THE BARE-FOOTED KID
赤脚小子 – Hong-Kong – 1993
Support : Bluray
Genre : Action
Réalisateur : Johnnie To
Acteurs : Aaron Kwok, Maggie Cheung, Ti Lung, Chien-Lien Wu, Kenneth Tsang…
Musique : William Wu
Durée : 83 minutes
Image : 1.85 16/9
Son : Cantonnais et Mandarin DTS HD Master Audio 5.1
Sous-titres : Français
Éditeur : Spectrum Films
Date de sortie : 29 juillet 2021
LE PITCH
Un jeune homme sans argent arrive pieds nus dans une ville. Doué pour les arts martiaux, il souhaite sortir de sa condition à tout prix et rêve d’une paire de chaussons tous neufs.
Le disciple de la Shaw
Seul film de kung fu, qui plus est en costumes, signé Johnnie To (Election, Judo, Mad Detective…) The Bare-Footed Kid est d’autant plus un cas à part qu’il est le remake pour la Shaw Brother de leur classique Les Disciples de Shaolin (1977) de Chang Che.
Malgré une croyance largement répandue, la Shaw Brothers n’était pas vraiment morte dans ces années 90. Très loin de son âge d’or certainement et de la productivité d’antan, mais encore capable de mettre en boite quelques comédies à la mode comme Justice My Foot ! ou The Mad Monk, tous deux réalisés par un jeune cinéaste : Johnnie To. Encore très loin de la carrière qu’on lui connaît aujourd’hui, ce dernier est alors encore perçu essentiellement comme un simple mercenaire, un yes man efficace comme l’industrie en compte beaucoup. Mais les succès sont là, comme avec le bordélique mais fun Heroic Trio, au style à des années lumières de The Bare-Footed Kid, tentative de la part de la Shaw Brothers de croiser sa longue tradition de film d’art-martiaux à l’ancienne avec les visions plus câblées devenues la norme après l’explosion de la Film Workshop de Tsui Hark. Voici donc ni plus ni moins un remake de l’excellent Les Disciples de Shaolin (1977) de Chang Che, évocation brutale et sans détour d’un combattant perdant son identité dans une quête matérialiste destructrice. Presque vingt ans après, de retour dans les reconnaissables studios et décors maison, cette version modernisée n’a certainement plus la hargne du cinéma de Chang Che, et substitue les démonstrations martiales par des chorégraphies plus virevoltantes, plus fantastiques, pourtant toujours orchestrées par l’extraordinaire Liu Chia Lang.
Trouver chaussure à son pied
Il semble d’ailleurs évident que les notions purement martiales n’intéressent pas vraiment Johnnie To, préférant en réduire drastiquement le nombre et la durée, et en brouillant la lecture par un découpage et un montage qui en souligne la frénésie et l’improbable chaos. L’ultime combat même se montre assez frustrant non pas par son manque d’héroïsme sacrificiel (incontournable dans l’univers Chang Che) mais par son incapacité à en accompagner viscéralement l’aspect tragique, malgré quelques images particulièrement réussies. Pas un grand film de kung fu donc, même si l’ensemble reste tout à fait honorable et divertissant, The Bare-Footed Kid se détache finalement assez sèchement du modèle Chang Che en s’attachant beaucoup plus volontiers aux mélanges des genres. On passe ainsi d’une première partie très légère, proche de la comédie dans l’air du temps, en tout cas à l’image de l’interprétation très naïve, voir niaise, d’Aaron Kwok (Judo) en héros découvrant le monde tel Candide, à un film qui peu à peu s’élance plus volontiers dans les atours du drame déchirant, voir même de grand mélodrame. Si le jeune acteur donne la réplique à la charmante et délicate Chien-Lien Wu (Eighteen Springs), ce duo se montre cependant beaucoup moins charismatique que le couple formé par Maggie Cheung et Ti Leung. Deux comédiens beaucoup plus solides et qui en tout cas séduisent la caméra par leur relation amoureuse sincère, mature et pudique. C’est dans ce décor d’une teinturerie traditionnelle que la mise en scène de Johnny To se fait d’ailleurs la plus inspirée, oubliant un temps les contre-plongées et les grands angles répétitifs pour composer des cadres colorés et élégants.
En tant que pure remake The Bare-Footed Kid est forcément décevant, mais il réussit néanmoins à séduire par un casting irréprochable et des « à-côté » qui ont clairement beaucoup plus inspirés son auteur.
Image
Encore une très belle copie pour Spectrum Film qui propose The Bare-Footed Kid dans des conditions assez emballantes avec des cadres particulièrement propres, stables et une colorimétrie pimpante, rajeunie. Si on peut observer parfois quelques restes d’outils numériques, ils n’entament pas vraiment une profondeur et une définition tout à fait solides qui préservent les textures et les reflets argentiques. Très agréable.
Son
Disponible aussi bien dans sa version cantonaise que mandarin, le film profite à chaque fois d’un mix DTS HD Master Audio 5.1 relativement discret mais qui en tout cas ne dénature pas la source d’origine. Quelques sorties un peu plus dynamiques viennent accompagner les grandes scènes d’arts martiaux, quelques effets de foule, mais de toute façon les films chinois ne l’époque n’étaient pas vraiment connues pour leurs prouesses sonores.
Interactivité
Première sortie estampillée Shaw Brother (avec le logo et tout) chez Spectrum Films, même s’il ne semble pas vraiment avoir été intégré dans la collection proprement dîtes. En tout cas le visuel inédit de la jaquette est excellent. Le contenu intérieur est plus classique et reprend les fondamentaux éprouvés de Spectrum. À savoir une nouvelle présentation très complète d’Arnaud Lanuque, replaçant le film dans la carrière du réalisateur et du studio, ses liens avec le film de Chang Che, ses qualités mais aussi ses défauts. Des propos complétés avec plus de gouaille par Yannick Dahan qui continue d’apposer son regard pertinent sur la carrière de Johnnie To entamée avec The Longest Nite et Expect The Unexpected. L’ensemble s’achève par une analyse stylistique plus poussée de séquences signifiantes, effectuant un comparatif dans le rythme, la mise en scène et la grammaire du montage entre le film de 93 et l’école classique du cinéma de kung-fu. Très intéressant.
Liste des bonus
Présentation de Arnaud Lanuque (15), Conversation avec Yannick Dahan (20’), Essai Vidéo – Transformations Formelles au Crépuscule d’un Genre (19’), Bande-annonce.