PAPILLON
Etats-Unis, France– 1973
Support : UHD 4K
Genre : Aventure, Drame
Réalisateur : Franklin J. Schaffner
Acteurs : Steve McQueen, Dustin Hoffman, Victor Jory, Don Gordon, Anthony Zerbe, Robert Deman…
Musique : Jerry Goldsmith
Image : 2.35 16/9
Son : Anglais et français DTS HD Master Audio 5.1 et 2.0
Sous-titres : Français
Durée : 150 minutes
Éditeur : LCJ Editions
Date de sortie : 2 octobre 2024
LE PITCH
Papillon est condamné au bagne de Cayenne à perpétuité pour un meurtre qu’il n’a pas commis. Son seul espoir : l’évasion. Sur le navire qui l’emmène à Cayenne, il se lie d’amitié avec le faussaire Louis Delga. L’un possède la force physique, l’autre le pouvoir de l’argent. Après plusieurs tentatives d’évasion avortées et des conditions de détention infernales, Papillon réussira enfin à s’échapper sur un simple sac de noix de coco…
à tire-d’aile
Grand classique du cinéma de prison, ou d’évasion, Papillon fête dignement ses 50 ans, écrasant sans effort son pitoyable remake de 2017 (qui s’en souvient encore ?). Un drame spectaculaire porté par un énorme duo d’acteurs, Steve McQueen et Dustin Hoffman, et l’assurance de la mise en scène du solide Franklin J. Schaffner.
Si effectivement le cinéaste américain n’a jamais fait montre de grandes ambitions auteurisantes, voire même a véritablement été à l’origine d’une production, il y avait une évidente logique à lui confier cette adaptation du roman « autobiographique » de l’ardéchois Henri Charrière rescapé du bagne de Cayenne, lui qui avait justement signé cinq ans plus tôt une autre adaptation d’un texte français avec La Planète des singes. Au-delà de la petite particularité hexagonale, ce qui rapproche surtout les deux écrits et donc leurs adaptations, c’est cette illustration d’un homme moderne, civilisé, propulsé dans un monde sauvage et dangereux, une prison à la fois écrasante et vaste, dont il ne semble jamais pouvoir s’échapper. Le caractère très particulier du célèbre bagne français et les terrible traitements qu’il faisait subir à ses prisonniers (travail forcé, sous-alimentation, absence totale d’hygiène, séjours de plusieurs années au mitard…) valent bien quelques expérimentations en cage par des primates évolués. D’ailleurs si le film Papillon évite très judicieusement toute glamourisation hollywoodienne, scrutant frontalement la crasse, l’avilissement des corps et l’effritement des esprits aux cours des années, il a aussi une belle tendance à s’extirper d’un réalisme total. Une scène de rêve symbolique où l’esprit de Papillon s’échappe durant un séjour de deux ans dans le silence et le noir de sa geôle, mais aussi, au-delà de l’évasion, des visites décalées, presque oniriques et hors du temps, dans le village de reclus lépreux (faisant penser directement aux rescapés de la zone interdite de La Planète des singes) ou au sein de celui d’autochtones insondables.
Les enchainés
Si déjà le récit d’Henri Charrière était ouvertement romancé, son adaptation par Douglas Trumbo (Johnny s’en va en guerre, Spartacus…) glisse vers le film de survivant, le portrait d’un homme écrasé par des rouages absurdes et inhumains qu’il ne cessera jamais de combattre en s’efforçant constamment de fuir pour retrouver une liberté interdite. Au sommet de sa carrière (période Bullit, L’Affaire Thomas Crown, Guet-Apens et La Tour infernale…), Steve McQueen est certes encore une fois un homme d’action, un anti-héros puissant, mais il offre aussi à son personnage, plus heurté par la vie et de plus en plus atteints par le temps et les mauvais traitements, un jeu plus faillible et fiévreux qu’à l’accoutumé. A ses côtés, contre-point autant physique que professionnel (leurs méthodes d’acting opposé auraient provoqué quelques frictions sur le tournage) Dustin Hoffman, alors en pleine ascension, offre le portrait touchant d’un arnaqueur moins glorieux, mais à l’origine d’une amitié aussi touchante que profonde magnifiquement mise en valeur par la musique éloquente du grand Jerry Goldsmith. Deux acteurs admirables dont l’intensité aura été facilité par les conditions parfois extrêmes du tournage, et la chaleur suffocante de la Jamaïque. Un paysage, une torpeur, une grandeur naturelle constamment mise en valeur par la photographie resplendissante de Fred J. Koenekamp (Patton) et la réalisation diablement efficace de Schaffner aussi dense dans la fameuse séquence d’évasion centrale, admirablement orchestrée, que dans les longues phases d’attentes, de souffrances et d’expectatives.
Toujours aussi spectaculaire, toujours aussi fort et terriblement humain, Papillon n’a pas volé son statut de classique du genre, ancêtre à la fois du survival moderne et cru et du drame plus vibrant façon Les Évadés de Darabont.
Image
C’est une première mondiale, le matériel diffusé par l’ayant droit américain n’ayant pas été jugé suffisant par LCJ, c’est l’éditeur français qui a directement commandité cette nouvelle restauration 4K. Une très bonne surprise qui vient redonner un vrai coup de jeune au film, non pas en le dénaturant mais bien en préservant ses caractéristiques de couleurs, d’ombres, de textures, mais aussi la légère douceur de sa photographie. Quelques courts plans épars rappellent l’âge du métrage (la séquences de la tempête en mer, la fuite dans la jungle en pleine nuit…) mais la définition se montre particulièrement intense, avec des plans riches en détails et en matières, dotant les plans d’une superbe profondeur et de reflets argentiques particulièrement élégants.
Son
Que ce soit la version originale ou la version française (d’époque), chacun est disponible soit dans des DTS HD Master Audio 2.0 francs et directs, tout à fait proches des sensations premières, soit dans des DTS HD Master Audio 5.1 un poil plus moderne avec quelques sensations d’enveloppement naturelles et efficaces. Si la version anglaise est bien entendue beaucoup mieux équilibrée et intense dans son jeu, le doublage est d’excellente qualité et doté de très bonnes prestations.
Interactivité
On peut regretter de ne pas retrouver sur cette édition les anciens suppléments découverts sur le Bluray de TF1 Vidéo (largement épuisé depuis un bon moment), mais LCJ s’efforce de combler le vide en proposant trois entretiens totalement inédits et plutôt copieux.
Directeur de l’unité cinéma d’Arte, Oliver Père livre une présentation classique mais très complète du film, traversant les origines littéraires, les premières approches françaises (avec Belmondo, voir Delon) puis la production américaine avec pas mal d’infos et toujours un petit regard analytique bienvenu. Il passe ensuite le relais à Samuel Blumenfeld qui aborde principale le métrage par le prisme de la carrière et la personnalité du grand Steve McQueen. Sa fascination manifeste pour l’acteur ne l’empêche pas d’assurer un regard tout aussi aiguisé sur le style de Franklin J. Schaffner, là où justement Olivier Père voyait surtout un mercenaire doué.
Enfin le programme s’achève par une rencontre avec Vincent Didier, auteur de la biographie Papillon Libéré qui forcément s’attache à retracer la vie de ce personnage hors-norme, ancien délinquant et proxénète, prisonnier indomptable, restaurateur rangé et romancier à succès. Il discute aussi les éléments plus ou moins romancés de son livre et passe finalement assez rapidement sur un film, pour lui très éloigné des faits.
Liste des bonus
« Franklin Schaffner, un cinéma de l’individualité » : Entretien avec Olivier Père (42’), Entretien avec Samuel Blumenfeld, évocation de la carrière de Steve McQueen (28’), « Henri Charrière dit Papillon, un auteur libre » : Entretien avec Vincent Didier, biographe d’Henri Charrière (52’).