RAGE !

Rabid – Canada – 1977
Support : Bluray & DVD
Genre : Horreur
Réalisateur : David Cronenberg
Acteurs : Marilyn Chambers, Frank Moore, Joe Silver, Patricia Gage, Susan Roman…
Musique : Divers
Durée : 91 minutes
Image : 1.66 16/9
Son : DTS HD Master Audio 2.0 mono Anglais et Français
Sous-titres : Français
Editeur : The Ecstasy of Films
Date de sortie : 04 avril 2019
LE PITCH
Grièvement brûlée à la suite d’un accident, Rose est transportée d’urgence à la clinique du docteur Dan Keloid spécialiste dans la chirurgie esthétique. Ce drame offre l’occasion au médecin d’expérimenter un type de greffe tout à fait nouveau aux conséquences inconnues. La jeune femme reste dans le coma. Il faut la nourrir par injection de sang. À son réveil, elle a pratiquement retrouvé son apparence d’autrefois. Seul détail curieux : son aisselle non cicatrisée présente une plaie étrange. Rose se jette sur un malade et le mord : c’est le début d’une épouvantable épidémie…
Seconde morsure
Souvent proposé en double programme avec le précédent Frissons, produit par la même société Cinépix à qui on doit Ilsa La Louve des SS et quelques slashers comme Bloody Valentine, Rage est une fois encore un film d’horreur centré sur la contagion, sur le débordement du refoulé, prenant l’apparence d’un nouveau parasite vorace.
Exit les vers fouisseurs du premier et les expériences sexuelles communautaires, il est ici question d’un étrange appendice, pénis sertis d’un dard dissimulé sous l’aisselle de la pauvre Rose. Une expérience médicale qui a mal tourné (une grande marotte de Cronenberg de son semi-amateur Stereo au plus que troublant Faux Semblant) dans une clinique de chirurgie esthétique déjà habitée par une autre forme de morts-vivants… L’ironie glacée du metteur en scène est constamment présente, tout comme son regard fataliste sur l’issue apocalyptique de cette épidémie transformant les habitants de Montréal en zombies citant ouvertement le cinéma de George A. Romero. Si la société de production est alors un spécialiste des films d’horreur à petit budget, que l’utilisation de la musique souligne essentiellement les jaillissements terrifiants et que l’imagerie générale renvoie à une version malade d’une princesse vampire, Rage n’est cependant pas une simple série B classique… Loin de là. Le cinéma en devenir de Cronenberg y pulse déjà à chaque séquence, avec en premier lieu cette mutation corporelle improbable, voir grotesque, véritable exportation freudienne des pulsions nymphomanes de la femme prédatrice. Des prémices de la « Nouvelle chair » (Videodrome) et des analyses psychanalytiques profondes (Spider, A Dangerous Method) qui, comme toujours chez Cronenberg, prennent corps sous une forme monstrueuse et mutante.
Pasteurisé
Subtilité, ce monstre a ici les traits de « girl next door » de Marilyn Chambers, actrice porno chic au cœur de l’important Behind The Green Door, qui amène ainsi astucieusement une véritable fragilité de tueuse ne pouvant réprimer sa nature et une sensualité évidente, écho d’une Elisabette Bathory sans artifices. Malin, le cinéaste mêle constamment les deux tableaux, comme les références gothiques et le réalisme quasi-documentaire, pour la transformer en victime sacrificielle, rejeton d’une société trop puritaine. Pas étonnant dès lors que les attaques de Rose, sur une jeune femme dans un jacuzzi, un client de cinéma porno ou un routier, s’achèvent systématiquement dans une étreinte orgasmique, laissant les nouveaux infectés agars et furieux. Avec sa mise en scène directe et sobre, mais indéniablement déjà maitrisée, Rage ressemblerait presque à un portrait amoureux d’une femme lancée dans la quête désespérée d’une certaine forme d’affection, de chaleur, dans un monde médicalement froid et dont la seule et unique réponse sera finalement un retour à la loi martiale et l’évacuation d’un corps dérangeant comme un détritus de plus. Premier jalon d’une branche de l’évolution humaine, la créature finit une nouvelle fois sa course en figure tragique, preuve de l’humanisme profond et sensible de de David Cronenberg, qu’il dissimule toujours derrière cette pudeur gore qui en déroute plus d’un.
Image
Encore une jolie performance pour The Ecstasy of films qui nous a dégotté le dernier, et très impressionnant, master en date pour le film. Une restauration complète et soignée à partir d’un scan 2K du négatif original avec un format 1.66 qui retrouve, enfin, le cadre voulu au départ par Cronenberg. Doté désormais d’une colorimétrie souple et équilibrée, de noirs impeccablement tenus, d’un grain de pellicule organique et maitrisé, le master permet véritablement de redécouvrir le film dans des conditions optimales, prenant alors une légère distance avec ses origines modestes. La photographie est ainsi bien plus belle et chaleureuse que dans nos souvenirs.
Son
Le même soin a été apporté à la piste mono d’origine qui se pose ici avec une clarté constante, un équilibre bien placé et une jolie fluidité entre les dialogues, la musique et les effets. Plus aucun chuintement ou effets de saturation à noter, le tout est qui plus est installé sur un DTS HD Master Audio 2.0 des plus confortables. Forcément en dessous, la version française est plus plate et moins généreuse, comme souvent.
Interactivité
Coup double pour l’éditeur français qui en même temps que Re-Animator propose le second « grand » film de David Cronenberg dans un élégant médiapack avec deux visuels disponibles sur le site (l’affiche française ou l’affiche canadienne) comprenant en son centre un joli livret bourré de photos promotionnelles mais aussi agrémenté d’un intéressant entretien avec l’actrice Marilyn Chambers. Le Bluray et le DVD ne sont pas en reste et compilent quelques suppléments croisés parfois sur d’ancienne édition DVD, parfois sur les galettes anglaise ou canadienne. Ces derniers en particulier amènent un double commentaire audio du réalisateur, au contenu quasiment identique, mais que le cinéaste effectue en anglais ou en français québécois. Plutôt sympas, même si comme pour l’interview filmée, le réalisateur évoque uniquement les questions de productions et les choix techniques, plutôt qu’artistiques, et avec une distance légèrement froide. Les fans de ce dernier ne seront sans doute pas étonnés. La section bonus est en outre parfaitement complétée par une interview du maquilleur Joe Blasco qui se remémore ses travaux sur Frissons (accepté uniquement pour travailler avec Barbara Steele) et Rage, tandis que la journaliste Kier La Janisse revient sur les grandes années de la Cinepix et du cinéma de genre Canadien.
Liste des bonus
Livret 32 Pages incluant une interview carrière de Marilyn Chambers par Calum Waddell, Commentaire audio de David Cronenberg, Interview de David Cronenberg (25’), L’héritage incisif de la CINEPIX par l’historienne et productrice Kier La Janisse et par le maquilleur SFX Joe Blasco (15’), Joe Blasco, les années Cronenberg (27’), Bandes annonces.