THE GREAT BUSTER
États-Unis – 2018
Support : Bluray
Genre : Documentaire
Réalisateur : Peter Bogdanovich
Acteurs : Buster Keaton, Quentin Tarantino, Mel Brooks, Werner Herzog
Musique : William Lava, Herman Stein
Durée : 101 min
Image : 1.78 16/9
Son : Anglais DTS HD Master Audio 5.1 et 2.0
Sous-titres : Français
Éditeur : Carlotta Films
Date de sortie : 5 juillet 2022
LE PITCH
« The Great Buster – Une célébration » retrace la vie et la carrière de l’un des cinéastes et comédiens les plus influents et les plus célèbres des États-Unis, Buster Keaton, dont le style singulier et la production féconde à l’époque du muet ont fait de lui un véritable visionnaire du cinéma. Mêlant interviews de célébrités et nombreux extraits de ses films, « The Great Buster – Une célébration » est réalisé par Peter Bogdanovich, cinéaste et historien du cinéma, connu entre autres pour ses écrits et ses films sur des réalisateurs aussi célèbres que John Ford et Orson Welles.
Le Magnifique
Son titre parle de lui-même. Buster Keaton, immense vedette de son époque erre souvent dans l’ombre de Chaplin. Il se devait de retrouver sa place en ce jour ne serait-ce que par ce documentaire. Cet homme-orchestre, génie du cinéma muet au destin atypique est et restera une influence majeure de tout comique qui se respecte.
De Jackie Chan à Mel Brooks, de Johnny Knoxville à Jacques Tati, l’esprit de Buster Keaton persiste un siècle encore après son heure de gloire. Les années 1920 resteront gravées comme la décennie où son génie s’est déchainé au travers d’une dizaine de films plus remarquables les uns que les autres. Plus proche d’Harold Lloyd que de Charlie Chaplin qui s’aventurait davantage sur le côté social, Keaton a su allier l’art de la mise en scène au service de son corps caoutchouteux. Athlète, gymnaste, aucun défi n’était insurmontable pour lui, ses émules le revendiquent, Jackie Chan lui pique des scènes (Opération Condor) et Johnny Knoxville lui rend hommage dans ses Jackass (la grâce en moins). Avec lui, point besoin d’effets spéciaux, lui seul se suffisait. Ce documentaire vient à point nommé pour lui rendre un bel hommage ; et les célébrités se bousculent pour en être !
Grandeur et décadence
Grand bien lui en a pris, c’est Peter Bogdanovich qui s’y attelle. Connu pour être cinéaste, il est aussi et surtout un grand historien du cinéma (une sorte de croisement entre Bertrand Tavernier et Martin Scorsese). Amoureux fou des grands noms des studios, il a passé une bonne partie de sa vie à leur rendre hommage au travers de livres et de documentaires. Son incursion dans le milieu a déjà valu au genre des pépites sur Howard Hawks et John Ford. Alors lorsqu’il prépare un nouvel opus consacré à Buster Keaton, il n’est pas étonnant d’y voir des Tarantino, Mel Brooks, Carl Reiner et le plus surprenant Werner Herzog se prêter à l’interview et à l’éloge. La liste est impressionnante. En ressort un film où les metteurs en scène sont les acteurs et où Buster Keaton est le réalisateur.
Buster n’a pourtant pas eu une vie de tout repos. Son grand cœur lui a joué bien des tours et pas que des bons. Il commence la scène dès le plus jeune âge en rejoignant ses parents dans un spectacle où haut comme 3 pommes on lui fait faire les pires des acrobaties au point où le show fût interdit dans plusieurs états. Heureusement pour lui, l’émancipation ne se fait pas attendre et chemin faisant il accède aux courts métrages qui feront sa renommée. Véritable vedette, son personnage de “l’Homme qui ne rit jamais” divertit le public aux quatre coins du pays. Son incorporation lors de la première guerre mondiale le mènera à se produire devant les troupes épuisées sur le front de la Marne. L’humour est la première arme pour remonter le moral. Son retour marquera sa glorieuse période de grâce avec ses longs métrages d’anthologie avant qu’un mariage infructueux et la malveillance de son beau-frère le fassent signer à la MGM, sonnant par là le glas de sa liberté artistique. De génie, il passe petit à petit au statut de faire valoir. S’ensuit divorce et alcoolisme, cure de désintoxication et internements. Brisé, il remonte la pente en épousant Eleanor, femme dévouée qui l’aima d’un cœur entier. La suite s’alternere entre apparitions et shows TV avant une reconnaissance tardive par l’élite du milieu. Mais le chant du cygne est passé et son aura n’est qu’une ombre de lui-même. Son plus bel hommage viendra de son rival du muet mais néanmoins ami, Charles Chaplin qui avec ses Feux de la rampe relate avec justesse cette époque bénie pour eux.
Immortel
Peter Bogdanovich relate tout cela et bien plus encore. Cet enfant du nouvel Hollywood sait ce qu’il doit à ses ainés et sait leur rendre justice. Bien que linéaire, son documentaire exhume beaucoup d’images d’archives ; de vieilles publicités hilarantes pour une compagnie aérienne à de savoureuses caméras cachées dont il est le protagoniste. Ce sont autant de moments qui nous font dire que sa période de vaches maigres ferait pâlir d’envie nombre d’humoristes actuels. Les intervenants ne manquent pas d’éloge, Orson Welles évoque Le Mécano de la Générale comme l’un de ses films favoris, John Watts avoue s’être inspiré de Keaton pour la gestuelle de son Spider-Man etc, etc… Le crédit de Buster est énorme, gravé dans l’inconscient collectif, ses films sont intemporels. Revoir Cadet d’eau douce, Sherlock Junior, La Croisière du Navigator aujourd’hui, c’est mesurer la longévité de son génie. Merci Monsieur Bogdanovich de nous permettre de se remémorer ce pan de l’histoire du septième art.
A présent, trêve de bavardage, il est grand temps pour nous de se replonger dans les œuvres originales de cet homme qui nous fait rire toujours.
Image
Concoctés avec amour, les extraits accompagnant le documentaire sont pour la plupart restaurés en HD sans pour trahir les films originaux. De quoi donner envie de se replonger dans ces chefs-d’œuvre avec délectation.
Son
Sobre, tout ce qu’il faut pour un documentaire. Entre les interventions des invités aux propos clair, aux musiques accompagnant les extraits et images d’archives, c’est impeccable.
Interactivité
Un seul bonus là où l’on en aurait voulu plus pour prolonger l’expérience du documentaire. Des courts métrages de Buster Keaton auraient été les bienvenus à cet endroit. Peter Bogdanovich intervient cependant lors d’une rencontre au cinéma Quad. Particulièrement fatigué d’avoir enchainé des interviews non pas pour ce documentaire mais pour le montage de L’autre côté du vent d’Orson Welles pour le compte de Netflix que cela en devient gênant. Il revient néanmoins sur son amour pour Keaton et de ses vieux metteurs en scène qu’il a côtoyés. Un menu un peu maigre.
Liste des bonus
« Rencontre au Quad avec Peter Bogdanovich » : interview exclusive (29’), Bande-annonce (1’).