NAPOLI SPARA ! & LE CONSEILLER
Napoli spara ! / Il consigliori – Italie, Espagne – 1977 / 1973
Support : Bluray & DVD
Genre : Poliziottesco, film de mafia
Réalisateur : Mario Caiano, Alberto De Martino
Acteurs : Leonard Mann, Henry Silva, Jeff Blyn, Massimo Deda, Martin Balsam, Tomas Milian, Francisco Rabal, Dagmar Lassander
Musique : Francesco De Masi, Riz Ortolani
Durée : 91 et 102 minutes
Image : 1.85 et 2.35 16/9
Son : Italien DTS HD Master Audio 2.0 mono
Sous-titres : français
Editeur : StudioCanal
Date de sortie : 26 mai 2021
LE PITCH
Napoli spara ! voit le commissaire napolitain Belli (Leonard Mann) en découdre avec Santoro (Henry Silva), criminel notoire agissant en toute impunité dans une ville gangrénée par la violence et la corruption…
Dans Le conseiller, nous sommes plongés dans les méandres de la mafia italo-américaine, de San Francisco à Palerme, où une guerre y fait rage suite au départ de Thomas (Tomas Milian) de l’Organisation de Don Antonio (Martin Balsam). Garofalo (Francisco Rabal) veut profiter de la « faiblesse » du Don pour prendre sa place.
The Italian Connection
La collection Make my day de Jean-Baptiste Thoret nous permet de découvrir deux nouveaux poliziottesci inédits en DVD, après la sortie mi-figue, mi-raisin de l’emblématique Témoin à abattre en janvier dernier. Bien que Napoli spara ! et Le conseiller ne soient pas les fleurons du genre, ils le symbolisent parfaitement et sont portés par des acteurs incontournables comme Tomas Milian, Henry Silva ou Martin Balsam.
Les sorties successives de L’inspecteur Harry et French connection en 1971, puis du Parrain en 1972, amorcèrent indirectement la naissance d’un nouveau genre dans le cinéma Bis italien, toujours prêt à créer un filon pour l’exploiter jusqu’au bout… En l’occurrence, Napoli spara ! fait partie des derniers soubresauts du néo-polar italien, le genre commençant sérieusement à décliner en 1977. Réalisé par Mario Caiano, qui sortira trois autres polars (A toutes les voitures de police, Milano violenta et Antigang), ce film s’inscrit totalement dans le genre à plus d’un titre. Par exemple, le commissaire Belli, joué par l’américain Leonard Mann qui œuvra dans le western (Ciak Mull, Les pistoleros de l’Ave Maria…) et le polar italien (Copkiller, Tireur d’élite…), n’est autre qu’une reprise du personnage de Franco Nero dans Le témoin à abattre, sorte d’inspecteur Harry italien. Nous retrouverons aussi ce commissaire iconique, sous les traits de Maurizio Merli, dans d’autres films comme Rome violente, Opération jaguar et Opération casseurs (Napoli violenta) qui inspira Napoli spara ! Et le méchant de service n’est autre que Henry Silva, figure incontournable du genre (La mala ordina, Il boss, La rançon de la peur…), qui comme toujours assure le job avec charisme et décontraction.
Le film de Caiano peut ainsi également être vu comme une suite du Napoli violenta de Lenzi, reprenant le décor urbain de la cité connue pour sa criminalité et la présence de la Camorra, le personnage du commissaire, un thème de musique traditionnel ainsi qu’un gamin des rues, Gennarino (Massimo Deda), qui survit grâce à ses escroqueries et sa gouaille. Un personnage qu’on imposa à Caiano, dans le but d’attendrir le public…
Muni d’un scénario des plus légers, Assaut sur la ville (le titre français) ne souffre d’aucun temps mort, multipliant les tableaux criminels allant de braquages de banque ou de train, à des kidnappings ou assassinat d’enfants, en passant par la castration d’un pédophile ou encore un coup de pied dans le ventre d’une femme enceinte ! Une violence cruelle, et parfois quasi cartoonesque, qui fut souvent l’ingrédient de base de ces polars « spaghetti » lorgnant vers une idéologie quasi réactionnaire…Notons que Naples figure en très bonne place, d’ailleurs certaines scènes furent tournées sans autorisation dans certains quartiers populaires, à l’instar d’un autre poliziottesco oublié qui mériterait lui aussi une sortie, Camora (Les tueurs à gages) de Pasquale Squitieri.
L’ombre de l’Oncle Sam
Le second film proposé par Studio Canal est d’une tonalité différente, s’inspirant allégrement du Parrain. Datant de 1973, âge d’or du genre, Le conseiller est porté par un trio d’acteurs de grande qualité : l’indispensable Tomas Milian qui après avoir tourné moult westerns sera l’une des principales têtes d’affiche du polar italien (Squadra volante, Flic en jeans, Le clan des pourris…), le grand Martin Balsam (Douze hommes en colère, Little Big Man, Les pirates du métro…) qui, au contraire d’autres stars américaines sur le déclin choisira bien ses films italiens tournant avec des réalisateurs comme Mauro Bolognini ou Damiano Damiani. Et enfin, l’infatigable espagnol Francisco Rabal, qui tourna avec Luis Bunuel, Pedro Almodovar, William Friedkin entre autres, est ici parfait en mafieux ambitieux et déterminé.
Fort d’un budget plus conséquent que la moyenne, Alberto de Martino nous fait voyager au pays de l’Oncle Sam, de San Francisco à Palerme en passant par Albuquerque et le Nouveau-Mexique. Sa peinture de l’organisation mafieuse et de ses codes est délectable, autant que le duo formé par Balsam et Milian, sorte de père et fils unis contre tous, une mitraillette à la main !
La séquence finale, tournée dans un petit village sicilien, vaut le détour rappelant la séquence de l’assassinat de Don Fanucci dans Le parrain 2, sorti deux ans plus tard. Comme dans Napoli spara, l’utilisation des décors italiens amène une plus-value indéniable au film et va à l’essentiel, alors que le film manquait parfois de rythme dans sa partie américaine. Bien que moins droitier que le film de Caiano, Le conseiller succombe aussi à une violence graphique impressionnant comme cette jeune fille victime d’un colis piégé, un homme de main de Don Antonio enfoui dans le béton, ou encore l’assassinat d’un prisonnier à l’ouvre-boîte !
Avant de s’orienter vers le poliziottesco (avec notamment Rome comme Chicago avec John Cassavetes), Alberto De Martino suivit les tendances et passa allègrement du péplum (La révolte de Sparte) au western (Django tire le premier et Providence), puis au fantastique (L’antéchrist, remake de L’exorciste, et Holocaust 2000, avec Kirk Douglas, largement inspiré par La malédiction). En artisan de qualité, sans être génial, il signe ici un film solide qui ravive notre nostalgie concernant ces pellicules Bis italiennes, toujours surprenantes, intéressantes et ne succombant que rarement au happy-end ! Allez monsieur Thoret, il en reste encore beaucoup à sortir de l’anonymat !
Image
Deux master HD de proposés présentant un agréable grain caractéristique des productions d’alors. Les couleurs sont chaudes et malgré quelques images floues et trainées, le rendu est de qualité et permet d’apprécier la qualité de la photographie de Joe D’Amato sur Le conseiller et de Pier Luigi Santi sur Napoli spara !
Son
Deux pistes mono proposées dégageant un son tout à fait correct malgré la postsynchronisation pas toujours de qualité idéale… Seules les versions italiennes sont présentées ici, fait surprenant puisque les films avaient eu le droit à une sortie, certes confidentielle, en France.
L’occasion aussi d’apprécier les superbes B.O. de Francesco De Masi et Riz Ortolani qui comme souvent dans le genre sont excellentes.
Interactivité
Outre les présentations, toujours agréables, des films par Jean-Baptiste Thoret, ramenant les œuvres dans leur contexte et distillant quelques anecdotes, le gros point fort de ces bonus réside dans les interventions de Mario Caiano et Leonard Mann. Le réalisateur et l’acteur principal du film reviennent pendant près d’une heure sur leurs carrières, le genre Poliziottesco et le film Napoli spara !
Entre autres, les deux hommes reviennent sur les conditions difficiles de tournage (qui durait en moyenne une dizaine de jours), parfois entravée par des bandes mafieuses comme à Naples. Ils évoquent aussi le placement de produits fortement suggéré par les producteurs d’alors. Ainsi ne vous étonnez pas de voir brandis ostensiblement paquets de Marlboro ou bouteilles de J&B ! Caiano rappelle également les « budgets de misère » qu’il obtenait pour ses films… Le regret de sa carrière : « Je n’ai jamais eu le temps ! ».
Liste des bonus
Napoli spara !, revu par Mario Caiano et Leonard Mann (69’), Préfaces de Jean-Baptiste Thoret (16’).