RON DÉBLOQUE
Ron’s Gone Wrong – Etats-Unis, Royaume-Uni, Canada – 2021
Support : Bluray
Genre : Aventure, Comédie, Animation
Réalisateurs : Sarah Smith, Jean-Philippe Vine, Octavio E. Rodriguez
Acteurs : Jack Dylan Grazer, Zach Galifianakis, Ed Helms, Olivia Colman, Rob Delaney, Justice Smith, …
Musique : Henry Jackman
Durée : 107 minutes
Image : 2.39 16/9
Son : Anglais DTS-HD Master Audio 7.1, Français Dolby Audio DD+ 7.1
Sous-Titres : Français, Anglais, Allemand…
Éditeur : 20th Century Studios
Date de sortie : 25 février 2022
LE PITCH
Collégien en mal d’amitié, Barney reçoit pour son anniversaire un B-Bot, un robot connecté à la mode que tous ses camarades de classe s’arrachent. Il baptise la machine Ron mais celle-ci, endommagée, est incapable de lancer son programme et va bouleverser son existence, …
Short circuit
Une histoire d’intelligence artificielle qui dérape, ce n’est pas vraiment nouveau et Ron débloque, première production de la toute jeune structure Locksmith Animation, tente de se démarquer de ses pairs en épinglant le rôle souvent néfaste des objets connectés et des réseaux sociaux sur la sociabilisation des jeunes générations. S’appuyant sur un propos noble qui fait parfois mouche et des références solides, le résultat est malheureusement étouffé par une gestion du rythme catastrophique et une frénésie à la limite du supportable.
Bien qu’elle partage ici le crédit de la réalisation avec Jean-Philippe Vine et Octavio E. Rodriguez, deux transfuges de Pixar, Sarah Smith est bel et bien la véritable force créative derrière Ron débloque. Issue de la comédie radio et télé (mais pas que), la britannique aux mille casquettes, réalisatrice, scénariste et productrice, s’est lancée dans l’animation en 2004 avec I Am Not An Animal, programme culte diffusé sur la BBC Two où des animaux sauvés des mains cruelles de la science racontent leur histoire sur un ton satirique. Ce succès d’estime la mène aux portes des studios Aardman de Peter Lord, Nick Park et David Sproxton. Sous contrat, elle assure la réalisation avec Barry Cook de Mission : Noël en 2011 et elle participe l’année suivante à l’écriture et à la production des Pirates ! Bons à rien, mauvais en tout. Joli CV. Mais Sarah Smith voit un peu plus grand et veut son indépendance. À cet effet, elle lance en 2014 Locksmith Animation avec une participation financière d’Elizabeth Murdoch, fille du magnat de la presse. Premier problème, un partenariat avec Paramount tourne court à la défaveur d’un changement de direction. Second problème, le nouvel allié 20th Century Fox est bouffé tout cru par Disney durant la production de Ron débloque et Smith est forcée de se tourner vers un troisième studio, Warner. Point d’orgue de cette valse des studios, la pandémie de COVID-19 retarde la sortie de Ron débloque qui débarque finalement dans des salles qui peinent à se remplir de nouveau. Entre temps, en juin 2021, Smith paie le prix de ces débuts chaotiques et cède sous la pression son fauteuil de présidente de Locksmith Animations à Natalie Fischer, ancienne directrice d’Illumination Entertainment (Moi, moche et méchant). Et cette agitation en coulisses de produire son effet, pas loin d’être désastreux, sur la conception de Ron débloque, projet pourtant très personnel et que Sarah Smith a tenu à mener à son terme.
Très haut débit
Les aventures de Barney, le collégien solitaire et craintif, vivant très mal la honte que sa drôle de famille lui inspire chaque jour de plus en plus, et de Ron, robot (dé)connecté apprenant l’amitié sans avoir recours aux algorithmes faisant la fierté de son créateur, souffrent considérablement des accélérations de sa narration, écrasant les vingt premières minutes dans un vacarme pachydermique. Non seulement la réalisation préfère se concentrer sur le son et lumière perpétuel des B-Bots, dans un drôle de réflexe publicitaire qui souligne à la truelle la mise en boîte d’Apple et de ses produits pour fashion victimes, plutôt que sur des personnages déjà très caricaturaux et qui peinent à exister. Malgré un léger ralentissement à mi-parcours, Ron débloque ne prend jamais vraiment le temps de respirer et de laisser ses enjeux se développer dans le calme, pas aidé non plus par le score casse-bonbons d’Henry Jackman et son thème principal qui donne envie de s’enfoncer un tournevis dans les oreilles. Quant à l’émotion, elle est le plus souvent tuée dans l’œuf au profit d’un humour mitraillette assez peu inventif et qui se contente d’accumuler les chutes, les baffes et les répliques de sitcom.
À l’origine, les ambitions de Sarah Smith et de son équipe étaient pourtant toutes autres et le produit final en conserve quelques traces. Très intelligemment, Ron débloque prolonge certaines des thématiques de A.I., Intelligence Artificielle et réaffirme l’impossibilité de traduire des sentiments humains par une formule mathématique, une équation ou un programme informatique. Spielberg abordait l’amour d’un enfant pour sa mère et Sarah Smith nous parle pour sa part d’amitié et rend un autre hommage au papa des productions Amblin en calquant son intrigue sur celle d’E.T.. Mais ce n’est pas tout. Ron débloque aborde aussi, très brièvement, la tragédie du harcèlement en ligne avec le sort réservé au personnage de Savannah, influenceuse en herbe dont la chute de popularité lui impose de se réfugier sous sa couette, victime d’accès de terreur. On trouvera enfin des références à Wall-E (forcément !), au Short Circuit de John Badham et à la rivalité parfois très fantasmée entre Steve Jobs et Steve Wozniak.
Sur le papier, Ron débloque promettait de beaux instants de science-fiction. Il n’en reste que des miettes, sacrifiées sur l’autel de la concurrence acharnée et braillarde que se livrent les studios d’animation, courant encore et toujours après le génie de Pixar, parfois avec succès, le plus souvent avec des produits vite vus, vite oubliés.
Image
Images de synthèse obligent, la copie numérique est de toute beauté et l’accent est mis sur les sources de lumières et les couleurs artificielles des surfaces à led des B-Bots. On voudrait bien y trouver un défaut quelconque mais ils n’ont pas été inclus dans la programmation de ce bluray de compétition.
Son
Tous les mixages font la course en tête avec un tourbillon d’effets incessant, une piste musicale rutilante et des dialogues qui se baladent d’une enceinte à l’autre avec un naturel étourdissant.
Interactivité
La « discussion » entre Zach Galifianakis et Jack Dylan Grazer reste dans les clous de la promotion lambda et se révèle dépourvu du moindre intérêt. Le making-of, trop court, parvient néanmoins à donner la parole aux principaux artistes et à laisser la réalisatrice dégager une note d’intention pertinente. Un petit exploit en soi dans le monde impitoyable des featurettes produites à la chaîne.
Liste des bonus
« Un garçon et son B-Bot : quand Jack rencontre Zach » (3 minutes, VOST), « Débloquer Ron » (16 minutes, VOST), Bande-annonce.