SANS RETOUR

Southern Comfort – Etats-Unis – 1981
Support : 4K UHD & Bluray
Genre : Thriller, Action
Réalisateur : Walter Hill
Acteurs : Keith Carradine, Power Boothe, Fred Ward, Franklyn Seales, T.K. Carter, Lewis Smith…
Musique : Ry Cooder
Durée : 106 minutes
Image : 1.85 16/9
Son : Anglais et Français DTS HD Master Audio 2.0
Sous-titres : Français
Editeur : L’Atelier d’images
Date de sortie : 4 février 2025
LE PITCH
Neuf soldats Américains de la garde Nationale partent effectuer une marche de reconnaissance dans une région sauvage et marécageuse de la Louisiane. Perdus dans les dédales d’un labyrinthe oppressant, ils deviennent tour à tour la proie des étranges et invisibles habitants de ces marais, les Cajuns, qui leur livrent une cruelle chasse à l’homme.
Dans la brume électrique
Plutôt boudé lors de sa sortie en 1981, notamment aux Etats-Unis, le film de Walter Hill Sans retour n’a depuis cessé d’être réévalué. Désormais disponible dans une sublime version 4K, venez découvrir cette impitoyable chasse à l’homme en eaux troubles flirtant avec le thriller et le pur film d’action.
Lorsque Walter Hill s’attaque au tournage de Southern comfort (titre original particulièrement ironique du film) au début des « eighties », le réalisateur californien a déjà marqué de son empreinte le cinéma américain des années 1970 avec Le Bagarreur, Driver, Les Guerriers de la nuit et Le Gang des frères James, sortis entre 1972 et 1980. D’abord scénariste au début de sa carrière (notamment sur Guet-apens de Sam Peckinpah, réalisateur qui l’a profondément influencé aussi bien sur le fond, avec le thème de la violence aux USA, que sur la forme, avec notamment l’usage de ralentis), Hill signera le script de la plupart de ses films comme ici avec Sans retour, mais aussi ceux d’autres cinéastes comme Alien de Ridley Scott en 1979.
Avec une trame parfaitement huilée et sans fioritures, Hill réalise ici un pur film d’action sublimé par ses paysages marécageux et l’excellent travail du directeur de la photographie Andrew Laszlo, qui cherche ici à retranscrire l’esprit des photos de la Guerre de Corée, grises et brumeuses. Ainsi à l’instar de film de Bertrand Tavernier sorti en 2009 et également tourné en Louisiane, c’est Dans la brume électrique que nos neuf gardes nationaux (sorte de réserve de l’armée américaine) vont se retrouver aux prises avec des locaux pratiquement invisibles qu’ils ont eu le tort de provoquer. Quasi-intégralement tourné en extérieur (autour du lac Caddo près de Shreveport en Louisiane), dans des conditions physiques éprouvantes, le film se transforme alors en un véritable huis-clos naturel, où les arbres et les marais deviennent une véritable cage enserrant nos soldats « du dimanche » … Ainsi, mine de rien, des films postérieurs et pourtant bien différents comme Rambo, sorti en 1982, ou Predator, en 1987, semblent pourtant se placer dans la lignée du Survival forestier de Hill à bien des égards.
The Warriors
Parmi les influences de Sans retour, difficile de ne pas songer au traumatisant Délivrance de John Boorman, sorti en 1972, où quatre amis pacifiques, comme nos gardes nationaux seulement armés de balles à blanc pour ce qui devait être un simple exercice, se retrouvaient à la merci de « Rednecks » déviants. Toutefois, une autre filiation encore plus directe semble venir de la propre filmographie de Hill avec son cultissime Les Guerriers de la nuit, sorti deux ans plus tôt, où une bande de jeunes « voyous » perdus en territoire ennemi étaient pris en chasse par des bandes rivales dans la jungle urbaine new-yorkaise.
Dans Sans retour, les réservistes n’ont rien de soldats d’élite et se retrouvent sans défense face à un ennemi invisible, parlant une autre langue (les cajuns parlant français) et connaissant parfaitement son environnement. Le parallèle qui a pu être fait avec la Guerre du Vietnam, avec ces nombreux jeunes appelés emmenés à l’abattoir dans la jungle vietnamienne, est donc justifié, le réalisateur affirmant de nos jours qu’il se doutait bien « que le public penserait au conflit du Vietnam » qui s’était clos quelques années auparavant, en 1975. Comme le démontre l’incroyable final du film oscillant entre les festivités de la communauté Cajun et une fin de chasse à l’homme sanglante, le montage au cordeau réalisé par Freeman Davies est l’une des principales forces du long-métrage. Au même titre que la musique composée par le guitariste Ry Codder, fidèle de Walter Hill, qui par ses riffs dramatiques laisse planer sur le film une ambiance crépusculaire, à la limite du fantastique. Une direction artistique aboutie et cohérente qui se retrouve confortée par un casting certes dénué de « stars » mais où chaque acteur tire son épingle du jeu. Avec une mention spéciale pour l’excellent duo formé par Keith Carradine et la révélation du film Power Boothe (La Forêt d’émeraude, U-Turn…), qui sera en quelque sorte le témoin et l’œil du spectateur durant cette cauchemardesque « balade » dans les marais de Louisiane.
Malgré un échec au Box-office à sa sortie et une critique assez mitigée, Sans retour se présente plus de quarante ans après comme l’une des grandes réussites de l’œuvre passionnante de Walter Hill. Comme le dit lui-même le cinéaste américain, « il faut environ 25 ans pour savoir si un film est bon ou pas », et force est de constater que ce petit film d’action à petit budget (environ 8 millions de dollars) a particulièrement bien vieilli.
Image
Jusqu’à maintenant, les cinéphiles français avaient dû se contenter d’une édition DVD datant de 2008 pour le film de Walter Hill. L’atelier d’images donne donc un sacré coup de jeune au film en le proposant pour la première fois en HD et dans une nouvelle restauration héritée d’un scan 4K d’un interpositif. Le travail d’Andrew Laszlo se retrouve magnifié par cette remasterisation : l’image grise et organique est sans défaut et permet une bonne vision des arrières-champs. Les cadres s’avèrent stables et la définition est plus que correcte même si forcément le grain reste très présent. Une réussite.
Son
Le Master DTS HD 2.0 remplit son contrat en nous immergeant dans le marasme où tentent de surnager les protagonistes. Les dialogues sont parfaitement clairs et le mixage de la BO de Ry Cooder est très convaincant. La version française très marquée par son époque reste agréable même si elle souffre d’un écrasement très marqué de l’arrière-plan sonore.
Interactivité
Pour cette ressortie attendue du film, l’excellent éditeur L’atelier d’images nous propose un beau coffret contenant les galettes Blu-Ray et 4K UHD. Près de deux heures de bonus vidéo sont proposées avec notamment une présentation passionnée de Philippe Guedj (rédacteur en chef Le Point Pop), où le journaliste ne manque pas de superlatifs. Ainsi, « le dernier acte est l’un des climax les mieux montés du cinéma américain ». Il rappelle également les différents degrés de lecture du film et qu’il s’agit du film préféré de Hill.
Enfin, l’interview sans langue de bois du réalisateur est un régal ! Louant les qualités de son équipe et l’endurance de ses acteurs sur un tournage très physique, il s’amuse aussi sur ces anciens propos où il niait la symbolique du Viêt-Nam : « il ne faut jamais croire les interviews de réalisateurs ! ». Il garde un excellent souvenir du film malgré son échec en salles qu’il explique, en partie, par un marketing moyen : « J’ai souvent ressenti cela tout au long de ma carrière ! ».
Il est rejoint par une interview en visio de l’acteur Keith Carradine qui ne tarie pas d’éloge sur le travail du réalisateur, s’amuse de la très lente carrière du film et se remémore avec plaisir quelques souvenirs de tournage et la collaboration avec ses camarades acteurs. L’édition s’achève par une reprise d’un podcast de Steroids réservé justement à Sans Retour, dans lequel Stéphane Moïssakis et Rafik Djoumi décortiquent, en mode décontracté, le style de Walter Hill et l’atmosphère particulière du métrage.
Liste des bonus
Présentation du film par Philippe Guedj (6’), Bataille dans le Bayou, entretien avec Walter Hill (17’), Entretien exclusif avec Keith Carradine (40’), « Steroïds » : Podcast de l’équipe de Capture Mag sur le film (55’), Bande-annonce originale.