MONSIEUR AZNAVOUR

France – 2024
Support : Bluray
Genre : Biopic, Drame
Réalisateur : Mehdi Idir, Grand Corps Malade
Acteurs : Tahar Rahim, Bastien Bouillon, Camille Moutawakil, Marie-Julie Baup, Petra Silander, Tigran Mekhitarian…
Musique : Aucune
Image : 2.39 16/9
Son : Français Dolby Atmos, Audiovision
Sous-titres : Français pour sourds et malentendants
Durée : 133 minutes
Editeur : Pathé
Date de sortie : 26 février 2025
LE PITCH
Fils de réfugiés, petit, pauvre, à la voix voilée, on disait de lui qu’il n’avait rien pour réussir. À force de travail, de persévérance et d’une volonté hors norme, Charles Aznavour est devenu un monument de la chanson, et un symbole de la culture française. Avec près de 1200 titres interprétés dans le monde entier et dans toutes les langues, il a inspiré des générations entières. Découvrez le parcours exceptionnel et intemporel de MONSIEUR AZNAVOUR.
« Mes amis, mes amours, mes emmerdes »
Décédé à l’âge vénérable de 94 ans après soixante-cinq ans de carrière, quelque cent quatre-vingts millions de disques vendus de par le monde, près de huit cents chansons dont une bonne poignée connue de tous et reprises dans toutes les langues, Charles Aznavour était un monument de la chanson. Un monument lourd et encombrant qui semble peser bien lourd dans les bras de Mehdi Idir et Grand Corps Malade, auteurs d’un biopic qui semble constamment courir après son sujet, insatiable.
C’est que jusqu’au bout, Aznavour aura continué à monter sur scène, à chanter, à faire exister sa musique. Un artiste boulimique multipliant les performances, les disques, les shows, comme pour constamment s’efforcer de remplir une vie qui n’a jamais le temps d’être vide. Une course après le succès, l’argent et les gros cachets (il en est beaucoup question ici) et la reconnaissance qui lui aura ainsi fait croiser de nombreux grands noms des milieux artistiques divers, accumuler les conquêtes, épuiser les amitiés et creuser une distance manifeste avec celles qui auraient pu être les femmes de sa vie et ses propres enfants. L’un des grands sujets du film, portrait d’un homme hermétique, solitaire (égoïste ?), trop conscient de ses talents, qui aurait dû permettre au métrage de culminer lors de l’annonce de la mort (suicide ?) d’un fils, reconnu sur le tard, mais qui en dehors de quelques larmes retenues et un petit montage pour souligner la détresse, rapide, d’un père, ne suscite finalement que peu d’émotions et de considérations.
« je me voyais déjà… »
Monsieur Aznavour se montrait aussi particulièrement intéressant lorsqu’il explorait durant le premier tiers du film, le parcours du jeune Aznavourian, films d’immigré arménien ayant grandi dans les faubourgs parisiens, faisant ses premiers pas dans le music-hall à l’heure de l’occupation. Une jolie reconstitution, des pistes évoquées sur ses liens avec la résistance, les brimades vécues à cause de son teint basané et son air trop méditerranéen… Mais là encore, le film ne s’attarde pas. C’est qu’il y a encore beaucoup d’autres épisodes à raconter, d’anecdotes et de chansons mythiques à illustrer et de grandes figures de l’histoire à croiser : un festival de name-droping aussi inutile qu’embarrassant. Comme beaucoup trop de biopics de ces dernières années, celui-ci veut tout raconter et finalement ne raconte pas grand-chose, ne pouvant s’appuyer sur aucun point de vue, sur aucune véritable direction. Accumulation de saynètes, de personnages qui ne font que passer, de détails biographiques qui au-delà de l’habituelle hagiographie (la famille veille au grain) laisse la cible du film à distance. La proposition des auteurs de Patients et La Vie Scolaire confond ainsi illustrer et comprendre, raconter et s’approprier. Ainsi malgré un scénario qui délivrent tout de même des informations régulièrement intéressantes et permet de connaitre un peu mieux la vie de ce grand bonhomme, le spectateur n’a jamais l’impression d’apprendre à le connaitre, d’aller au-delà de cette image glacée déjà bien incarnée dans les médias et les émissions TV hommage.
A ce titre, l’interprétation du pourtant très bon Tahar Rahim est un cas d’école, noyé sous quelques couches de maquillages, quelques effets numériques de de-aging pour les premières années, elle imite plus qu’elle n’incarne, reprenant de manière rigide et caricaturale intonations de la voies, mimiques et tics du chanteur, ajoutant encore une distance avec le sujet. Pour le coup, on sera nettement plus séduit par la finesse plus sentimentale de Bastien Bouillon en Pierre Roche (camarade de chant qui sera laissé sur le bord du chemin) et par une Marie-Julie Baup absolument réjouissante en Edit Piaf, à la fois vacharde et bienveillante. Eux au moins réussissent à s’extraire par quelques dialogues, quelques regards, de cette vitrine trop lustrée et trop brillante.
Image
Images léchées et numérique limpide donnent forcément un Bluray de très belle qualité. Pathé fournit un master lumineux et pointu, délivrant un piqué profond et un relief aussi naturel qu’harmonieux. Les lumières, souvent chaudes et nostalgiques, affirment une palette étendue et des contrastes toujours bien dessinés. Les scènes sombres (dans les cabarets par exemple) restent toujours précises sans décrochage, tandis que la définition fait preuve d’une solidité admirable. Carré.
Son
Une seule piste sonore est proposée pour l’édition, du Dolby Atmos. Il était effectivement indispensable pour profiter pleinement du travail sonore impressionnant du film, du mariage entre les voix de Tahar Rahim et Aznavour, des différentes performances scéniques ou extradiégétiques, ou des diverses ambiances reconstituées avec beaucoup de chaleur. Le mixage fourmille de détail et de naturel, se développant généreusement sur tout le panel d’enceintes avec une belle fluidité.
Interactivité
Étonnement pas de making of ou de documentaire revenant sur la vie du chanteur, Monsieur Aznavour est accompagné uniquement d’une version filmée du Podcast Séance tenante consacré au film. Enregistré à l’occasion d’une première publique du film, elle permet surtout de retrouver les deux réalisateurs et l’acteur principal pour une longue interview croisée. Chacun y revient sur son lien avec Aznavour, les origines du film, l’implication très tôt de Tahar Rahim jusque dans l’écriture, les motivations du film et le regard porté sur l’artiste. Il y est même question d’un premier montage dépassant les trois heures et qui approfondissait, entre autres, la longue carrière cinéma d’Aznavour. Une bonne atmosphère pour cette rencontre et des propos sincères.
Liste des bonus
« Séance tenante » : Masterclass de Mehdi Idir, Grand Corps Malade et Tahar Rahim (50’).