur ses propres craintes et inquiétudes sur un canevas volontairement nébuleux fait de voix vaguement discernables, de sons grésillants, d’une spatialisation constamment perturbée et surtout d’images troubles, granuleuses, terriblement sombres où il devient possible de voir naitre et disparaitre des formes et des mouvements qui n’y étaient peut-être pas. En ne montrant jamais vraiment ses protagonistes, en construisant son exploration uniquement de plans quasi-fixes, de décadrages filmant des détails de certaines pièces difficilement discernables, les coins de tables, les encadrures de portes ou les pieds des enfants qui traversent brièvement l’objectif, Kyle Edward Ball s’efforce de retrouver l’inconfort perceptif de ses jeunes personnages. Un inconfort qui renvoit à ces nuits passées à scruter dans le noir un bout de la chambre où semblait apparaitre quelque chose, où un visage se dessinait lentement (en général ça finissait en hurlements) ou ses réveils quasi-somnambuliques où l’enfant ne croit même plus reconnaitre le cocon habituel comme si pièces, portes et escaliers se dérobaient à lui.
Un cinéma d’horreur expérimental, assez minimaliste, et parfois diablement efficace, mais qui en passant de segments de quelques minutes condensées à un long métrage d’1h40 forcé de jouer sur l’étirement des situations et les répétitions, montre aussi, déjà, ses limites, transformant l’attrait en un certain ennui. Les quelques jump-scare et petits effets plus sensationnalistes du final arrivent sans doute un peu trop tard.
Image
Capturé en caméra numérique 4K (oh whoua !) le transfert à cependant été brutalement malmené par de nombreux filtres, effets et retouches salissantes, qui donnent à l’image un mélange de rendu « vieille pellicule » et mini DV qui forcément n’est pas là pour ravir les yeux. Pas évident dès lors de délimiter les pixélisations volontaires de celles qui auraient pu être provoquées par une mauvaise compression (même si cela reste assez peu probable). Idem pour le grain entre le bruit persistant et le neigeux. L’essentiel c’est que le rendu du bluray soit conforme à l’expérience voulue.
Son
Étrangement le mix DTS HD Master Audio 5.1 se montre relativement chiche du côté des effets spéciaux. Quelques échos, bruitages distants et effets de voix, mais le rendu est surtout axé sur les avants, voir parfois même sur un semblant de mono brut et saturé. Là encore, c’est le dispositif du film qui veut ça.
Interactivité
Petit fourreau cartonné, livret making of signé Marc Toullec, le boitier bluray classique gagne un peu en volume grâce à ESC Editions. L’éditeur ne s’est d’ailleurs pas contenté de reprendre l’unique bonus américain, soit un commentaire audio assez pépère et délivrant quelques petites infos sur le tournage et les techniques utilisées, mais a aussi produit deux petites interventions. La première est signée par la youtubeuse de Demoiselles d’horreur qui met avec pertinence en avant la grammaire héritée des réseaux internet (portails vidéos et forum participatifs) et la modernité même du concept du film. En second Simon Riaux (Sens Critique) se penche plutôt sur l’aspect sensitif et la visualisation des perceptions enfantines du film, soulignant là aussi comment le film tranche avec le cinéma d’horreur traditionnel.
A noter aussi la présence cachée d’un second menu de présentation du bluray (façon internet) avec en prime deux cauchemars échappés du site Bitesized Nightmares.
Liste des bonus
Livret de 20 pages par Marc Toullec, Le cinéma d’horreur selon la culture internet par Demoiselles d’horreur, L’horreur géographique par Simon Riaux, Commentaire audio de Kyle Edward Ball et Jamie Mcrae, Bonus cachés, Bandes-annonces.