SAW X
Etats-Unis – 2023
Support : 4K UHD & Bluray
Genre : Horreur
Réalisateur : Kevin Greutert
Acteurs : Tobin Bell, Shawnee Smith, Synnove Macody Lund, Steven Brand, Renata Vaca, Joshua Okamoto, …
Musique : Charlie Clouser
Durée : 118 minutes
Image : 1.85 16/9
Son : Français & Anglais Dolby Atmos True HD
Sous-titres : Français, Français pour sourds et malentendants
Editeur : Metropolitan
Date de sortie : 29 février 2024
LE PITCH
Atteint d’une tumeur au cerveau en stade terminal, John Kramer, alias Jigsaw, un tueur en série sadique, n’a plus beaucoup de temps à vivre Il place ses derniers espoirs dans une thérapie coûteuse et illégale et part subir une opération au Mexique…
La parenthèse ensanglantée
Sortis respectivement en 2017 et en 2021, Jigsaw et Spirale : l’héritage de Saw s’étaient risqué à injecter un soupçon de sang neuf dans la saga en s’éloignant sur la pointe des pieds de la continuité imposée par les sept (!) films précédents. Ce dixième chapitre fait machine arrière pour nous ramener entre le premier et le second volet et place John Kramer au centre de l’intrigue plutôt qu’en coulisses. À une impression de déjà-vu plus que tenace et à quelques incohérences vient s’ajouter un point de vue discutable sur les actes d’un tueur en série auquel Tobin Bell offre pourtant sa meilleure interprétation à ce jour.
Qui aurait pu croire que le petit thriller malin et sadique concocté par James Wan et son pote Leigh Whannell en 2004 donnerait naissance à une franchise aussi prolifique et increvable ? Avec neuf séquelles (et bientôt dix) au compteur, Saw est devenu une authentique mine d’or pour la société de production Twisted Pictures et son distributeur Lionsgate, avec un box-office mondial de plus d’un milliard de dollars. Très généreusement accueilli en salles à l’automne dernier par le public et – fait plutôt rare – par la critique, Saw X est loin de siffler la fin de la partie.
Aujourd’hui âgé de plus de 80 ans, Tobin Bell, l’âme et la voix de John « Jigsaw » Kramer, est donc prié de renoncer à une retraite pourtant bien méritée et de rempiler pour mener à l’échafaud des arnaqueurs profitant de la faiblesse d’hommes et de femmes rongé(e)s par des cancers incurables. La recette est désormais connue : prenez quelques êtres moralement douteux, enfermez-les dans un espace clos et délabré et enchaînez-les à des pièges mortels dont ils ne pourront s’échapper qu’au prix d’automutilations improbables et vous obtenez un croisement entre un film d’horreur et une partie d’escape game tout juste relevée par un twist final nous démontrant par A + gore que le grand méchant de l’histoire avait TOUT prévu depuis le départ. Producteurs et scénaristes ont néanmoins quelques atouts en main pour nous donner l’impression (et guère plus) de la nouveauté. Tout d’abord en offrant la vedette à l’homme qui se cache le plus souvent derrière un pantin flippant et des machinations sanglantes. Ensuite, en délocalisant la production au Mexique pour un soupçon d’exotisme à peu de frais. Enfin, en exploitant une ellipse entre Saw et Saw 2, la preuve que même en week-end à l’étranger, Jigsaw peut faire des dégâts.
Game Over
Les belles intentions qui dominent les dix premières minutes de Saw X tournent malheureusement court. Le portrait funèbre, émouvant (et oui!) et crédible d’un homme hanté par sa solitude et l’injustice de son sort cède bien vite la place à un thriller convenu et parasité par les clichés de la franchise. L’investissement de Tobin Bell et la volonté d’offrir entre les lignes un semblant de questionnement sur la moralité des actes de Jigsaw s’évanouissent peu à peu pour présenter au public l’image d’un justicier droit dans ses bottes, juge un peu sévère mais juste d’une humanité pas très reluisante. Si les films précédents veillaient le plus souvent à « nuancer » la caractérisation des victimes du tueur, préférant montrer des personnages faillibles plutôt que des ordures intégrales, Saw X ne se gêne pour placer Jigsaw au-dessus de la plèbe et en faire le défenseur de la veuve et de l’orphelin comme le souligne au marqueur un happy-end pour le moins ridicule.
À ce positionnement clairement douteux et cynique s’ajoutent d’autres scories toutes aussi problématiques. Outre ce foutu réflexe de dépeindre le Mexique comme LE repère des pires représentants de l’espèce humaine, Kevin Greutert (monteur des cinq premiers Saw, puis réalisateur des opus VI et VII) peine à rendre crédible un John Kramer plus doué en improvisation, en stratégie et en mécanique que tous les MacGyver de la planète (mais où trouve t-il le temps et les ressources pour mettre au point des pièges aussi coûteux et tordus ?). Le réalisateur ne peut pas non plus dissimuler l’âge avancé de son casting, près de vingt ans après le premier volet. Pour la continuité, on repassera.
Saw X ne sauve les apparences que très superficiellement, tout d’abord grâce à des effets de maquillage inventifs et parfois saisissants de réalisme (la jambe coupée ! Aïe!), mais aussi par un savoir-faire général qui se refuse à faire sombrer la franchise dans le Z opportuniste et bâclé. Verre à moitié vide ou à moitié plein ? C’est à vous de voir.
Image
Le transfert en 4K Ultra HD apporte un surcroît de relief et de profondeur de champ et fait la nique à un bluray pourtant irréprochable. Les détails abondent, même en basse lumière et même lorsque le cadre et les acteurs sont inondés de sang. Les variations des sources de lumière (tantôt froides et métalliques, tantôt chaudes et poisseuses) sont admirables.
Son
Les deux mixages proposés sont quasiment impossibles à départager, grâce à l’apport inestimable du Dolby Atmos. La spatialisation donne littéralement l’illusion de se trouver au milieu du décor principal et de subir les assauts acoustiques des scies, des perceuses et des masses qui servent à découper et à broyer les os et les chairs. Mieux vaut avoir l’estomac bien accroché.
Interactivité
Disponible dans un steelbook au visuel pas franchement transcendant, Saw X déroule une interactivité généreuse mais pas toujours convaincante. Riche d’anecdotes mais gangrené par une avalanche de compliments à la longue carrément gênante, le commentaire audio est proposé sans l’ombre d’un sous-titre.
Découpé en longs segments, le making-of souffre lui aussi de ce même refrain d’autosatisfaction permanente et ne délivre que peu d’informations utiles, un comble eu égard à sa durée. Plus intéressante est l’analyse très détaillée de trois scènes par le réalisateur, lequel décrypte avec force arrêts sur image et croquis, ses choix d’angles de prise de vue, de découpage et de montage, soit une leçon de cinéma très didactique et qui prouve le professionnalisme du bonhomme (son talent, c’est une autre question).
Nombreuses, les scènes coupées ont surtout le mérite d’apporter un peu plus de profondeur à ses personnages, à leurs doutes et à leurs motivations. Les quelques minutes de B-roll consacrées aux petits génies des effets spéciaux de maquillage complètent efficacement le tout. Il y a de la matière, mais il faut un peu faire le tri. Et il faut vraiment être fan de la saga.
Liste des bonus
Commentaire audio de Kevin Greutert, Nick Matthews et Anthony Stabley (VO), Making-of en 6 parties (110’), « Croquis à l’appui » : 3 scènes commentées et analysées par le réalisateur (35, 13 scènes coupées (35’), « Tester les pièges » (8’), Bande-annonce.