THE BORROWER
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Etats-Unis – 1991
Support : Bluray
Genre : Horreur, Science-Fiction
Réalisateur : John McNaughton
Acteurs : Rae Dawn Chong, Don Gordon, Tom Towles, Antonio Fargas, Tony Amendola, Robert Dryer, Mädchen Amick…
Musique : Carter Burwell
Image : 1.85 16/9
Son : DTS HD Master Audio 2.0 Anglais et français
Sous-titres : Français
Durée : 92 minutes
Editeur : Video Popcorn
Date de sortie : 31 janvier 2025
LE PITCH
Un Alien psychopathe est condamné à passer le reste de son existence sur la planète terre. Son principal problème, pour pouvoir conserver son apparence humaine, est qu’il doit régulièrement emprunter des têtes !
A en perdre la tête
Fière papa de l’un des psycho thriller les plus glaçants de l’histoire du cinéma, Henry Portrait d’un serial killer, John McNaughton (Sexcrimes) ne choisit pas la facilité pour son second long métrage : The Borrower. Une authentique série B, avec alien à têtes explosives et duo de flics rigolards et lourdement armés, entre hommage à la SF des 50’s et une description frontale d’une Amérique, forcément, sordide.
Vu l’aura que se trimballe aujourd’hui le fameux Henry, on pourrait croire que la carrière de John McNaughton devint rapidement une route pavée d’or. Il n’en fut rien bien entendu puisque le distributeur du film, refroidi par sa découverte de ce qu’il espérait être un simple slasher facilement commercialisable, en repoussa sans cesse la sortie, jusqu’à ce qu’enfin le bouche à oreille suite à quelques festivals fit son office. Une reconnaissance lente qui lui permettra en 1993 de tourner l’excellente, et toujours à part, comédie romantique Mad Dog and Glory (avec DeNiro, Bill Murray et Uma Thurman) pour Martin Scorsese, mais qui pour l’instant l’oblige un peu à lire des pelletés de scénario rejouant la mélodie du tueur en série. Au milieu il y a cependant The Borrower, script qu’il trouve affreux mais dont il aime bien l’idée de l’extraterrestre exilé sur terre et dont la transformation instable en humain, l’oblige à changer régulièrement de tête après que la précédente n’ait explosé. Les ennuis vont cependant débuter dès la rencontre avec les premiers producteurs, qui disparaitront, et les premiers essais d’effets spéciaux calamiteux. Cela ne s’arrangera pas avec l’arrivée du studio Atlantic Releasing (Teen Wolf, Nomads…) qui finira par mettre la clef sur la porte en plein tournage… sans prévenir personne. Ajoutons à cela de multiples réécritures du script, un budget nettement en dessous des ambitions et une tête d’affiche, Rae Dawn Chong (La Couleur pourpre, Commando, Le Proviseur…) peu ravie de participer à ce type de cinéma d’exploitation et en pleine crise de melon aiguë, et on se rend bien compte que le tournage ne fut pas de tout repos… La sortie du film elle, se fera même en catimini, deux ans après la fin du montage, et essentiellement en vidéo.
« Oh, I’m an alien, I’m a legal alien »
Petit film maudit donc, à la production ubuesque (voir les suppléments de l’édition Bluray) dont de toute façon le mélange de tonalité ne pouvait satisfaire tout le monde. Car si bien évidemment le réalisateur s’amuse ici à rendre hommage aux bonnes vieilles série B d’autrefois avec leurs aliens un peu cringe et un esprit exploitation parfaitement assumé multipliant les effets gores généreux (têtes qui explosent et tripailles en apéro), il ne joue jamais la carte du kitch et de la comédie confortable. L’humour est bien présent, mais plutôt noir voire acide, et le récit s’inscrit pleinement dans l’Amérique cradingue de la fin des années 80. Du Los Angeles censé servir de décor, on observera alors que les ruelles les moins reluisantes, les quartiers peuplés de prostituées, de criminels et de SDF, tandis que le métrage met en parallèle les errances d’un alien qui monte plus ou moins les échelons de la société d’incarnations en incarnations, avec les exactions d’un pervers violeur et sadique. Une sorte de naturalisme scabreux qui oscille constamment entre la comédie presque parodique, le thriller underground et même le buddymovie avec son duo de flic hargneux et blasés (Rae Dawn Chong donc et le solide Don Gordon) qui semblent bien souvent se demander ce qu’ils foutent dans cette affaire. On leur préférera sans doute les prestations hallucinées de Tom Towles (Henry Portrait d’un serial killer, La Nuit des morts vivants, Fortress…) et Antonio Fargass (un roi de la blacksploitation et inoubliable Huggy les bons tuyaux) respectivement en redneck et clodo devenus E.T., et l’apparition courte mais très agréable de la toujours charmante Mädchen Amick (Twin Peaks), aussi habile avec une caméra vidéo qu’une carabine.
Imparfait certainement avec une sensation de collage qui ne fonctionne que partiellement d’une scène à l’autre (comme cet homme à tête de chien), The Borrower reste une œuvre intrigante, étrangement contemplative et bizarrement bisseuse qui porte indéniablement la marque de son auteur : un cinéaste qui prend toujours un malin plaisir à aller là où on ne l’attendait pas.
Image
Produite en 2021 par Shout Factory la nouvelle restauration du film nous venge de dizaines d’années de copies cradingues et recadrées. Ici tout est au bon format bien entendu, et profite pleinement d’un nouveau scan 2K de l’interpositif et d’un réétalonnage effectué sous la surveillance du réalisateur. Ce sont d’ailleurs les couleurs qui frappent d’emblée avec des contrastes intenses, des teintes chaudes et des néons acérés, mais le piqué n’est pas en reste avec des contours bien dessinés, une profondeur appréciable et un sens du détail réjouissant. Certes cette remasterisation ne peut totalement dépasser les limites d’origine du film et le recours à une source postérieur aux négatifs, mais le grain, très présent, affiche un rendu organique et vibrant.
Son
Même si la version originale à profité d’un rafraichissement et d’un passage au DTS HD Master Audio 2.0, elle reste tout de même assez plate. Confortable mais sans grands élans si ce n’est quelques passages musicaux. Pas beaucoup mieux loti, le doublage français très DTV est marqué par un écho métallique constant, là aussi certainement dû à la source retrouvée par l’éditeur.
Interactivité
Après le cultissime Anthropophagous, Video Popcorn revient pour un second titre hérité de la grande époque des vidéoclubs : The Borrower ou Le Voleur de tête par chez nous. On retrouve le même digipack cartonné avec fourreau, et cette envie de bien faire qui démarre par un excellent livret. Celui-ci débute par un petit article de présentation signée par Jean-Louis Colaci (Rédacteur en chef du Fanzine Art De Cinéma) suivi surtout par de très longs entretiens avec le réalisateur et le producteur Steven A. Jones. Idéaux pour retracer tout l’historique de la gestation, voir l’épopée, du film, de ses premiers départs ratés jusqu’à une fin de tournage délocalisée et sous couvert du fond de recouvrement. Riche en anecdotes et passionnant.
Sur le disque Bluray on peut visionner une longue évocation du film par le journaliste Arnaud Bordas qui reprend de nombreux détails de ses interviews justement mais s’efforce aussi de croiser les caractéristiques du film avec le reste de la filmographie de McNaughton et d’en souligner les qualités et le style très particulier. La partie suppléments se poursuit essentiellement avec l’intégralité des deux versions storyboardées du film. Des documents complets et inédits, et joliment dessinés au passage, qui permettent véritablement d’observer l’évolution du projet de sa première mouture (avec un ton plus dur, plus démonstratif mais plus classique aussi) à sa version de tournage. Enfin les grands nostalgiques peuvent revoir le film dans sa version SD recadrée en vf… question de s’assurer de tout ce qu’on a gagné avec cette sortie Bluray.
Liste des bonus
Livret avec interviews de John McNaughton et Steven A Jones, Entretien autour du film avec Arnaud Bordas (37’), Galerie Photos exclusives, Storyboard Original Version & Final Version (20’), Film en version Open matte (87’), La Bande Annonce du film.