SEPTET : THE STORY OF HONG KONG

七人樂隊– Hong-Kong, Chine – 2020
Support : Bluray et DVD
Genre : Drame
Réalisateur : Johnnie To, Sammo Kam-Bo Hung, Ann Hui, Patrick Tam, Yuen Woo-Ping, Ringo Lam, Tsui Hark
Acteurs : Simon Yam, Francis Ng, Lawrence Ah-Mon, Emotion Cheung, Cheung Tat-Ming, Chui Ho-Cheong, Ian Iskandar Gouw, Timmy Hung, Mimi Chi-Yan Kung, Suet Lam…
Musique : Chan Si-Lok, Thomas Cheng, Peter Kam, Woody Pak, Patrick Tam
Image : 1.78 16/9
Son : Cantonnais DTS HD Master Audio 5.1
Sous-titres : Français
Durée : 111 minutes
Editeur : HK Vidéo
Date de sortie : 14 avril 2025
LE PITCH
7 réalisateurs, 7 regards, 7 histoires, 1 ville : Hong Kong. Initiateur du projet, Johnnie To accompagné de 6 autres réalisateurs unissent, pour la première fois, leurs talents pour composer une symphonie d’histoires en hommage à leur ville. Entièrement tourné sur pellicule, Johnnie To, Sammo Hung, Ann Hui, Patrick Tam, Yuen Woo-Ping, Ringo Lam et Tsui Hark, nous partagent leurs visions d’une ville fascinante, des années 50 à aujourd’hui.
Hong-Kong I Love You
Sept réalisateurs, sept courts-métrages, sept décennies, une ville : Hong-Kong. C’est sur ce pitch que Johnnie To a réuni une troupe de grands cinéastes ayant fait les plus belles heures de ce cinéma emblématique qui a fait le bonheur de bon nombre de spectateurs. Après une sortie salle avortée, l’exploitation du film ayant été bloquée par la censure chinoise, Septet est enfin visible en France.
Avec sa situation politique atypique, la ville de Hong-Kong connut bon nombre de bouleversements sociaux et culturels, dont deux forts courants migratoires dans les années 50 et 90, qui influencèrent fortement son cinéma et par extension, le cinéma extérieur. Sammo Hung, Ann Hui, Patrick Lam, Wuen Woo Ping, Johnnie To, Ringo Lam et Tsui Hark, les cinéastes qui participent à Septet sont tous nés entre la fin des années 40 et le milieu des années 50 et ont donc tous connu les périodes décrites dans leur court-métrage respectifs. Un nom prestigieux manque quand même à l’appel parmi les réalisateurs présents, c’est celui de John Woo, qui aurait dû s’occuper de la décennie 70. Son absence n’est pas pour autant remplacée dans le film et on peut alors espérer voir un jour son segment être tourné et intégré dans une version longue (qui devrait s’appeler Octet du coup). Même si les années 70 sont absentes, le film nous propose donc 70 ans d’histoire de Hong-Kong des années 50 à 2020, 7 histoires qui vont peu à peu évoluer de la nostalgie dans les premiers segments, qui correspondent à l’enfance et l’adolescence de leurs réalisateurs, à la vie d’adulte et la confrontation avec la réalité qui les rattrape, la rétrocession de la ville à la Chine en 1997, pour finir sur leurs visions de cette nouvelle époque.
A Better Yesterday
C’est à Sammo Hung que revient l’honneur d’ouvrir le film avec un court métrage qui fera le bonheur des amateurs de ses films puisque c’est un récit autobiographique qui nous raconte les séances d’entrainements aux arts-martiaux qu’il a suivi quand il était enfant, parmi les Seven Little Fortunes. Un écho aux Painted Faces d’Alex Law et une nouvelle occasion de nous montrer beaucoup de pitreries de sa part et ses camarades mais sans oublier la violence qui a pu en découler, le court est donc tout à fait dans l’esprit de ses autres réalisations, et nous fait assister à un évènement fondateur de la vie de cet immense artiste martial.
Le second sketch est réalisée par Ann Hui, il nous montre la vie d’une école primaire entre élèves et corps enseignant. Extrêmement doux et bienveillant, ce second segment est aussi le seul à être scindé en deux époques pour nous transporter ensuite plusieurs décennies plus tard et nous montrer ce que sont devenus ces personnages, l’influence qu’ils ont pu avoir sur les autres ou les regrets de certains non-dits. Le segment de Ann Hui est probablement le plus émouvant des sept, et rappelle parfois le Madadayo de Kurosawa.
Le troisième se place dans les années 80 et nous raconte la dernière nuit d’un jeune couple avant le départ définitif de l’un deux pour l’étranger. Le segment aborde la question de la première vague de départ des habitants de Hong-Kong dans l’anticipation de la rétrocession. Un déracinement mis en parallèle ici par Patrick Tam avec la fin d’un premier amour mais quand même moins touchant que le court de Ann Hui car un peu trop maniéré dans sa réalisation.
La quatrième partie est un renvoi à la première puisqu’elle est réalisée par Wuen Woo Ping qui a fait partie de la même troupe que Sammo Hung. Le célèbre chorégraphe nous raconte la relation entre une grand-père pratiquant les arts-martiaux et fan de Wong-Fei Hung (joli clin d’œil) et sa petite fille qui vient lui rendre visite avant de partir en Angleterre. Se passant en 1997, l’année de la rétrocession, le court, comme le précédent, parle du départ de ses habitants vers l’étranger mais cette fois à travers un choc des générations. Une vision du départ pourtant plus optimiste que le court de Patrick Tam puisqu’il traite des bienfaits des mélanges culturels comme passerelle entre les générations et comme moyen de perpétuer les traditions.
Le cinquième court est réalisé par l’initiateur du projet, Johnnie To. Il nous montre une nouvelle génération cette fois complètement plongé dans les valeurs capitalistes qui traverse les crises financières et sanitaires (le SRAS de 2003) en cherchant constamment à trouver comment faire profit de ces situations. Traité sous l’angle de la comédie mais avec une résonance malheureusement toujours d’actualité, le court souffre d’un vocabulaire technique assez complexe si on n’est pas porté sur les trafics boursiers mais décrit bien le chaos ambiant de la ville post-récession.
Le sixième segment est réalisé par Ringo Lam, ce fut sa dernière réalisation avant sa mort en 2019. Loin des histoires pleines de violence et de fureur qui ont fait sa renommée, le réalisateur nous offre une balade nostalgique au cœur d’un Hong-Kong transformé par la modernité, vu par un ancien habitant qui revient sur les lieux de son enfance en superposant photos d’époque et vues actuelles. Une vision très touchante d’un homme dont la vie est derrière lui, renforcé par la perte du réalisateur.
Le dernier court-métrage, se passe quant à lui dans les années 2020 et est réalisé par Tsui Hark. Le réalisateur d’origines vietnamienne, peu porté sur la nostalgie du passé nous livre le segment le plus loufoque du film, se passant entièrement dans un hôpital psychiatrique. Extrêmement méta, on assiste à une conversation entre un médecin et son patient qui souffre de trouble de la personnalité et se prend pour les différents réalisateurs des précédents courts-métrages. C’est clairement la partie la plus atypique du projet mais qui derrière ses allures de farce, illustre peut-être la vision de Tsui Hark d’une nation perdue dans ses multiples personnalités où les fous ne sont pas forcément ceux que l’on pense.
Jolie projet de réalisateurs, Septet est un hommage à tout un pan du cinéma asiatique. Un cinéma qui a l’image de sa ville, était à multiple facette, fou, émouvant, traditionnel et d’une modernité folle, le cinéma de Hong-kong telle qu’on l’a connu a peut-être disparu mais son héritage, lui, s’est infusé partout ailleurs et c’est grâce à ça qu’il restera toujours présent.
Image
L’une des grandes particularités du film est d’avoir été tourné sur format pellicule, format presque désuet aujourd’hui, en particulier dans le cinéma chinois. Cela permet de retrouver à l’image des sensations et des textures que l’on croyait presque disparues pour ces cinéastes. Une certaine chaleur de l’image, une sensibilité plus nostalgique encore, avec un très joli grain toujours délicat et harmonieux, des contrastes bien dessinés, des lumières moins tranchantes que pour du numérique, le tout est solidement ancré dans une définition solide et respectueuse.
Son
La piste DTS HD Master Audio 5.1 cantonaise se met au diapason du film et travaille de prime abord des échos plutôt frontaux, centrés sur les dialogues et les personnages. Une restitution souple et dynamique mais plutôt modeste, qui pourtant recapture subtilement sur les surrounds toutes les ambiances de la fameuse fille. Les échos de la nuit, de l’agitation urbaine, de la circulation des véhicules ou de chaudes journées d’été viennent compléter agréablement le panorama.
Interactivité
HK Video propose le film dans un très joli digipack quatre volets avec fourreau cartonné, le tout contenant les deux disques, Bluray et DVD et un important livret présenté à la façon de l’ancien, et regretté, HK magazine. Dans ce dernier on retrouve une présentation très complète du film via un retour sur les années de La Nouvelle Vague et les évolutions du cinéma hongkongais, une analyse critique très solide du film dans son ensemble suivi par un regard plus précis sur chacun des segments avec à chaque fois un portrait du cinéaste. On y trouve aussi une belle note d’intention du producteur Johnnie To, avec un hommage à Ringo Lam, ainsi que quelques propos façon notes de production, de chacun des réalisateurs. Le tout bien entendu agrémenté de photos des films et de quelques images des coulisses.
Un joli objet qui vient compenser des bonus vidéo forcément très décevants avec les deux petits featurettes / bandes annonces où l’on guette les petites interviews de tout le monde. Un tel projet aurait vraiment mérité un grand making of.
Liste des bonus
Le magazine inédit « HK Orient Extreme Cinema » (56 pages), « Un ensemble de virtuoses »(2’), « Un travail harmonieux »(2’), Bandes-Annonces.