STREET FIGHTER
Etats-Unis, Japon – 1994
Support : Bluray & DVD
Genre : Action
Réalisateur : Steven E. De Souza
Acteurs : Jean-Claude Van Damme, Raul Julia, Ming-Na Wen, Kylie Minogue, Damian Chapa, Roshan Seth…
Musique : Graeme Revell
Durée : 102 minutes
Image : 2.39 16/9
Son : Français & Anglais DTS-HD Master Audio 5.1
Sous-titres : Français
Editeur : ESC Éditions
Date de sortie : 8 septembre 2021
LE PITCH
Le général M. Bison règne en maître absolu sur Shadaloo, province reculée de l’Asie du sud-est. Avec une soixantaine de civils retenus en otage, il prévoit de faire chanter les Nations Unies pour une rançon de 20 milliards de dollars. Le colonel Guile va tout faire pour tenir ce plan en échec …
Rues barbares
Dans la droite ligne du Super Mario Bros de Rocky Morton et d’Annabel Jankel (1993) et du Double Dragon de James Yukich (1994), Steven E. De Souza transforme l’adaptation du hit vidéoludique Street Fighter II en grand Barnum cinématographique ringard, kitsch et pas drôle et dans lequel Jean-Claude Van Damme cachetonne sans conviction aux côtés d’un Raul Julia prêt à cabotiner jusqu’à son dernier souffle. Récit d’un désastre sur pellicule.
Sorti en arcade en février 1991, Street Fighter II – The World Warrior révolutionne les jeux de combats, enrichit considérablement Capcom (déjà détenteur des franchises Final Fight et Megaman) et impose un nouveau modèle de déclinaisons multimédia en tous genres. Une véritable mine d’or à laquelle Hollywood ne pouvait rester insensible. Et pourtant, ce sont bien les éxécutifs de Capcom qui viennent taper aux portes des studios américains, et non l’inverse. Producteur solide et respecté, Edward R. Pressman (Conan le Barbare, Wall Street, Bad Lieutenant, The Crow, excusez du peu) décroche le contrat pour Universal et la Columbia et amène dans sa besace le scénariste Steven E. De Souza. Essentiellement reconnu pour avoir été le scénariste de 48Hrs de Walter Hill et de Die Hard de John McTiernan, De Souza n’est pas seulement une petite plume opportuniste spécialisé dans le film d’action. Vétéran de la petite lucarne, il est une véritable touche à tout dont on retrouve la trace dans les séries culte L’Homme qui valait trois milliards, K2000 et V, passant de monteur à producteur puis à réalisateur et scénariste. Déjouant les attentes, il rédige un premier traitement de Street Fighter où figurent à peu près tous les personnages du jeu mais dans une intrigue nettement plus proche d’un James Bond période Roger Moore (humour cartoonesque inclus) que du tournoi d’arts martiaux à travers le globe qui constitue pourtant la trame narrative du jeu. Les japonais sont conquis et De Souza en profite pour s’imposer contractuellement dans le fauteuil de metteur en scène, réalisant son rêve de se retrouver aux manettes d’un vrai blockbuster. Problème : pas vraiment aidé par un planning et un budget plus serré que prévus, le (faux) débutant va accumuler les mauvais choix. À commencer par son casting.
Hadôken !
Star montante du cinéma d’action, artiste martial accompli et valeur sûre du box-office après les succès d’Universal Soldier et de Time Cop, il était inévitable que Jean-Claude Van Damme fasse partie de l’aventure Street Fighter. Plus encore si l’on prend en compte l’influence de Bloodsport, de Full Contact et de Kick Boxer – ses premiers succès – sur les jeux vidéo, et pas seulement pour avoir servi de modèle au Johnny Cage de Mortal Kombat. Mais le Van Damme qui arrive sur le plateau de Street Fighter n’est plus le jeune belge ambitieux, volontaire et attachant des débuts mais plutôt une diva cocaïnée jusqu’aux oreilles. Imbu de sa propre personne, JCVD ne se présente devant les caméras que si l’envie lui en prend. Et comme si ça ne suffisait pas, De Souza doit également aménager ses prises de vues autour de l’état de santé désastreux de Raul Julia, amaigri par un cancer de l’estomac. Résultat, le reste des acteurs, à la préparation physique et martiale incomplète, se retrouve à lever la jambe devant la caméra dans des chorégraphies improvisées par un Benny Urquidez (méchant haut en couleurs chez Jackie Chan pour Soif de Justice et Dragons Forever) absolument pas au courant que le film sur lequel il travaille est l’adaptation d’un jeu vidéo et que les styles de combat doivent être variés ! Bien conscient que ce qu’il filme n’est pas à la hauteur de ses espérances et que son budget réel est amputé par les exigences salariales de ses acteurs principaux, le cinéaste fait ce qu’il peut avec ce qu’il a, s’appuyant sur une seconde équipe solide et rajoutant du second degré partout où il peut, transformant ses personnages en véritables bouffons. Le dernier outrage viendra de la MPAA qui jugera le film trop violent et forcera De Souza à expurger le montage de tous les plans d’impacts de coups ! Si le film réussit à tripler sa mise au box-office et à satisfaire les comptables de Capcom, la critique est incendiaire, les fans du jeu sont outrés et les carrières de Jean-Claude Van Damme et Steven E. De Souza en paieront le prix. Raul Julia, lui, décédera deux mois après le tournage. Pas forcément l’épitaphe rêvée pour l’inoubliable Gomez de la Famille Adams.
Mauvais, Street Fighter l’est sans l’ombre d’un doute. Mal joué (chapeau bas à Ming-Na Wen, obligée de pousser des cris de souris à chaque coup de pied), mal réalisé et même franchement embarrassant lors des scènes avec Blanka et Dhalsim, le film ressemble ainsi plus que de raison à une production Cannon période Superman IV et rate toutes ses cibles. Ou presque. Pas souvent cité, Andrew Bryniarski est l’un des seuls à tirer son épingle du jeu, composant un Zangief hilarant de naïveté, embryon du Drax des Gardiens de la Galaxie de James Gunn. Aux côtés d’un Raul Julia plaçant son Bison sur le même podium de mégalomanie risible et décomplexée que le Ming de Flash Gordon ou le Comte Zarth Arn de Starcrash, la montagne de muscles fait bonne figure et arrache quelques sourires pas du tout honteux. Il en faut si peu pour échapper au zéro pointé !
Image
L’un des points forts de cette édition. Si l’on accepte un grain assez envahissant lors des scènes les plus sombres et enfumés (et notamment dans le repaire du Général Bison), on ne peut que saluer une copie à la colorimétrie chaude et généreuse. Un vrai bonheur à la définition soignée et qui redonne à ce sacré nanar tout le lustre de son exploitation sur grand écran.
Son
Là, c’est un peu moins convaincant. Le menu et le décodeur de notre lecteur a beau annoncer du 5.1, le mixage de la version originale manque cruellement d’ouverture et d’énergie et semble éteint, se rapprochant davantage d’une stéréo propre mais pas assez musclée. Le constat est heureusement tout autre en version française avec une agressivité retrouvée et un doublage qui en rajoute dans l’humour involontaire.
Interactivité
Comme tous les autres Van Damme sortis chez ESC, Street Fighter a droit au packaging spécial VHS, histoire de gâter les collectionneurs nostalgiques des vidéoclubs. On retrouve donc tous les goodies de rigueur et le désormais incontournable numéro de KO Mag. Une belle attention pour un film qui n’en méritait sans doute pas tant. Le contenu vidéo n’est pas en reste avec en premier lieu un commentaire audio soutenu du réalisateur, entre lucidité et fierté d’avoir mené ce projet foireux à bon port. Autre supplément intéressant, un entretien haut en couleurs avec le cascadeur et combattant Manu Lanzi qui se rappelle sa collaboration avec Van Damme sur le plateau du génial JCVD de Mabrouk El Mechri avec force anecdotes décoiffantes. Plus scolaires mais non dénués d’intérêts ou de propos bien amenés sont les entretiens avec Alexis Blanchet (qui revient sur le jeu vidéo et les mécanismes d’adaptations au cinéma) et Arthur Cauras (qui continue de disséquer la carrière du karatéka belge). Comme Chasse à l’homme ou Mort Subite, on retrouve enfin une section de bonus cachés mais moins riche qu’à l’accoutumée, avec une featurette promotionnelle d’époque et une poignée de scènes coupées centrées autour de Chun-Li qui se la joue espionne et femme fatale.
Liste des bonus
Entretien avec Alexis Blanchet, spécialiste du jeu vidéo au cinéma / maitre de conférences à Paris 3 (20 minutes) / Entretien avec Manu Lanzi, régleur de cascade et chorégraphe de combat / Poing Carriere partie 4 par Arthur Cauras : retour sur la carrière de Van Damme (20 minutes) / Commentaire audio de Steven De Souza / Featurette making of (5 minutes) / Scènes coupées.