THE CROW (2024)
Etats-Unis, Royaume-Uni, France – 2024
Support : UHD 4K & Bluray
Genre : Action, Fantastique
Réalisateur : Rupert Sanders
Acteurs : Bill Skarsgård, FKA twigs, Danny Huston, Josette Simon, Laura Birn, Sami Bouajila…
Musique : Volker Bertelmann
Image : 2.39 16/9
Son : Dolby Atmos Anglais et Français
Sous-titres : Français
Durée : 111 minutes
Editeur : Metropolitan Film & Video
Date de sortie : 19 décembre 2024
LE PITCH
Eric et sa fiancée Shelly sont sauvagement assassinés par un gang de criminels. Mais une force mystérieuse ramène Eric d’entre les morts, qui, doté de pouvoirs surnaturels, entreprend de se venger pour sauver son véritable amour.
De mauvais augure
Trente ans après le manifeste gothique signé Alex Proyas, fallait-il vraiment offrir une nouvelle version au comic culte de James O’Brian ? Un remake attendu au tournant, le statut du film initial ayant été définitivement sanctifié par la tragédie de la mort de Brandon Lee. Un Everest auquel Rupert Sanders et Bill Skarsgård n’ont pas eu peur de s’attaquer. Courage ou aveuglement ?
Sans doute plus encore que le comic lui-même, l’image de Brandon Lee traversant la nuit dans sa tenue cuir et le visage maquillé comme un ange de la mort est définitivement devenu l’incarnation même de The Crow. Beaucoup l’on oublié mais en plus de quelques projets oubliés en cours de route (dont un par Rob Zombie, quel dommage), la licence a tout de même connu trois suites « cinéma » et une série tv un peu fauchée, Stairway to Heaven, avec le méritant Mark Dacascos, sans jamais bien entendu que celles-ci ne réussissent à éclipser l’original. Conscient de cela, la production de cette cuvée 2024, ne va alors avoir de cesse de prendre ses distances avec le premier film, refusant justement toute l’imagerie baroque et lyrique, le maniérisme de la mise en scène et transportant cette identité « emo » dans un contexte plus contemporain. Plus réaliste même. Là où le film de Proyas optait pour un décorum comicbook hors du temps et hors de l’espace, un monde à lui tout seul, The Crow 2024 l’incarne dans un Varsovie reconnaissable, certes croisement architecturale de différentes époques, mais photographié comme un nouvel épisode de John Wick avec une patine numérique particulièrement proéminente. De la même façon, le récit extrêmement simple de la BD, enchainant les meurtres brutaux, les poses baroques et les visions oniriques, et son extrapolation de 1994 restant volontairement évasive sur la mythologie sous-jacente, visant plus la poétique que la démonstration, s’ancre désormais dans des considérations plus terriennes.
Tué dans l’œuf
Ce nouvel essai, reflet direct de son temps dirons-nous, ne peut s’empêcher de le prolonger, d’en expliquer tout les tenants et les aboutissants, rationalisant toute la démarche du jeune héros, plus là simplement pour assouvir sa vengeance mais aussi pour sauver sa belle de l’enfer et anéantir une figure du mal. Cathartique, mais tellement prévisible. Malheureusement tout le film de Rupert Sanders, qui avait bien mieux négocié son remake (déjà) de Ghost in the Shell, légitimise son projet par cette entremise. L’histoire en elle même est bien plus développée, avec une longue première partie façon Romeo & Juliette chez les inadaptés, les personnages sont différents, le contexte tout autant et le réalisateur n’hésite pas à donner corps à l’écran au fameux purgatoire métaphysique évoquée par James O’Barr… Mais alors pourquoi avoir appelé à nouveau ses jeunes héros Eric et Shelly, alors que plutôt que de s’identifier comme un remake ce The Crow « autre » aurait dû porter un sous-titre comme le long défilé de comics dérivés ?
Une réappropriation de l’histoire donc, mais qui même une fois démarqué de ces racines, pèche largement à s’imposer comme une œuvre convaincante. Entre la bluette mignonne mais sans intensité entre Bill Skarsgård et la chanteuse FKA twigs, bizarrement expédiée, la vague trame de fond sur le méchant sorcier noir à col blanc joué par un Danny Huston bien dans ses rails et les allers-retours auprès du messagers de l’au-delà, The Crow ne réussit jamais à créer une sensation de tout cohérent tout autant que des personnages charismatiques. L’esthétique même du film, vaguement dark mais surtout extrêmement banale dans le petit monde des films d’action actuel, n’est finalement relevée que par une seule vraie scène de carnage à l’Opéra (comme c’est original !) bardé de giclées de sang en synthèse et de petit effets gores gratuits et finalement hors propos.
On cherche ici une once de personnalité, un soupçon d’esprit punk, un vague vent de rébellion. On ne trouve qu’une production très calibrée, jusque dans sa violence à la Deadpool, et qui surtout passe totalement à coté des accents tragiques et expressionnistes de la « franchise ». Un film standard et et comme de toute façon, le corbeau lui-même fait dans la figuration épisodique (allez hop un plan sous la pluie et c’est emballé), autant aller faire son nid ailleurs.
Image
Tout à sa fierté numérique, vive, brillante et léchée, The Crow délivre une copie 4K impeccable avec naturellement une solidité à toute épreuve et une définition constamment repoussée dans ses derniers retranchements. La profondeur est bien présente elle aussi, finement ciselée, même si (numérique oblige) les matières manquent parfois un peu à l’appel. Tout est extrêmement clean, étonnement lumineux, brillant, avec un joli travail apporté sur les contrastes (souvent noirs, mais aussi flashy lors de la parenthèse à l’institut) et les dégradés plutôt élégants et harmonieux. Pointu et maitrisé.
Son
Ce n’est pas forcément le mixage le plus percutant et le plus riche de sa génération, les effets se portant le plus souvent sur l’essentiel de l’action, central, et les dialogues. Quelques ambiances persistent tout de même, avec une certaine présence des environnements urbains ou de la pluie, et bien entendu une dimension plus enveloppante dans la séquence de l’opéra. Classique mais efficace avec un Dolby Atmos bien agréable proposé autant en anglais qu’en français.
Interactivité
Présents autant sur le disque UHD que sur le Bluray de l’édition, les suppléments sont bien plus intéressants ou du moins approfondis qu’on aurait pu s’y attendre. Pas de featurette vite emballée ici mais bien un véritable making of de plus d’une heure qui plonge vraiment dans toutes les réflexions qui ont pu entourer le projet : une nouvelle adaptation du comic, l’héritage du film de Proyas, la disparition de Samuel Hadida, les difficultés rencontrées durant l’écriture du script (qui s’est achevée durant le tournage), les choix esthétiques, l’univers, les scènes d’actions, les personnages, les références culturelles proches du réalisateur… Tout est abordé sans trop de langue de bois et avec une volonté d’aller au fond des choses qui fait plaisir.
Ce segment central est accompagné par un complément entièrement tourné vers la composition et l’enregistrement de la musique, un petit sujet sur l’idée derrière le générique d’ouverture et même un item venant rendre hommage au grand producteur Edward R. Pressman. Un nom associé à Bad Lieutenant, Wall Street, American Psycho et bien entendu les différentes adaptations de The Crow, de celle de Proyas à cette version moderne.
La section bonus s’achève par quatre scènes coupées dont deux donnent un peu plus de consistance à la pauvre pianiste aperçue puis disparue de l’action dans le montage final.
Liste des bonus
Le vrai amour de meurt jamais : Le Making of (65’), La Bande originale (11’), Le générique d’ouverture (2’), Hommage à Edward R. Pressman (11’), Scènes coupées (6’), Le Film Annonce.