MORT OU VIF
The Quick and the Dead – Etats-Unis – 1995
Support : UHD 4K & Bluray
Genre : Western
Réalisateur : Sam Raimi
Acteurs : Sharon Stone, Gene Hackman, Russell Crowe, Leonardo DiCaprio, Tobin Bell, Keith David, Lance Henriksen, Gary Sinise…
Musique : Alan Silvestri
Durée : 107 minutes
Image : 1.85 16/9
Son : Anglais et français DTS HD Master Audio 5.1
Sous-titres : Français
Editeur : L’Atelier d’images
Date de sortie : 15 mars 2022
LE PITCH
John Herod règne tel un tyran sur la petite ville de Redemption où se tient chaque année un tournoi de duels à mort à l’issue duquel la somme de 123.000 dollars est promise au meilleur tireur. Jusque là Herod a toujours empoché la récompense lui-même. Mais lorsque Ellen, une mystérieuse inconnue, déclare vouloir participer à la compétition, les événements prennent une tournure inattendue…
Duels au soleil
Ce devait être la consécration de Sharon Stone au rang de star, la porte d’entrée luxueuse de Sam Raimi dans le cinéma hollywoodien « mainstream », Mort ou vif ne sera finalement que le point final d’un petit revival du western américain. Un échec commercial soit, mais une incroyable réussite artistique, approche cathartique du genre entre épure du mythe et virtuosité de la mise en scène.
Révélée trois ans plus tôt par le retentissant Basic Instinct de Paul Verhoeven, c’est bel et bien Sharon Stone qui a façonné le visage de The Quick and the Dead, petit projet hommage du scénariste Simon Moore, devenue dans la foulée d’Impitoyable, une potentiel grosse production de studio. A l’arrivée de l’actrice le budget grimpe et sa place de coproductrice va même lui permettre d’imposer quelques jeunes acteurs encore méconnus : Russell Crowe, en truand repenti et Leonardo Dicaprio, en jeune loup déjà irrésistible. Et la légende dit même qu’elle aurait payé de sa poche le cachet de ce dernier. C’est elle aussi qui, impressionnée par L’Armée des ténèbres, insiste pour dégotter Sam Raimi, trublion des Evil Dead dont la première tentative au sein d’un studio, Darkman, avait déjà décontenancé les distributeurs. D’évidentes ambitions artistiques pour Stone, mais aussi un besoin viscéral de prendre la distance avec sa figure imposée de prédatrice sexuelle confirmée dans Sliver. Son personnage, femme sans nom surnommée Lady, s’impose magistralement dans un monde de mâle, volontairement stéréotypés, sans jamais lui faire perdre une once de féminité et de profondeur. Une âme vengeresse façon L’Homme des hautes plaines, dont les flashbacks progressifs renvoient bien évidemment à ceux d’Il était une fois dans l’ouest, superbe façon de se réapproprier une iconographie virile, dont le terrifiant et omnipotent Herold (vénéneux Gene Hackman) est le versant le plus extrême, et de la plier à une identité féministe intelligente. Un look d’une classe cinégénique, une séduction maîtrisée, une affirmation sans besoin de long discours, mais tout de même une réaction épidermique et violente au viol d’une jeune fille qui en ravive toute l’humanité.
La gâchette facile
Certainement l’un de ses plus beaux rôles (à égalité avec Basic Instinct et Casino), au service d’un spectacle total, profonde et brillante relecture post-moderne du mythe westernien. Mieux, Mort ou vif est moins un western qu’un fantasme de western, versant réduit à sa partie la plus congrue, le fameux duel face à face, qui se répèterait à l’infini sans jamais perdre de son intensité. Connue pour une mise en scène croisant frénétiquement la liberté du cartoon et la précision du suspens hitchcockien Sam Raimi aborde ici chaque rencontre avec une intention, un effet différent, plaquant le montage sur la percussion des aiguilles de l’horloge, se laissant emporter par des zooms de plus en plus intenses (voir absurdes) ou s’amusant par une succession de travellings compensés à accroitre la distance psychologique entre les deux opposants. Sa réalisation est d’une inventivité constante, célébrant à chaque plan le charisme total d’un casting de rêve (le moindre second rôle est formidable) et les tensions qui nourrissent leurs personnages. Accompagné par une photographie profondément crépusculaire et caniculaire de Dante Spinotti (LA. Confidential, Le Dernier des mohicans), emporté par le souffle héroïque et mélancolique d’Alan Silvestri (une guitare sèche et un coup de fouet), Mort ou vif se plie volontiers à la grammaire de son auteur. Il réussit aussi à croiser l’image d’Epinal classique du western US avec les débordements les plus sordides de son cousin italien, tout en le faisant brutalement entrer dans une modernité baroque, furieuse, parfois presque parodique (inoubliable Lance Henrickson en prétentieux Ace Hanlon), profondément tragique et définitivement jubilatoire.
Image
Si la source même de ce nouveau master 4K reste un peu mystérieuse, il n’en reste pas moins que sa réussite est indéniable. Forcément l’image est d’une propreté exemplaire, stable et solide, mais la définition redonne véritablement une nouvelle dimension au film qui se redécouvre une immense profondeur de champs, un piqué incroyable et une gestion des matières aussi généreuse que fidèle. La différence avec la copie 1080p se fait d’ailleurs en grande partie sur la gestion du grain, très présent, qui a tendance à fourmiller sur l’un, alors qu’il s’intègre parfaitement à l’esthétique rugueuse sur l’autre. Les noirs y sont aussi largement plus maitrisés, plus profonds mais définis, avec une réhausse HDR bien sentie des couleurs, plus saturées et plus riches, et surtout plus chaudes encore qu’avant.
Son
Belle performance avec un DTS HD Master Audio 5.1 percutant (les coups de feu, l’horloge du village…) et surtout plus soutenus qu’avant sur les ambiances : le vents qui s’engouffre dans l’allée centrale, la pluie qui tombe en trombe… Les dialogues sont parfaitement placés, la musique emporte tout sur son passage, mais c’est aussi lorsqu’elle accompagne énergiquement les effets de camera de Sam Raimi et sa gestion de l’espace (superbe utilisation des Surrounds) que la piste se montre indispensable.
Interactivité
Disponible depuis 2018 aux USA, l’UHD de The Quick and the Dead ne brillait cependant pas vraiment par sa section bonus. On y trouvait uniquement une petite poignée de scènes coupées essentiellement tournées vers les fragilités de Lady. Pour l’édition française, L’Atelier d’image les a bien entendu préservé, mais en a aussi profité pour glisser le petit making of promo d’époque, enchainant les interviews des acteurs et présentant quelques images des coulisses.
Bien plus conséquent, le segment « L’Ange de la vengeance » laisse longuement la parole aux journalistes Julien Dupuy et Stéphane Moïssakis qui au cours de leur discussion analysent la relecture des contours du western, le casting royale et l’apport du style de Sam Raimi et la place du film dans sa carrière. Une approche parfaitement complétée d’ailleurs par la petite analyse de séquence (celle du duel entre Kid et son père) démontrant que la stylisation du cinéaste n’est jamais vaine. Enfin si on ne peut que regretter l’absence d’une interview récente de Sharon Stone ou de ses partenaire masculins, l’éditeur français a tout de même réussi à dégotter celle du scénariste Simon Moore. Uniquement en audio (et avec d’énormes soucis de sous-titrage) celui-ci évoque une production qui l’a rapidement dépassé avec le passage au format Blockbuster, revient sur ses références du genre, sa collaboration avec Raimi et l’échec malheureux du film à sa sortie en salle.
Liste des bonus
L’Ange de la vengeance (50’), Analyse de séquence : le duel entre Kid et John Herod (9’), Simon Moore : l’écriture de Mort ou vif (19’), Making of (6’), Scènes coupées (5’), Bande annonce.