MEN
Royaume-Uni – 2022
Support : Bluray
Genre : Horreur
Réalisateur : Alex Garland
Acteurs : Jessie Buckley, Rory Kinnear, Paapa Essiedu, Gayke Rankin, Sarah Twomey
Musique : Geoff Barrow, Ben Salisbury
Durée : 100 minutes
Image : 1.85 16/9
Son : Anglais et Français DTS HD Master Audio 5.1
Sous-titres : Français
Éditeur : Metropolitan
Date de sortie : 21 octobre 2022
LE PITCH
Après avoir vécu un drame personnel, Harper décide de s’isoler dans la campagne anglaise, en espérant pouvoir s’y reconstruire. Mais une étrange présence dans les bois environnants semble la traquer. Ce qui n’est au départ qu’une crainte latente se transforme en cauchemar total, nourri par ses souvenirs et ses peurs les plus sombres du héros qu’il incarne dans les livres, Alan se lance à la rescousse de la romancière.
(dé)libération
Le cinéma d’Alex Garland ne plait pas à tout le monde. Voilà sans doute l’un des signes que l’auteur affirme une œuvre particulière, personnelle et ambitieuse. Après Ex_Machina et Annihilation, ce dernier poursuit son sillon inégal mais assez fascinant avec Men, où le mâle devient la source de l’horreur contemporaine.
Harper (intense Jessie Buckley) est une femme hantée. Hantée par la vision de son mari qui a choisi de se suicider après que celle-ci lui ai exprimé son désir de le quitter. Une séquence d’ouverture aussi angoissante (déjà) qu’hypnotique qu’Alex Garland ne va par la suite cesser de décortiquer et surtout de reconstruire, affirmant peu à peu une culpabilité injuste, mais naturelle, pour Harper et surtout ce qui pourrait s’approcher d’une prise en otage affective de la part l’ex-époux, imprimant définitivement sa marque sur elle par un statut de veuve. Un nom de famille qui reste le sien, c’est l’une des marques du male gaze, cette idée que le regard masculin prédomine totalement dans la société contemporaine et conditionne l’existence des femmes. Un concept qui dans Men (titre d’une telle simplicité que personne n’y avait pensé avant) prend littéralement corps au cœur d’une charmante bourgade anglaise. Ses petites maisons rustiques et cossues, ses champs de fleurs, ses bois lumineux et une gente masculine qui étrangement partage systématiquement le même visage (sacrée performance de la part de Rory Kinnear) sans même que l’héroïne n’en fasse vraiment cas L’idée donc que même si tous les hommes ne sont pas les mêmes, ils partagent certainement des fibres ADN et un conditionnement qui les rapproche et leur donne systématiquement les traits de l’oppresseur.
It’s a man’s man’s world
Des remarques lourdes et déplacées du propriétaire de la maison louée, aux insultes d’un gamin perturbé, la culpabilisation morbide du pasteur et les apparitions surréalistes d’un homme nu la suivant et la scrutant à travers les vitres, la réalité étouffante des femmes d’aujourd’hui devient le cadre d’un film d’horreur métaphorique finalement assez limpide. Un concept visuel assez génial, mais que le cinéaste ne se résout pas à laisser respirer naturellement, venant lui ajouter les visions d’origines plus primitives, des rapprochements avec les figures de l’homme vert (esprit de la nature et de la virilité), opposées à celle plus matriarcale de la Sheela Na Gig au sexe béant. Un thriller dérangeant et atmosphérique qui se tourne vers de la folk horror un peu poussive pour finalement s’engouffrer dans un final body horror aussi spectaculaire que lourdement symbolique évoquant de manière très visuel l’héritage pervers transmis par les hommes à leur progéniture de génération en génération. Se voulant comme David Lynch un auteur qui livre de manière abrupte ses délires les plus profonds, laissant ses œuvres respirer et extérioriser leurs mystères, Alex Garland peine cependant à ne pas venir constamment souligner et graver ces argumentaires thématiques. Intéressant mais un peu lassant certainement. Dommage car plus que jamais sa mise en scène extrêmement précise et habilement calculée, l’atmosphère installée par une photographie tranchée entre représentation quasi-naturaliste et intérieures psychanalytiques, affirme une esthétique parfaitement maitrisée et puissante… jusque dans cette musique obsédante, primale, qu’Harper a elle-même construite en jouant des échos d’un tunnel oublié dans les bois. Une idée simple et poétique pour ce qui reste la plus belle séquence, libératrice, du film.
Image
Tourné en 4k avec de multiples camera nouvelle génération (Sony CineAlta, Phantom Flex4K….) Men a été extrêmement retravaillé en postproduction. La photographie de Rob Hardy (Mission : Impossible Fallout) sature les couleurs, déformant légèrement les cadres et les images, transformant finalement la réalité brute enregistrée par les appareils. Mais en dehors de quelques plans marqués par des effets de bandings et de petits artefacts dans certains noirs, le master HD présenté reste d’excellente facture assurant de superbes contrastes, une définition admirable et une compression aux petits oignons, avec une pointe évidente pour les séquences lumineuse en pleine nature.
Son
Si le métrage débute avec un DTS HD Master Audio 5.1 plutôt sage et discret, l’expérience se corse progressivement alors que les sonorités deviennent de plus en plus dissonantes et la musique de plus en plus envahissante. Un mix idéal pour appuyer l’expérience sensorielle du film, fluide et enveloppante où l’on note aussi une spatialisation habilement gérée, à la fois naturelle et parfois bien angoissante.
Interactivité
Seul un making of plutôt sobre vient étoffer le film. Ne dépassant pas la demi-heure et restant surtout centré sur les interviews d’Alex Garland, Jessie Buckley et Rory Kinnear, il est cependant suffisamment précis et sérieux pour venir aborder le travail très collégial autour de la construction du métrage et la place que le cinéaste laisse à ses collaborateurs, les inspirations à la fois païennes et très actuelles du scénario et le regard très particulier que Garland pose sur la réalisation proprement dite. Ce dernier affirme d’ailleurs sa volonté de laisser le spectateur dans le flou quant à sa propre interprétation du film.
Liste des bonus
« Rebirth » : making of (24’), Bandes-annonces.