ROSEMARY’S BABY

États-Unis – 1968
Support : UHD 4K & Bluray
Genre : Fantastique, Horreur
Réalisateur : Roman Polanski
Acteurs : Mia Farrow, John Cassavetes, Ruth Gordon, Sidney Blackmer, Maurice Evans
Musique : Christopher Komeda
Durée : 137 min
Image : 1.85 16/9
Son : Dolby True HD 1.0 Anglais, Dolby Digital 2.0 français, allemand, italien…
Sous-titres : Français, anglais, allemand…
Éditeur : Paramount
Date de sortie : 11 octobre 2023
LE PITCH
Malgré les conseils de leur vieil ami Hutch, Guy Woodhouse et sa jeune femme, enceinte, s’installent dans un vieil immeuble new-yorkais considéré par leur ami comme une demeure maléfique. Aussitôt, leurs voisins, Minnie et Roman Castevet, vieux couple d’Europe centrale, imposent leur amitié et leurs services. Si Guy accepte facilement ce voisinage, Rosemary s’en inquiète…
Le bon dieu sans confession
Premier film américain du très européen Roman Polanski, Rosemary’s Baby est l’occasion pour le cinéaste de se refaire après l’échec commercial de l’amusant Le Bal des vampires. Finalement l’idée est d’ailleurs ici presque la même, réanimer de façon toute personnelle un genre, le fantastique ésotérique, d’une manière on ne peut plus européenne, en y insufflant non pas une esthétique éprouvée, mais bien la personnalité de l’auteur.
En adaptant le roman d’Ira Levein, Polanski donne un autre versant au précédent Pulsion, filmant la lente et terrifiante destruction du champ intime, la pernicieuse invasion d’une horreur larvée. Celle-ci prend de nombreuses apparences : l’enfant qui grossit le ventre de la pauvre Rosemary, les voisins trop présents, trop « haut en couleur » et surtout une omniprésence d’un hors-champ inquiétant (sons, regards, cadrages) qui s’avance inexorablement vers la mère en devenir. Presque à l’instar d’un certain La Nuit des morts-vivants sorti la même année, Polanski transforme l’habituel cinéma d’horreur en film résolument moderne où le genre se débarrasse des derniers restes de gothisme classique, délaissant les musiques opératiques et les effets chocs, au profit d’une mise en scène plus discrète, d’une langueur plus insidieuse. La jolie petite ritournelle de Christopher Komeda, l’élégance de l’immense bâtisse que va habiter le charmant jeune couple, ne fait que dissimuler les ténèbres qui y sont tapies, laissant entrevoir rapidement quelques fausses notes, des trous mal rebouchés dans le sol où un placard inexplicablement dissimulé derrière une armoire ancienne.
Premier exorcisme
Ce qui va détruire la jolie image virginale du couple moderne est à chercher la construction labyrinthique du décor, dans la fausse normalité de l’image, mais aussi et surtout au sein de ces deux personnages que tout va finalement opposer. Douce et frêle Rosemary face à Hutch comédien en mal de reconnaissance que l’ambition maladive va dévorer et amener à accepter l’inacceptable. Peu importe qu’en toile de fond il y soit question de satanisme, de sabbat (superbe séquence en déconstruction quasi-giallesque), de possession par le malin, pour Polanski le mal est larvé au cœur de l’humain, au cœur de la dissimulation. Un rien décompose la réalité, une porte cachée prend l’apparence d’une déchirure vers l’indicible, Rosemary’s Baby est un film d’horreur des plus subtiles où chaque pas, chaque dégradation se fait avec une subtilité tétanisante. La plus douloureuse est clairement la déchéance physique de Mia Farrow, d’une beauté renversante et lumineuse au début, finissant dans un état de fébrilité paranoïaque et la mine cadavérique. Une innocence livrée au buché dont le dernier sursaut se révèle aussi désarmant que fataliste, alors qu’autour d’elle le monde se transforme en tableaux macabre (la chorégraphie du cercle), en farce grotesque (le japonais qui prend ses photos). Là encore pourtant, c’est l’invisible qui traumatise l’écran.
Image
Déjà appréciée en Bluray, la superbes restauration 4K supervisée par Polanski en personne, revient au format UHD pour un rendu plus pointu et riche encore. Les techniciens ont réussi à nettoyer entièrement l’image de la moindre tache, trace ou griffure (excepté les images du générique), pour lui insuffler une vitalité incroyable. Propre, net, le master fait surtout renaitre sur chaque photogramme les couleurs originales avec une vigueur surprenante, jouant sur les roses, les verts et les blancs crème avec une superbe précision et un sens du contraste indéniable accentué par le traitement Dolby Vision. Une jeunesse renouvelée, reposant avec force sur un piqué pointilleux (les détails des textures, des costumes, des visages…) et une restitution délicieusement organique laissant apparaitre un grain de pellicule des plus charmants et surtout un respect délicat de la douceur voulue de la photographie originale. Splendide.
Son
Pas de changement par rapport au Bluray l’éditeur glisse à nouveau ici le même Dolby True HD pour la version originale. Une prestation sobre, claire et ferme pour une source mono d’origine qui réussit même à créer par moments une légère sensation de profondeur. La version française en Dolby Digital 2.0, s’en sort elle beaucoup moins bien avec une piste fatiguée et platement pausé. Le doublage lui témoigne à nouveau de cette époque où l’exercice était fait avec sérieux.
Interactivité
Manifestement, il va falloir faire le deuil des suppléments alléchants de l’édition américaine de Criterion : un Making of rétrospectif de presque une heure, une longue interview radio du romancier Ira Levin et un imposant documentaire sur le compositeur Krzysztof Komeda.
A la différence de la sortie française sortie en 2013, cette édition propose tout de même deux suppléments plutôt intéressants. Le premier est un petit making of datant sans doute de l’ère DVD (et donc en SD), où le producteur, le réalisateur et quelques autres intervenants, se remémorent le lancement du projet (Polanski voulait tourner un film sur le ski), le choix au départ discuté de Mia Farrow, le tournage et la sortie du film. Sobre mais efficace au vu de sa durée forcément trop courte.
Le second item est un reportage tv datant de 1968 qui s’intéresse à la collaboration entre l’actrice et son cinéaste. Accompagnés uniquement d’images des coulisses, ceux-ci se racontent en voix off et reviennent sur la création du personnage, leurs rapports avec le casting, la création du personnage, l’atmosphère du film… Précieux forcément.
Liste des bonus
Making of (17’), Mia et Roman (23’), Bande-Annonce 50ème Anniversaire.