RIO BRAVO
Etats-Unis – 1959
Support : UHD 4K & Bluray
Genre : Western
Réalisateur : Howard Hawks
Acteurs : John Wayne, Dean Martin, Ricky Nelson, Angie Dickison, Walter Brennan, Ward Bond, John Russell…
Musique : Dimitri Tiomkin
Image : 1.85 16/9
Son : DTS HD Master Audio 2.0 mono anglais, Dolby Digital mono français, allemand, italien…
Sous-titres : Français, italien, allemand, espagnol…
Durée : 141 minutes
Éditeur : Warner Bros. Entertainment France
Date de sortie : 6 décembre 2023
LE PITCH
John T. Chance, shérif d’une petite ville du Texas, arrête pour meurtre Joe Burdette. Le frère de Burdette, puissant propriétaire terrien, va tout faire pour sortir son frère de prison. Pour lutter contre Nathan Burdette, le shérif est aidé par Dude, un alcoolique et Stumpfy, un vieil infirme…
Trois cowboys dans la ville
Western hollywoodien rime inévitablement avec Rio Bravo, classique parmi les classiques, et quintessence d’un genre vivant ses dernières grands instants sobrement conventionnels, légendaires presque. Rio Bravo n’est pas un western. C’est LE western.
Le troisième western d’Howard Hawks, après La Rivière rouge (1948) et La Captive aux yeux clairs (1952), nait ainsi à la fin de la décennie considérée par tous les cinéphiles comme l’âge d’or du western à l’ancienne. Celui célébrant les figures virils, un certain manichéisme, entièrement tourné vers l’héroïsme, les grands paysages, le spectacle pour tous et la célébration d’une nation encore naissante. Mais déjà le déclin pointe le bout de son nez avec une présence de plus en plus envahissante des grandes séries télévisées (Au nom de la loi et Rawhide sont les nouvelles références) et d’une remise en question de plus en plus prégnante des valeurs du genre. Parmi ceux-ci il y a bien entendu Le Train sifflera trois fois de Fred Zinneman détesté politiquement par Hawks et Wayne pour sa vision d’une Amérique peuplée de lâches et d’égoïstes. Conçu comme une réponse directe à ce dernier, avec d’ailleurs au moins un dialogue qui y fait directement référence, Rio Bravo est peut-être aussi, et avant tout, habité par une volonté d’entériner une certaine idée du western, de la graver définitivement dans le marbre, pour toujours, avant qu’elle ne disparaisse. Le film n’apporte donc absolument rien de bien neuf, que ce soit son histoire ultra prévisible et déjà aperçue des centaines de fois, ses personnages tous extirpés des stéréotypes attendus, ni même d’une mise en scène volontairement effacée, sans grand moment de bravoure ultra spectaculaires.
La charge héroïque
La différence ici se fait non pas sur le cadre, mais sur la manière, pour le coup d’une justesse absolu et d’une maitrise rarement atteinte avant, ou retrouvée par la suite, où les subtilités, les finesses psychologiques par exemple, affleurent par petites touches. John Wayne, figure monolithique par excellence, n’a jamais semblé autant lui-même que dans Rio Bravo, traversant la rue de sa stature immuable, le fusil à la main, le chapeau bien vissé sur la tête, un sourire entendu sur les lèvres, mais il se fait pourtant gentiment et tendrement rabroué par ses proches et en particulier une éclatante Angie Dickson, figure féminin maline et volontaire comme les aime le cinéaste. Le jeune As de la gâchette interprété avec décontraction par Ricky Nelson (venu de la tv justement), le bon vieux bougre incarné avec bonheur par Walter Brenna, ont leur partition à jouer, même si c’est bien souvent Dean Martin qui impulse le ton, troublant, touchant et héroïque dans le rôle de Dude (son plus grand rôle), ancienne gloire de la ville tombée dans un alcoolisme dont il s’efforce de se relever tout au long du film. Un quatuor ultra charismatique dont la bonne entente en coulisse (le tournage aurait été collégialement considéré comme idéal) transpire sur un écran jamais très loin dans ses mécaniques dramatiques et ses échanges (les dialogues sont admirables) d’une scène de théâtre. D’ailleurs Rio Bravo aurait presque des airs de western en chambre, reléguant les vastes paysages d’autrefois aux hors-champs et se resserrant sur une petite poignée de décors reposant uniquement sur un triangle reliant la prison, le bar et l’hôtel de la ville. Pas besoin de plus pour structurer l’histoire, pour faire exister les personnages et pour faire naitre au milieu de la camaraderie générale une authentique montée en tension alors qu’une armée d’hommes de main anonymes semble capable de surgir de chaque ruelle, porte ou fenêtre.
Cette abstraction, John Carpenter s’en souviendra avec pertinence pour son mythique Assaut, et elle résulte de l’incroyable gestion de l’espace installée par Howard Hawks tout autant que de sa fameuse mise en scène, centré sur les protagonistes soit, mais imposant constamment une épure dont l’efficacité confine au génie. Le grand gunfight final, modèle du genre, la lente quête d’un assassin dans un saloon remplis de traitres avec sa rupture rythmique percutante et bien entendu son incroyable ouverture silencieuse, où juste par le cadrage et les regards tous les enjeux sont posés, sont les exemples les plus visibles qui soulignent la souveraineté totale d’un cinéaste sur son art. Plus de soixante ans après, on ne s’en lasse toujours pas.
Image
Même si la galette avait pu faire son effet à l’époque, le Bluray de Rio Bravo date tout de même de 2007, soit plus ou moins les débuts du support, avec un encodage et une précision qui semblent aujourd’hui bien poussiéreux (d’ailleurs pour comparer la galette est disponible dans le présent steelbook). Le passage à la 4K se faisait attendre et s’il n’est vraiment pas sûre que cette remasterisation soit repassée par une restauration à la source, le résultat n’en est pas moins bluffant. Si on excepte les quelques fondus de transition, légèrement bousculés, le reste assure désormais un spectacle éclatant, clair et harmonieux, maitrisant autant les instabilités du Technicolor que la densité du grain et les argentiques. Pointus et précis, les cadres retrouvent au passage leur format initial 1.85 (et non 1.78 comme sur le bluray) et toute la générosité d’une colorimétrie désormais accompagnée par un traitement HDR10 qui intensifie les couleurs et raffermi les noirs. Un sacré voyage dans le temps.
Son
Proposé en DTS HD Master Audio 2.0, le mono d’origine s’impose avec clarté et solidité, préservant son efficacité avant et son coffre assez brut. De rares petites fluctuations lors de certains dialogues rappellent l’âge du film, mais rien de dramatique loin de là. Tout aussi inscrit dans son temps, le doublage français est de grande qualité avec un Dolby Digital Mono plus ronflant et plat, mais honorable.
Interactivité
Proposé dans un steelbook classieux, le disque UHD de Rio Bravo n’est proposé avec comme seul bonus que le fameux commentaire audio enregistré par John Carpenter (qui rappelons-le l’a quasiment remaké dans son Assaut) avec un critique américain. Malheureusement non sous-titré, ce dernier malgré une ambiance un peu vide parfois, délivre tout de même quelques informations sur les coulisses et le dispositif du film.
Pour le reste il faut donc se tourner vers l’ancien Bluray glissé dans l’édition où le retrouve le sympathique reportage dans les studios historiques d’Old Tucson, ainsi que le documentaire rétrospectif réunissant, entre autres, Carpenter, Peter Bogdanovich et Angie Dickinson, afin de replacer le film dans les carrières d’Howard Hawks et de John Wayne, le choix des autres acteurs, l’inspiration de la télévision, l’atmosphère du film et de son tournage et bien entendu sa réception initiale et la stature de référence obtenue au cours des années. Classique mais solide.
Liste des bonus
Commentaire audio de John Carpenter et Richard Schickel (VO), « Commémoration : Rio Bravo et Howard Hawks », « Old Tucson : Sur les pas des légendes », Bande-annonce.