PROJECT WOLF HUNTING
Neugdaesanyang – Corée du Sud – 2022
Support : Blu-ray & DVD
Genre : Horreur
Réalisateur : Kim Hong-Sun
Acteurs : Seo In-Guk, Jang Dong-Yoon, Jung So-Min, Choi Gwi-Hwa, Sung Dong-Il, Park Ho-San, …
Musique : Kim Jung-Sun, Jo Ran
Durée : 122 minutes
Image : 2.39:1, 16/9ème
Son : Coréen & Français DTS-HD Master Audio 5.1
Sous-Titres : Français
Éditeur : ESC Distribution
Date de sortie : 7 juin 2023
LE PITCH
Transférés depuis les Philippines vers la Corée du Sud par un navire cargo, plusieurs dangereux criminels provoquent une violente émeute et s’évadent avec l’aide de complices. Mais ce déchaînement de violence va provoquer le réveil d’un monstre enfermé dans les entrailles du navire …
La Croisière s’amuse
Avec une régularité infaillible, le Pays du Matin Calme poursuit ses livraisons de péloches vénères et imprévisibles. Dernier uppercut en date, Project Wolf Hunting du quasi-inconnu Kim Hong-Sun, croisement gore et improbable (mais aussi très imparfait) entre Les Ailes de l’Enfer de Simon West et un épisode oublié de la saga vidéoludique Resident Evil sur un paquebot perdu au milieu de la mer de Chine. Attention aux éclaboussures !
Violence, sadisme et noirceur ont beau faire partie intégrante du cinéma sud-coréen (il s’agit même d’une de ses composantes majeures, voir Old Boy, J’ai rencontré le diable et consorts), le gore à la sauce Category III demeurait jusqu’à présent un terrain en friche, en cause la frilosité du public local pas franchement acquis aux débordements grand-guignolesques. De son propre aveu, le scénariste et réalisateur Kim Hong-Sun a quelque peu hésité avant d’ouvrir les vannes et de transformer ce qu’il envisageait d’abord comme un actionner bourrin à la sauce Bruckheimer en grand barnum sanglant où les crânes explosent et où les jugulaires sont déchirés à la main ou à l’arme blanche. En faisant le choix de pimenter son ragoût à base de truands ultra-violents par l’irruption à mi-parcours d’une créature de Frankenstein au carrefour de l’Arme X des comics de Barry Windsor-Smith, du Predator de la franchise du même nom, des zombies du signore Fulci et du Garrador de Resident Evil 4 (les fans apprécieront), Kim Hong-Sun s’est incliné devant l’évidence : quitte à plonger la tête la première dans les joies du bis qui tâche, autant faire couler le sang à flots. Une façon comme une autre de se faire plaisir et de se distinguer après une poignée de thrillers et de films d’action trop sages et de séries TV très fleurs bleues.
De fait, dès que Project Wolf Hunting démarre les hostilités avec une évasion collective qui tourne vite à la boucherie la plus barbare qui soit, il semble impossible pour le cinéaste de calmer ses ardeurs et d’appuyer sur le frein. À l’instar de ses prisonniers qui trépignent comme des lions en cage avant de pouvoir passer à l’action, Kim Hong-Sun défait ses menottes, pratique la fuite en avant et s’interdit la moindre frustration. Vous voilà prévenus.
Battle Royale
Mais la générosité du bouzin s’accompagne également de bon nombre de maladresses typiques de notre époque. Kim Hong-Sun n’a pas la maîtrise d’un Na Hong-Jin, d’un Bong Joon-Ho ou d’un Park Chan-Wook et son film souffre d’une charte graphique à la Netflix qui pique parfois un peu les yeux, entre abus de filtres numériques verts, jaunes, bleus et rouges, scénographie brouillonne, montage qui s’emballe souvent sans raison et cadres aléatoires shootés caméra à l’épaule. D’autant plus regrettable que certaines scènes laissent entrevoir un vrai potentiel, comme cette fusillade tendue dans le cadre exigu du poste de commande du paquebot.
Autre effet secondaire de la boulimie de l’auteur, le scénario qui, en dépit d’un point de départ pourtant limpide, a une fâcheuse tendance à se prendre les pieds dans le tapis avec une galerie de personnages trop nombreux et pas assez développés. Ce qui nous mène à un troisième acte bordélique entre des flashbacks explicatifs balancés un peu n’importe comment et un complot à base de surhommes où la volonté de placer les pions d’un univers étendu (un prequel et une suite figurent déjà parmi les projets de Kim Hong-Sun) compliquent inutilement les enjeux.
On pardonnera volontiers ce qui ressemble fortement à des excès d’enthousiasme par le plaisir évident que l’on retire de cette série B jouissive. Car Kim Hong-Sun a eu la bonne idée de privilégier des SFX à l’ancienne (latex et hectolitres de faux sang!), de déjouer avec malice certaines attentes (non, malfrats et policiers ne vont pas unir leurs forces face au monstre et tout le monde peut y passer d’un moment à l’autre) et de transformer Seo In-Guk, star de K-Pop pour midinettes, en psychopathe au corps sculpté et couvert de tatouages et incapable de se défaire de son sourire de tueur pervers, qu’il prenne une correction de la part d’un inspecteur de police zélé ou qu’il soit sur le point de … bref, vous l’aurez compris, la star vampirise l’écran à chacune de ses apparitions avec une vraie insolence cool. Les films de sales gosses capables de tenir (presque) toutes leurs promesses constituant une espèce en voie de disparition, il serait bien malvenu de bouder le mauvais goût tout à fait délicieux de ce Project Wolf Hunting. Allez, t’as gagné Kim, on attend la suite !
Image
Chapeau bas à la définition et à la compression qui déjouent tous les pièges d’une colorimétrie qui frôle l’overdose de filtres en tous genres. Détails et profondeur de champ assurent la bonne tenue d’un master immaculé, de jour comme de nuit, en intérieur comme en extérieur, tournage en numérique haute-définition oblige.
Son
Deux mixages DTS qui rivalisent de puissance mais aussi de subtilité avec un découpage multicanal forcément très attentif aux innombrables effets sonores de chairs déchirés, tordus ou éventrés et à une bande-son « à la Hans Zimmer » avec basses profondes à la clé. La version originale est à privilégier pour davantage de profondeur avec le bruit très distinctif de la pluie qui frappe sur la coque du paquebot et des dialogues moins plaqués à l’avant.
Interactivité
Comme pour The Sadness et Terrifier 2, ESC a redoublé d’efforts pour offrir aux amateurs un contenu qui soit le plus riche et le plus exclusif qui soit. Bon, pas de box collector ou de 4K Ultra HD pour cette fois-ci mais il reste quand même pas mal de trucs à se caler sous les chicots. Réalisée via Zoom (depuis le COVID, même les bonus vidéo se mettent au télétravail!), l’entretien avec le réalisateur Kim Hong-Sun couvre à peu près tous les aspects de la production de Project Wolf Hunting, de l’écriture à son exploitation en salles et en festivals, avec un enthousiasme tout à fait sincère. Mark Godin de Technikart et Stéphane Du Mesnildot des Cahiers du Cinéma prennent le relais pour deux entretiens (filmés, semble t-il, dans la cale d’un bateau!!) qui ont tendance à se recouper même si le second se veut plus précis et analytique que le premier. Stéphane Du Mesnildot remet un peu plus tard le couvert pour des analyses de séquence dont la pertinence et l’intérêt sont pour le moins discutables puisqu’il se contente de paraphraser ce qui passe à l’image. Et on passe à la conclusion avec une poignée de featurettes sur les coulisses et le monstre Alpha et dont la brièveté est compensée par un maximum d’images du tournage.
Liste des bonus
Conversation exclusive Kim Hongsun (22 min), Entretien avec Marc Godin, journaliste chez Technickart (14 min), Entretien avec Stéphane Du Mesnildot, critique aux Cahiers du Cinéma et spécialiste du cinéma asiatique (18 min), 4 analyses de séquences (20 min), Module en coulisses (4 min), Module sur le personnage d’Alpha (2 min), Galerie de projets d’affiches (1 min), Bande-annonce (1 min).