SALVADOR
Etats-Unis – 1986
Support : Bluray & DVD
Genre : Drame
Réalisateur : Oliver Stone
Acteurs : James Woods, James Belushi, Michael Murphy, John Savage, Elpidia Carrillo…
Musique : Georges Delerue
Durée : 122 minutes
Image : 1.85 16/9
Son : Anglais et français DTS HD Master Audio 5.1
Sous-titres : Français
Éditeur : Extralucid Films
Date de sortie : 16 mars 2022
LE PITCH
Richard Boyle est un photoreporter qui a couvert des guerres au Vietnam, au Cambodge, au Moyen-Orient, en Irlande et en Amérique Centrale. En 1980, sa vie privée s’effondre : sa femme le quitte en prenant son enfant sous le bras. Alcoolique et ruiné, il finit par se faire expulser de chez lui. Il décide de repartir au Salvador, où il a déjà réussi à gagner sa croûte en faisant quelques photos des combats en marge des médias établis. Mais arrivé dans le pays, il voit ses espoirs brisés par la folie du Salvador des années 80, en prise avec les escadrons de la mort. Richard Boyle comprend alors qu’il doit à tous prix chercher le salut, pas seulement pour un pays, mais pour lui.
La preuve par l’image
Quelques mois à peine avant son Platoon, Oliver Stone signait Salvador. Une plongée dans un pays en pleine guerre civile, au bord de l’effondrement, où le cinéaste va pour la première fois donner corps à l’une de ses principales ambitions : balancer la réalité en pleine gueule.
Jeune scénariste star d’Hollywood s’étant fait un nom grâce à ses scripts pour Midnight Express, Conan Le Barbare, Scarface et L’Année du dragon, Olivier Stone n’a alors signé comme réalisateur que deux petites séries B assez maladroites et assez éloignées de ce que deviendra son cinéma, avec Seizure et The Hand. Né de sa rencontre avec le journaliste de guerre Richard Boyle, coscénariste du film et protagoniste principal, Salvador est tout autre, puisqu’il permet au cinéaste de renouer avec un cauchemar imminemment personnel : le Vietnam. Indirectement certes, mais ce qui s’est déroulé là-bas au tout début des années 80, autant les massacres perpétrés sur les civils que l’implication politique et militaire des USA aux côtés du dictateur fasciste local, résonne cruellement dans les convictions de Stone en particulier lorsqu’il observe comment fut traité le sujet dans les médias : avec désintérêt et un angle forcément biaisé. C’est donc le premier pas vers un cinéma engagé, frontal, aux limites parfois du cinéma vérité, habité par ce besoin de rouvrir les plaies et les dossiers polémiques qui nourrit constamment Salvador.
Les dossiers de l’écran
La chronique, noire, houleuse et désordonnée d’un Richard Boyle et son pote de beuverie, dans un pays à feu et à sang, dont il semble constamment étranger, en marge, même lorsqu’il s’efforce de sauver sa dulcinée locale (son épouse légitime l’a abandonné dans la première séquence), hésitant constamment entre un égoïsme odieux et une étrange forme de foi en son métier et la vérité. Un personnage mal aimable, mal fagoté, cru souvent vulgaire, qui s’offre au passage l’une des plus éclatantes performance de James Wood, acteurs fiévreux par excellence et qui malgré la participation des copains James Belushi en beauf alcoolo et John Savage en photographe investi, est le moteur frénétique d’un film à son image. Reprenant le flambeau de films comme Under Fire de Roger Spottiswoode et La Déchirure de Roland Joffé, Salvador n’enjolive jamais son sujet et plonge sans doute encore plus franchement dans le quotidien parfois sordide de ses personnages, ainsi que la violence et la barbarie des faits relatés. A l’instar de ce viol collectif particulièrement insoutenable perpétré sur des sœurs en mission humanitaire. C’est pourtant dans ces moments les plus dangereux, les plus glauques, que ce soit la visite d’un charnier à ciel ouvert ou une ultime bataille spectaculaire en pleine ville entre les révolutionnaires communistes et l’armée gouvernementale (bien aidée par une Amérique qui vient d’élire un certain Reagan), que le photographe retrouve à chaque fois son souffle. Un électron libre au cœur d’une histoire en marche, œil en quête de l’image définitive, venant personnifier cette fascination pour une violence aussi réelle que cinématographique, brute que stylisée, qui fait tout l’ambiguïté, passionnante, de l’œuvre d’Oliver Stone.
Image
Pas évident de définir véritablement quel a été le travail de restauration fourni par MGM ou autre, mais il est évident qu’en arrivant sur format Bluray le film à fait un grand bond en avant. Du côté de la définition tout d’abord, plus précise et creusée que jamais, des couleurs avec une restitution plus chaude et maîtrisée qu’autrefois, et des nombreuses séquences nocturnes autrefois difficilement perceptibles et aujourd’hui fidèlement retranscrites. Pourtant le master est encore et toujours parsemé de nombreux défauts de pellicule (taches et griffures), certains plans laissent affleurer une luminosité changeante et génériques et transitions sont marqués par une source abimée légèrement lissée pour faire passer la sauce. Loin d’être parfait soit, pourtant le rendu de la copie convient parfaitement à un film comme Salvador justement jamais trop clean.
Son
Pas de trace de la piste mono d’origine (à priori très fatiguée) remplacée par un DTS HD Master Audio 5.1 beaucoup plus clair et équilibré, profitant aussi bien aux compositions de Delerue qu’à quelques effets d’ambiances dynamiques (assaut militaire, vol de l’hélicoptère…) efficaces et jamais envahissants.
Interactivité
Cette édition Bluray de Salvador est disponible sous la forme d’un large livre comprenant une reproduction complète du livret de presse et ses notes de productions, d’une reproduction totale du fil dialogué et d’un large cahier photo qui se conclut par une sélection oh combien éclairante de critiques françaises de l’époque. L’occasion d’observer le léger soutien de la critique de droite (comme quoi) et le massacre en règle de l’essai par un Libération aussi brutal qu’à coté de ses pompes.
Pour les moins fortuné le disque Bluray et les deux DVDs (un pour le film, l’autre pour les bonus) sont aussi proposés sous un plus sobre boitier Amaray avec fourreau. Le contenu vidéo y est bien entendu parfaitement identique avec en premier lieu une interview inédite et franche d’Oliver Stone qui se remémore une expérience fondatrice, un galop d’essai nécessaire avant le tournage de Platoon, l’échec du film en salles et plus généralement sa vision politique autour de l’implication militaire des USA en Amérique du Sud. Une introduction complétée par deux longues interventions du critique Fathi Beddiar, en face caméra et en commentaire audio, qui avec son bagou bien connu développe en long et en large et avec forces anecdotes et connaissances aussi bien l’impact du film en lui-même, que les frasques du véritables Richard Boyle et le tournage guérilla chaotique, jamais très loin de l’engueulade généralisée.
Quel dommage cependant d’avoir perdu en cours de route la majeure partie des suppléments autrefois présents sur le DVD MGM à savoir un commentaire audio du réalisateur (bizarrement pas aussi loquace que d’habitude) et surtout un excellent making of rétrospectif d’une heure. Seule survivante, la vingtaine de minute de scènes coupées ou rallongées reste un témoignage indispensable d’un premier montage à la fois beaucoup plus cru sur la question de la sexualité et sur la représentation des carnages de la guerre, et plus poussé encore dans ses détails politiques et l’ambiguïté de services américains et des journalistes.
Liste des bonus
Un livre sur le film avec dossier de presse, notes de production, scénario, revue de presse, cahier photos (184 pages), Entretien exclusif avec Oliver Stone, Analyse du film par Fathi Beddiar, Commentaire audio par Fathi Beddiar, Scènes coupées, Bande-annonce.